Toute L'Europe – Comprendre l'Europe
  • Synthèse

Les régions ultrapériphériques, territoires européens au cœur des océans

Caraïbes, océan Indien, Amérique du Sud… Avec les territoires appartenant aux Etats membres et éloignés du Vieux Continent, l’Union européenne est présente aux quatre coins du monde. Parties intégrantes de l’UE, les régions ultrapériphériques (RUP) n’en sont pas moins soumises à des règles spécifiques.

Mayotte fait partie des "régions ultrapériphériques" de l'Union européenne
Mayotte fait partie des “régions ultrapériphériques” de l’Union européenne - Crédits : dk-photos / iStock

Le statut de région ultrapériphérique (RUP) s’applique à neuf territoires appartenant à trois Etats membres de l’Union européenne : la France (Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte, La Réunion et Saint-Martin), l’Espagne (îles Canaries) et le Portugal (Açores et Madère).

Les régions ultrapériphériques sont, comme les autres territoires de l’Union européenne, soumises au droit européen mais avec certaines spécificités résultant en premier lieu de leur éloignement géographique. Ce statut, reconnu officiellement pour la première fois en 1992 par le traité de Maastricht, a été formellement défini en 2009 par l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne.

La situation particulière de ces régions est définie par l’article 349 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). Celui-ci décrit une “situation économique et sociale structurelle” des 9 régions, “aggravée par leur éloignement, l’insularité, leur faible superficie, le relief et le climat difficiles, leur dépendance économique vis-à-vis d’un petit nombre de produits”. Autant de facteurs qui, selon le même article, “nuisent gravement à leur développement”.

Les RUP offrent toutefois de nombreux atouts à l’Union européenne. Elles lui assurent une présence dans des zones géographiques stratégiques, et présentent d’importantes potentialités en matière de recherche et d’innovation. Les secteurs de la biodiversité terrestre et marine (La Réunion a été classée par l’Union mondiale pour la nature parmi les 34 “points chauds” de la biodiversité), de la pharmacologie (grâce à la présence de plantes endémiques présentant des substances actives utilisables par l’industrie), des énergies renouvelables et de l’aérospatial (le centre spatial guyanais est la principale base de lancement de satellites et fusées de l’Union européenne) en sont les exemples les plus remarquables.

Les RUP se distinguent des 13 “pays et territoire d’outre-mer” (PTOM) qui, bien qu’étant sous la souveraineté de plusieurs Etats membres, ne sont pas membres de l’Union européenne. La France est le seul Etat membre de l’UE à compter à la fois des RUP et des PTOM.

Un droit européen adapté aux spécificités locales

L’article 349 définit la politique européenne à l’égard des RUP et précise la façon dont le droit européen s’y applique en tenant compte de leurs spécificités. Dans l’arrêt “Mayotte” du 15 décembre 2015, la Cour de Justice de l’Union européenne a réaffirmé ce statut particulier pour maintenir une adaptation des politiques de l’UE dans les régions ultrapériphériques. Auparavant temporaires et limitées, les adaptations au droit européen ont notamment pu devenir permanentes.

Dans le domaine agricole par exemple, un programme d’options spécifiques à l’éloignement et à l’insularité (POSEI) permet de stimuler les productions agricoles et agroalimentaires des RUP, en compensant notamment l’éloignement géographique pour certains approvisionnements nécessaires à l’alimentation animale, aux industries agroalimentaires et à l’alimentation humaine.

Les spécificités des RUP sont aussi reconnues en ce qui concerne la politique des aides d’Etat, ces aides accordées aux entreprises au moyen de ressources publiques. Ainsi, l’article 107(3) (a) du TFUE permet l’application dans les RUP de taux d’aides supérieurs, indépendamment du niveau de leur PIB, afin de leur assurer un environnement adéquat pour le développement des PME et TPE.

En matière de fiscalité enfin, les RUP bénéficient de dispositions spécifiques en lien à leur réalité locale. On peut citer notamment les exonérations fiscales et la diminution de l’octroi de mer pour les produits des RUP.

En vertu de l’article 349 TFUE, le Conseil peut arrêter des mesures spécifiques, sur proposition de la Commission et après consultation du Parlement européen, visant à adapter certaines dispositions du droit et des politiques de l’Union aux caractéristiques et contraintes particulières des régions ultrapériphériques.

Fonds structurels : des dotations plus importantes

Concernées par l’ensemble des politiques européennes, les RUP sont plus particulièrement bénéficiaires de la politique de cohésion. Celle-ci vise à réduire les écarts de richesse et de développement entre les régions de l’Union. Selon un rapport sénatorial, “si les six RUP françaises représentent 3,2 % de la population française, elles ont reçu en revanche 17,4 % des [fonds structurels] au niveau national” entre 2014 et 2020.

Les RUP françaises devraient toucher environ 3,5 milliards d’euros du Fonds européen de développement régional (FEDER) et du Fonds social européen + (FSE+) pour la part dont elles ont la charge entre 2021 et 2027. Elles ont bénéficié de 4,9 milliards d’euros au titre de la politique de cohésion sur la période 2014-2020, des montants qui ont permis de financer 1 420 projets, selon un rapport du Sénat français.

A l’exception de la Martinique, considérée comme région “en transition” sur la période 2021-2027, les RUP font partie de la catégorie des “régions les moins développées” de l’Union. Une qualification donnée en fonction de critères économiques et sociaux (taux de chômage, PIB de la région…), qui leur permet de bénéficier de dotations plus importantes des fonds européens structurels et d’investissement (FESI).

Les fonds européens sont gérés localement par des autorités de gestion désignées par lettre du Premier ministre. Ainsi, les préfectures et les collectivités locales sont les principaux interlocuteurs des porteurs de projets des RUP.

Le taux de cofinancement des projets, c’est-à-dire la participation financière de l’Union européenne, est alors plus élevé que dans les régions métropolitaines et peut atteindre 85 %. Les critères de sélection sont fonction des programmes opérationnels regroupant une grande variété de domaines : recherche et innovation, environnement, transition numérique, emploi, développement durable, énergie, aides aux entreprises.

De plus, les RUP sont très impliquées dans les programmes de coopération territoriale (INTERREG) cofinancés par le FEDER, qui constituent pour elles un instrument pour renforcer leur intégration régionale. Le programme “Caraïbes” entre la Martinique, la Guadeloupe, St-Martin, la Guyane et associant les Etats de la zone Caraïbe en est un exemple.

Par ailleurs, le programme Horizon Europe pour la recherche et le développement constitue une opportunité pour ces régions, dont la position géographique favorise le développement de projets de recherche et d’innovation, notamment dans les énergies renouvelables, l’es­pace, l’agriculture, la mer et la biodiversité.

Quelle représentation ?

En France, plusieurs acteurs institutionnels assurent la défense des intérêts des RUP auprès de l’Union européenne :

  • le ministère des Outre-mer, dont le bureau des politiques européennes, de l’insertion régionale et de la valorisation de l’Outre-mer coordonne les actions en faveur des RUP ;
  • quatre députés européens, qui font entendre la voix des régions d’outre-mer françaises au Parlement européen. Le Réunionnais Younous Omarjee (LFI, La Gauche) y est notamment président de la commission du développement régional (REGI), premier ultramarin à occuper un tel poste. Certaines collectivités locales, qui gèrent une partie des fonds européens, disposent également de représentations auprès des institutions européennes ;
  • les présidents des six RUP françaises participent à coté des autorités locales espagnoles et portugaises à la prise en compte des RUP dans l’ensemble des politiques européennes.

La Martinique est actuellement à la tête de la Conférence des régions ultrapériphériques, pour un an. Son président Serge Letchimy a esquissé cinq priorités dans son travail avec les institutions européennes : la différenciation, la diplomatie territoriale, l’autonomie alimentaire, la prise en compte des valeurs écosystémiques et l’indépendance énergétique.

Votre avis compte : avez-vous trouvé ce que vous cherchiez dans cet article ?

Pour approfondir

À la une sur Touteleurope.eu

Flèche

Participez au débat et laissez un commentaire

Commentaires sur Les régions ultrapériphériques, territoires européens au cœur des océans

Lire la charte de modération

Commenter l’article

Votre commentaire est vide

Votre nom est invalide

1 commentaire

  • Avatar privé
    Ali

    mon question est la : qu’est ce que le RUP a porte a l’Europe ?