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Climat : quelle est la stratégie de la Commission européenne en matière de réhabilitation thermique des bâtiments ?

“Vague de rénovations” : c’est le nom du plan d’action de l’exécutif européen pour doper l’efficacité énergétique des bâtiments, responsables d’une grande partie des émissions de gaz à effet de serre. Une stratégie initiée dans le cadre du Pacte vert de l’Union européenne, qui repose sur une multitude de financements européens et nationaux.

L'objectif de la Commission européenne est de parvenir à une réduction de 60 % des émissions de gaz à effet de serre des bâtiments d'ici à 2030, par rapport au niveau de 2015 - Crédits : BrianAJackson. / iStock
L’objectif de la Commission européenne est de parvenir à une réduction de 60 % des émissions de gaz à effet de serre des bâtiments d’ici à 2030, par rapport au niveau de 2015 - Crédits : BrianAJackson. / iStock

A l’heure où les prix de l’énergie flambent, économiser sa consommation constitue une bonne manière d’y faire face. Car la précarité énergétique - le fait de ne pas en être mesure d’assurer correctement les besoins en énergie de son logement - touche beaucoup d’Européens. Près de 6,9 % des ménages de l’Union européenne n’étaient pas en mesure de se chauffer correctement en 2019, d’après Eurostat.

Présentée en octobre 2020, la stratégie de la Commission européenne en termes de réhabilitation thermique a donc une importante dimension sociale. Mais “vague de rénovations” répond aussi à un autre objectif, à savoir le climat. A l’heure actuelle, les bâtiments sont responsables de 40 % de la consommation énergétique de l’UE et de 36 % des émissions de gaz à effet de serre dues à l’énergie.

Une situation qui fait obstacle à l’objectif de neutralité climatique à l’horizon 2050 que les Etats membres se sont fixés dans le cadre du Pacte vert pour l’Europe.

Doublement des taux de rénovation

Mais beaucoup de chemin reste à parcourir. Aujourd’hui, seul 1 % du parc immobilier européen est rénové thermiquement chaque année. L’objectif de la Commission européenne est de parvenir à multiplier par deux ce taux, pour atteindre un total de 35 millions de bâtiments rénovés d’ici à 2030. A cette date, une réduction de 60 % des émissions de gaz à effet de serre des bâtiments, en comparaison avec le niveau observé en 2015, est visée. Une stratégie qui pourrait aboutir à la création de 160 000 emplois dans le secteur, espère la Commission.

Sur son site, celle-ci indique que “la politique et les financements européens ont déjà eu un impact positif sur l’efficacité énergétique des bâtiments neufs, qui ne consomment plus que la moitié de l’énergie des bâtiments construits il y a plus de 20 ans”. Cependant, les bâtiments sont loin d’être majoritairement neufs en Europe : 85 % d’entre eux ont plus de 20 ans et 85 à 95 % existeront encore en 2050, fait savoir l’exécutif européen. Ce qui explique l’urgence de rénover ces constructions. 

Dans son “paquet climat” dévoilé en juillet 2021, destiné à permettre une réduction très conséquente des émissions de gaz à effet de serre, la Commission européenne propose une directive ayant pour but de relever les obligations des États membres en matière d’économie énergétique. Si elle était acceptée en l’état par les Vingt-Sept et les eurodéputés, tous les pays de l’UE seraient tenus de baisser chaque année leur consommation d’énergie finale, à savoir l’énergie utilisable par le consommateur après transformation, de 1,5 %, contre 0,8 % actuellement. L’exécutif européen souhaite par ailleurs qu’ils donnent l’exemple en procédant chaque année à la rénovation de 3 % de la surface des bâtiments publics.

Le “paquet climat”, 12 mesures d’une ampleur inédite

De son nom officiel “Fit for 55” (“Paré pour 55”), cet ensemble de 12 propositions législatives, présentées en juillet par la Commission européenne, vise à réduire les émissions de gaz à effet de serre de 55 % d’ici à 2030 par rapport aux niveaux de 1990. Une cible intermédiaire, approuvée par les États membres et les députés européens, pour réaliser l’objectif final de neutralité climatique à l’horizon 2050. Les mesures proposées dans le “paquet climat” sont pensées pour profondément verdir l’économie et les sociétés de l’UE, et ont été élaborées pour se compléter au mieux.

Ce qui est avancé dans “Fit for 55” pour la rénovation thermique des bâtiments, et avant dans la stratégie “vague de rénovations”, doit notamment être renforcé par les autres mesures mises sur la table en juillet. Pour inciter davantage à l’efficacité énergétique, le paquet législatif de la Commission prévoit, par exemple, l’extension du marché du carbone européen au secteur du bâtiment. De quoi le pousser financièrement à limiter ses émissions. De même, le “paquet climat” envisage le doublement des énergies renouvelables dans le mix énergétique de l’UE, d’un peu moins de 20 % en 2019 à 40 % en 2030. Là encore, des bâtiments utilisant plus de sources d’énergie renouvelable seraient bien moins émetteurs que s’ils étaient alimentés à partir d’énergies fossiles, et contribueraient mieux à la baisse des émissions carbone du parc immobilier.

Imaginé afin que la transition énergétique ne pénalise pas les citoyens les plus vulnérables économiquement, et qui sont aussi parmi les plus dépendants aux énergies fossiles, un Fonds social pour le climat est prévu par le “paquet climat”. Cofinancé par les États membres, il serait doté de 144,4 milliards d’euros pour la période 2025-2032 et pourrait notamment aider ceux qui en ont le plus besoin à financer la rénovation thermique de leurs logements.

Que fait l’UE en termes de financements ? 

Les États, les Régions et les entreprises disposent de nombreuses ressources financières pour concrétiser la rénovation thermique des bâtiments. Au niveau européen, ils peuvent faire appel aux fonds structurels. Le plus important d’entre eux, le Fonds européen de développement régional (FEDER), doté d’une enveloppe de plus de 200 milliards d’euros pour la programmation budgétaire 2021-2027 et dont les Régions françaises sont autorités de gestion, permet le financement de nombreux projets. Et ces réalisations incluent notamment les travaux d’amélioration de l’efficacité énergétique.

A ces fonds “traditionnels” s’ajoute le plan de relance européen “Next Generation EU” de 750 milliards d’euros, adopté en juillet 2020 pour faire face aux conséquences de la crise économique due à la pandémie de Covid-19. 37 % des sommes versées ou prêtées aux États membres via le plan doivent être consacrées au climat, ce qui comprend donc la rénovation thermique. “Next Generation EU” alimente aussi un Fonds de transition juste. Créé dans le cadre du Pacte vert, cet instrument de 17,5 milliards d’euros sur la période 2021-2027 a pour but d’aider les territoires qui ont la plus forte dépendance au carbone à réussir leur transition écologique.

En dehors des subventions, la Banque européenne d’investissement (BEI), l’institution financière des Vingt-Sept, prête chaque année des dizaines de milliards d’euros à des conditions avantageuses à travers toute l’UE. En 2020, sur les 76,8 milliards d’euros financés par la banque, dont 66,6 milliards dans les États membres, 40 % ont été réservés à des projets en faveur du climat et de l’environnement, un domaine incluant encore une fois l’efficacité énergétique. 

Pour des investissements plus risqués, dans la rénovation thermique notamment, les porteurs de projet peuvent se tourner vers InvestEU, un programme de l’UE qui succède au plan Juncker pour la période 2021-2027. Grâce à une garantie de l’UE de 26,2 milliards d’euros, InvestEU permet en effet de soutenir des investisseurs qui, en raison des risques que comportent leurs projets, auraient difficilement pu se tourner vers d’autres acteurs. Comme pour le plan Juncker, le principal partenaire d’investissement du programme est la BEI. En France, 25 % des fonds d’InvestEU sont gérés par la Caisse des Dépôts, en qualité de partenaire de mise en œuvre de l’exécutif européen.

Les “accompagnateurs rénov’ ” en France, proposition de la Caisse des Dépôts, un exemple de solution pour pallier la méconnaissance des possibilités de financement

Au niveau national, les particuliers peuvent solliciter des aides versées par les États. A l’instar de MaPrimeRénov’ en France, dispositif lancé en janvier 2020 et qui permet aux propriétaires de financer les travaux visant à améliorer l’efficacité énergétique de leurs logements. Une aide cumulable avec d’autres subventions.

Souvent, le manque de connaissance des aides et des sources de financements disponibles, de la réalité des travaux à entreprendre et des gains potentiels freinent, voire empêchent, les particuliers de réaliser la réhabilitation thermique de leurs logements. Une assistance technique peut ainsi s’avérer nécessaire, et encourager à effectuer de tels travaux. Alors que la BEI pratique cette assistance technique avec les grands investisseurs de la rénovation thermique via le mécanisme Elena (Mécanisme européen d’assistance technique pour les projets d’efficacité énergétique locaux), Olivier Sichel, directeur général délégué de la Caisse des Dépôts, avait préconisé de faire de même avec les particuliers.

Dans un rapport remis au gouvernement en mars 2021, il avait appelé à la création d’ ”accompagnateurs rénov’ ”, chargés d’accompagner du début à la fin les citoyens dans la réhabilitation de leurs logements. Une préconisation reprise par la “loi Climat-Résilience”, promulguée le 22 août. Ces “accompagnateurs rénov’ ” guideront les particuliers dans le choix des travaux et des artisans qui les réaliseront ainsi que dans le montage d’un plan de financement et veilleront à ce que les aménagements soient de qualité. A partir de 2023, y avoir recours sera obligatoire pour pouvoir continuer à bénéficier de certaines aides.

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