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Quelle place pour les régions maritimes dans la politique européenne de cohésion ?

Les îles et régions littorales de l’Union européenne ont chacune leurs spécificités. Elles coopèrent pourtant afin de répondre ensemble à des défis communs, mobilisant les instruments de la politique de cohésion.

La politique de cohésion de l'UE s'attaque aux disparités économiques et sociales entre régions européennes (image d'illustration, port du Guilvinec, Bretagne)
La politique de cohésion de l’UE s’attaque aux disparités économiques et sociales entre régions européennes (image d’illustration, port du Guilvinec, Bretagne) - Crédits : Vincent Gouriou / Commission européenne

De la Guadeloupe à l’Estonie, en passant par les îles grecques, l’Andalousie et la Bretagne : les régions maritimes sont loin d’être identiques. Ces territoires sont pourtant confrontés à des défis communs, parmi lesquels le développement de la pêche ou les conséquences du changement climatique.

Destinée à endiguer les écarts de richesses entre les territoires de l’UE, la politique européenne de cohésion est l’un des instruments mis à la disposition de ces régions. “Ce n’est pas seulement un grand fonds avec de l’argent”, explique Eleni Marianou, secrétaire générale de la Conférence des Régions périphériques maritimes (CRPM), une association européenne réunissant 150 territoires issus de 24 pays. “La politique de cohésion permet d’articuler les besoins des citoyens, les stratégies régionales, les investissements dans les territoires et le projet européen lui-même”, poursuit cette avocate de formation, interrogée à l’occasion des 50 ans de la CRPM, dont l’anniversaire s’est tenu à Saint-Malo (Bretagne) mi-novembre.

Les financements européens pour les régions maritimes

Pour rappel, cette politique de cohésion se compose de plusieurs grands fonds qui financent des projets précis. Le plus gros d’entre eux, le Fonds européen de développement régional (FEDER), soutient surtout des initiatives en faveur du numérique, des entreprises ou encore de l’environnement. Le Fonds social européen + (FSE+) donne un coup de pouce à des projets liés à l’emploi, la formation et l’inclusion sociale. Enfin, le Fonds de cohésion (FC) aide uniquement les Etats membres les moins développés dans des domaines structurels, comme les transports.

Nous savons que les régions périphériques ont plus de défis à relever, non seulement parce qu’elles ont des problèmes d’accessibilité et de transport, mais aussi parce qu’elles sont en première ligne sur les questions migratoires ou sociales”, estime Silvia Burzagli, représentante de la Toscane, dont la Région détient la vice-présidence de la CRPM pour la politique de cohésion. Et bien que ces territoires soient très différents d’un bout à l’autre du Vieux Continent, et même outre-mer, ils font face à des “problèmes communs”, assure Eleni Marianou, citant tour à tour la crise énergétique ou la montée des eaux en raison du changement climatique.

Si les régions maritimes ont accès à ces différents financements de l’UE, il en existe un taillé sur mesure pour elles : le Fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l’aquaculture (FEAMPA). Pour la période 2021-2027, la France bénéficie d’une enveloppe de 6,1 milliards d’euros. “Il s’agit d’une politique avec plusieurs niveaux de gouvernance et qui part du terrain”, défend pour sa part la commissaire européenne à la Cohésion Elisa Ferreira. En France, les Régions gèrent ainsi l’essentiel de ces financements de l’UE. “Il y a une vraie proximité avec les citoyens car les projets sont concrets”, souligne Eleni Marianou. En Bretagne par exemple, le FEAMPA a financé l’amélioration de la performance énergétique d’une culture de moules de bouchot. Et en Nouvelle-Aquitaine, ce même fonds européen a aidé un projet visant à limiter les captures accidentelles de dauphins dans le Golfe de Gascogne.

Macro-régions

En parallèle des fonds de cohésion, l’UE a deux instruments pour une approche plus territorialisée des politiques européennes : les “macro-régions” et les “bassins maritimes”. Ces stratégies permettent une coopération plus efficace, mais aussi des investissements mieux coordonnés dans des territoires concernés par des enjeux comparables.

On dénombre ainsi quatre macro-régions à ce jour. La stratégie de l’Union européenne pour la région alpine (EUSALP ou SUERA), la région du Danube, celle de la mer Baltique, ainsi que la stratégie pour les mers Adriatique et Ionienne. Alors que ces macro-régions concernent 19 Etats membres et huit pays hors-UE, toutes comportent en leur sein des territoires maritimes. Elles peuvent donner accès à des financements européens lorsqu’elles sont doublées d’un programme Interreg, l’instrument de coopération de l’Union européenne inclus dans la politique de cohésion.

Dans le cadre de la macro-région autour des mers Adriatique et Ionienne, neuf pays ont par exemple mené des projets liés au tourisme. Alors que leurs musées ont accueilli 86 millions de visiteurs en 2019, ces territoires méditerranéens ont mené une vaste étude en commun. L’objectif ? Recueillir des informations sur le profil, les habitudes et la consommation des visiteurs, afin d’améliorer l’offre de tourisme en Italie, en Grèce ou encore en Croatie.

Les “bassins maritimes” permettent quant à eux de mener une approche commune sur une mer ou un océan. Après la première stratégie, initiée en 2019 et concernant la Baltique, la Commission européenne a adopté d’autres plans relatifs aux bassins maritimes pour la mer Noire, l’Atlantique, la région de l’Adriatique et de la mer Ionienne, l’Arctique ainsi que les régions ultrapériphériques, l’outre-mer de l’UE.

Vers un “Pacte bleu” pour l’UE ?

D’aucuns poussent d’ailleurs à intensifier ces formes de coopération. Et notamment à créer une nouvelle macro-région pour l’Atlantique. En mai 2023, la Commission Arc Atlantique de la CRPM a adopté à Cardiff (Pays de Galles) une déclaration politique dans laquelle ses Régions membres ont réitéré leur demande de création d’une telle stratégie macro-régionale atlantique.

Plus largement, la CRPM estime que “le moment est venu de doter l’UE d’un véritable ‘Pacte bleu’ destiné à fournir un cadre politique […] plus cohérent pour la future génération de politiques maritimes européennes, nationales et régionales”. Cette revendication, inscrite dans le manifeste de l’association à destination des institutions européennes voté à St-Malo, inclut entre autres l’idée d’un nouveau “paquet sur l’industrie maritime pour dynamiser le marché intérieur”.

Cette idée d’un “Pacte bleu” fait écho au Pacte vert, le chantier environnemental qui doit mener l’UE vers la neutralité climatique en 2050. La requête n’est pas isolée. Récemment, le Comité économique et social européen (CESE) et un groupe transpartisan d’eurodéputés ont appelé à faire de la gestion de l’eau une des grandes priorités de l’UE, parlant eux aussi de “Pacte bleu”.

Reste que les élections européennes de juin 2024 décideront en partie de l’avenir d’un éventuel Pacte bleu, le futur Parlement européen ayant bien sûr son mot à dire sur les politiques de l’UE des prochaines années, avec les Etats membres et la Commission. Tout comme les résultats des élections influenceront la future politique de cohésion après 2027, année qui marque la fin de la programmation actuelle.

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