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Deux ans de guerre en Ukraine qui ont changé l’Union européenne

Défense, énergie, élargissement… Le bouleversement provoqué par l’invasion russe de l’Ukraine, le 24 février 2022, a profondément marqué et transformé l’Union européenne.

Depuis deux ans, l'Ukraine et l'Union européenne se sont fortement rapprochées - Crédits : Hung Chin Liu / iStock
Depuis deux ans, l’Ukraine et l’Union européenne se sont fortement rapprochées - Crédits : Hung Chin Liu / iStock 

Le 24 février 2022 constitue une date clé de l’histoire européenne. Pour le Vieux Continent, l’invasion de l’Ukraine par la Russie est porteuse de lourdes implications. Et le fort soutien apporté à Kiev par les Européens témoigne de l’importance de l’événement à leurs yeux.

Depuis deux ans, l’UE et ses Etats membres sont les premiers donateurs d’aides à l’Ukraine, avec un montant total qui dépasse les 85 milliards d’euros. Un soutien à la fois financier, humanitaire, mais aussi militaire. Près du tiers des sommes mobilisées vient en aide à l’armée ukrainienne. Les Etats membres accueillent par ailleurs environ 4 millions de réfugiés ukrainiens, contraints de fuir la guerre. Et face à la Russie, les Vingt-Sept ont adopté 12 paquets de lourdes sanctions. Avec pour but de frapper le Kremlin au portefeuille et l’empêcher de financer son effort de guerre.

Ce soutien inédit à l’Ukraine et l’opposition frontale à la politique du Kremlin ont poussé l’UE et ses Etats membres à revoir leurs approches dans plusieurs domaines clés. Notamment en matière de défense, d’énergie ou encore d’élargissement.

Renforcement de l’Otan et de la défense européenne

L’une des conséquences de la guerre en Ukraine est l’extension de l’Otan, cette organisation politico-militaire liant les Etats-Unis, le Canada et les pays européens. En envahissant l’Ukraine, le président russe Vladimir Poutine espérait freiner son élargissement vers l’est. Mais la manœuvre a eu l’effet inverse : l’Alliance atlantique s’est étendue non vers l’est mais vers le nord, en réaction aux nouvelles menaces que la Russie faisait peser sur l’Europe.

Dès le mois de mai 2022, la Finlande et la Suède sont en effet sorties de leur neutralité historique pour demander à rejoindre l’Otan. Helsinki a intégré l’Alliance atlantique en avril 2023, tandis que Stockholm n’attend plus que la ratification de la Hongrie pour faire de même. Ce sont donc 23 Etats membres de l’UE sur 27 qui appartiendront bientôt à l’Alliance atlantique.

Le choc de la guerre en Ukraine n’a pas seulement poussé les Européens à renforcer l’Otan. Il les a aussi conduits à développer leur propre défense, dans une volonté d’accroître leur “autonomie stratégique”. En mars 2022, un mois après l’invasion russe, les Vingt-Sept adoptent leur “boussole stratégique”, livre blanc visant à définir les grandes orientations de la sécurité et de la défense européennes jusqu’en 2030. Un document dans lequel ils indiquent leur désir d’être plus proactifs en la matière.

La plus forte implication des Européens dans le domaine de la défense s’est notamment matérialisée par des décisions inédites de soutien à l’Ukraine. Pour la première fois de l’histoire, les Vingt-Sept ont financé en commun des livraisons d’armes à un pays en guerre, à hauteur de 5,6 milliards d’euros. Ils ont aussi adopté un plan pour tenter de livrer, encore une fois en commun, un million de munitions à Kiev d’ici au printemps 2024.

Les Etats membres de l’UE ont par ailleurs fortement augmenté leur budget militaire et ainsi musclé leur sécurité collective. Selon l’Agence européenne de défense (AED), les dépenses militaires ont été en augmentation moyenne de 6 % dans l’UE en 2023, avec six Etats membres pour lesquels cette hausse dépasse les 10 %. En Suède, elle est même supérieure à 30 %.

Sortir de la dépendance aux énergies russes

La guerre en Ukraine a aussi amené les Européens à réorienter leur politique énergétique. En particulier pour sortir de leur dépendance aux énergies fossiles russes, qui constituent une manne financière considérable pour le Kremlin. Et lui permettent ainsi de financer l’effort de guerre en territoire ukrainien.

Lancé en mai 2022, le plan REPowerEU vise à sortir l’Union européenne de sa dépendance au gaz, au pétrole et au charbon russes d’ici à 2027. Avec plusieurs leviers : la diversification de l’approvisionnement en gaz, la réduction de la consommation d’énergie et l’augmentation de la part des renouvelables dans le mix énergétique.

A l’heure actuelle, des progrès importants pour réduire cette dépendance ont été accomplis. Selon la Commission européenne, la part de la Russie dans les importations de gaz par pipeline est passée de 40 % en 2021 à seulement 8 % en 2023. Les principaux fournisseurs de gaz de l’UE en 2023 étaient la Norvège (30 % de l’ensemble des importations) et les Etats-Unis (19 %), à grand renfort de gaz naturel liquéfié (GNL), qui tend à remplacer le gaz livré par pipeline. En troisième position, la Russie représentait 15 % des importations de l’Union européenne en comptant le gaz liquéfié. 

Les sanctions européennes contre la Russie touchent par ailleurs son secteur énergétique. Bien que le gaz ou les combustibles nucléaires ne soient pour l’heure pas concernés, l’UE a mis en place des embargos sur le charbon et l’essentiel du pétrole russes.

Concernant le développement de sources d’énergies alternatives, Etats membres et eurodéputés se sont mis d’accord en 2023 sur un objectif de 42,5 % de renouvelables dans le mix énergétique européen d’ici à 2030. En 2022, cette part s’élevait à 22 %.

Accélération de l’élargissement de l’Union européenne

Le conflit en Ukraine a aussi eu un impact sur les futurs élargissements de l’UE. Car la guerre a précipité plusieurs candidatures de pays souhaitant durablement sortir de la zone d’influence russe : l’Ukraine le 28 février 2022, suivie par la Moldavie et la Géorgie le 3 mars 2022. Deux Etats comportant aussi des territoires sécessionnistes occupés par la Russie.

Dans un délai particulièrement rapide, les Etats membres ont accordé le statut de candidat à l’Ukraine et à la Moldavie, en juin 2022. La Géorgie l’obtiendra un an et demi plus tard, le 14 décembre dernier. Ce même jour, les Vingt-Sept ont donné leur feu vert à l’ouverture des négociations d’adhésion avec l’Ukraine et la Moldavie.

Paradoxalement, en voulant renforcer l’influence russe à l’est de l’Europe, Vladimir Poutine aura donc, comme pour l’Otan, contribué à rapprocher les Etats de la région de l’UE. Et peut-être pas seulement dans cette partie du Vieux Continent. En accélérant le processus d’élargissement à l’Est, les Vingt-Sept ont été soucieux de ne pas oublier les pays des Balkans occidentaux. Une zone où certains attendent depuis plusieurs années dans l’antichambre de l’UE et où la Russie cherche aussi à asseoir son influence.

En juillet 2022, les négociations d’adhésion ont été officiellement lancées avec la Macédoine du Nord et l’Albanie, des Etats reconnus candidats respectivement en 2005 et en 2014. Six mois plus tard, le 15 décembre 2022, les Vingt-Sept ont accordé le statut de candidat à la Bosnie-Herzégovine. Ce même jour, le Kosovo a déposé sa demande d’adhésion à l’UE. Enfin, le 14 décembre dernier, les Etats membres approuvent, en même temps que pour l’Ukraine et la Moldavie, l’ouverture des négociations d’adhésion avec la Bosnie-Herzégovine, à condition toutefois qu’elle satisfasse 14 critères comprenant la démocratie et l’état de droit. Une nouvelle illustration d’une guerre en Ukraine qui a grandement fait bouger les lignes en Europe.

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1 commentaire

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    Martinaux Jacques

    Concernant l’énergie russe :
    Est-ce que le gaz et le pétrole russe ne transit pas par d’autres pays à qui l’Europe achète ces mêmes ressources ? ce qui amoindri grandement l’efficacité des mesures prises à l’encontre de V. Poutine (je dis volontairement ”Poutine” parce que le problème n’est pas la Russie mais c’est bien ”Poutine”).

    Concernant l’intégration à l’Europe :
    N’y a t-il pas, en l’état actuel des choses, un gros risque ”d’importation” de problèmes locaux, ultra conflictuels pour les questions de sécessionnisme, aboutissant à une profonde déstabilisation au sein même de l’Europe ?