Tout au long du second semestre 2022, la République tchèque assumera la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne. Mais l’UE étant constituée de 27 Etats membres, six mois est un délai bien court pour faire avancer ses priorités. C’est pourquoi depuis 2007, chaque pays collabore avec deux autres, qui le précèdent ou le suivent dans cet exercice. Les trois Etats fixent ainsi des objectifs à plus long terme, à savoir 18 mois, dans un système dit de trio. Un système d’abord informel qui s’est installé au fur à mesure des élargissements et que le traité de Lisbonne, entré en vigueur le 1er décembre 2009, a définitivement institutionnalisé.
Lorsque le premier pays du trio accède à la présidence, un programme commun est dévoilé. Chaque Etat présente quant à lui une feuille de route plus détaillée au début de son mandat au Conseil, pour les six mois où il est chargé de le présider. Mais pour mieux comprendre l’intérêt du système des trios, il convient de s’intéresser aux fondements de l’architecture institutionnelle de l’UE.
France, République tchèque, Suède : treize ans après
Ce n’est pas le premier trio que la France, la République tchèque et la Suède forment dans le cadre de la présidence du Conseil. Du 1er juillet 2008 au 31 décembre 2009, ils avaient déjà mené une telle coopération, la deuxième du genre après le trio de l’Allemagne, du Portugal et de la Slovénie. Trois pays qui se sont eux aussi retrouvés, à partir du 1er juillet 2020 jusqu’au 31 décembre 2021.
La France, la République tchèque et la Suède, tous les trois membres de l’espace Schengen, sont trois Etats membres de l’UE aux caractéristiques bien différentes. La France est un pays fondateur et membre de la zone euro. La République tchèque a rejoint l’Union lors de la vague d’élargissements vers l’Est en 2004 et n’appartient pas à la zone euro, tout comme la Suède, membre de l’UE depuis 1995. Des profils complémentaires qui doivent apporter une vision élargie des dossiers, et donc favoriser des décisions répondant le plus largement aux préoccupations des Européens.
Retrouvez l’intégralité du programme du trio de janvier 2022 à juin 2023.
Quatre grandes institutions européennes
Avec le Conseil européen, la Commission européenne et le Parlement européen, le Conseil de l’UE, aussi appelé Conseil, fait partie des quatre plus importantes institutions de l’Union européenne. La Commission détient le monopole de l’initiative législative, c’est-à-dire que c’est elle qui propose les textes de loi que sont les directives, les règlements et les décisions. Ses propositions sont formulées en accord avec les orientations politiques déterminées par le Conseil européen, qui réunit les chefs d’État et de gouvernement des 27 Etats membres.
C’est ensuite le Conseil, rassemblant quant à lui les ministres des pays de l’UE en dix formations thématiques (affaires étrangères, environnement, agriculture, etc…), et le Parlement européen qui débattent, amendent et votent les textes que leur soumet la Commission. Dans certains domaines, tels que la politique étrangère et de sécurité, le Conseil de l’UE décide même seul. Son pouvoir est donc particulièrement grand.
Cette institution est dirigée via un système de présidence tournante d’une durée de six mois, dont la liste est établie jusqu’en 2031. Tous les Etats membres l’exercent à tour de rôle. Pour un pays de l’UE, être à la tête du Conseil signifie que ce sont les ministres de son gouvernement qui dirigent les réunions de l’institution dans leurs domaines de compétence respectifs (sauf pour le Conseil des affaires étrangères, présidé par le haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité).
Des trios pour voir plus loin
Présider le Conseil ne veut pas dire décider, mais plutôt coordonner le travail des uns et des autres et faire émerger des compromis sur les dossiers législatifs. Une tâche qui n’est pas toujours aisée tant les divergences entre Etats membres peuvent être fortes.
Au début de chaque présidence du Conseil, le pays européen qui en a la charge présente un programme de travail qui comprend les priorités législatives de son mandat. A savoir les dossiers sur lesquels il considère que l’Europe doit prioritairement avancer pendant sa présidence. Mais à 27, difficile de se projeter sur une période aussi courte que six mois.
C’est pourquoi le Conseil fonctionne avec un système de trios. Dans cette configuration, trois pays amenés à prendre la tête de l’institution décident de priorités communes, de plus long terme, pour les 18 mois au cours desquels ils se succèdent. Chacun a ensuite un programme plus détaillé pour les six mois de sa présidence.
Continuité renforcée
Ce système permet alors d’assurer une continuité des travaux du Conseil. Et des transitions cohérentes entre les trois Etats du triplet, qui poursuivent des objectifs définis ensemble et présentés lorsque le premier d’entre eux assume la présidence du Conseil. Une tâche qu’il ne réalise donc pas seul, mais en collaboration avec les deux autres pays membre de son trio.
La continuité de l’action du Conseil de l’UE est aussi garantie par le Secrétariat général du Conseil, dont le Secrétaire général est le Danois Jeppe Tranholm-Mikkelsen depuis juillet 2015. Fil rouge de l’ensemble des présidences tournantes, il contribue lui aussi à l’élaboration de compromis européens soumis au vote des Etats membres.
La fin de la présidence exercée par la Slovénie (1er juillet – 31 décembre 2021) a signé celle du trio qu’elle a incarné aux côtés de l’Allemagne (1er juillet – 31 décembre 2020) et du Portugal (1er janvier – 30 juin 2021). Fortement marqué par la pandémie de Covid-19, leur programme commun avait ainsi fait de la lutte contre le coronavirus et de ses conséquences économiques et sociales la priorité n°1.
Faire adopter le budget pluriannuel 2021-2027 de l’UE, auquel le plan de relance de 750 milliards d’euros a été adossé, a alors été l’un des chantiers les plus importants du trio. Parmi les autres priorités à son agenda se trouvait notamment la promotion d’une Europe sociale, les transitions verte et numérique ou encore la recherche de réponses européennes aux questions migratoires.
Institutionnalisé par le traité de Lisbonne
Inscrire les priorités européennes dans la durée est une préoccupation de longue date. Car avant que le système des triplets ne devienne la norme, la gouvernance de l’Europe était entachée par des incohérences dues à un manque de coordination entre Etats membres.
Dès 1981, la collaboration entre le pays exerçant la présidence du Conseil, celui qui le précède et celui qui le suit se met officieusement en place. Lors du Conseil européen de Séville, les 21 et 22 juin 2002, les chefs d’Etat et de gouvernement des pays de l’UE, alors au nombre de 15, donnent un caractère plus officiel à cette pratique en invitant dans leurs conclusions les Etats membres à davantage coopérer à la direction du Conseil.
Le premier trio tel que nous les connaissons aujourd’hui, formalisé autour d’un programme commun officiel, est initié en janvier 2007 avec le triplet constitué par l’Allemagne, le Portugal et la Slovénie, le même que celui qui s’achève en décembre 2021. Le site officiel de la présidence allemande de l’époque mentionne d’ailleurs clairement les conclusions de Séville en juin 2002 comme raison d’être du trio.
Le système est ensuite définitivement institutionnalisé, et donc pérennisé, pendant la présidence portugaise du Conseil du second semestre 2007 par la signature du traité de Lisbonne le 13 décembre. Un texte qui entrera en vigueur deux ans plus tard, le 1er décembre 2009.
3 commentaires
Je me pose une question à propos de la présidence du Conseil de l’Union européenne. Les états membres d’un même trio peuvent-ils changer, s’ils en sont d’accord tous trois, l’ordre initialement prévu de prise de la présidence ? Si oui, sous quelles conditions ? Selon quelles modalités ? Je n’ai pas trouvé la réponse dans ce document, par ailleurs bien et clairement rédigé.
Comment en si peu de temps de la Présidence un pays volontariste peut ‘il convaincre les autre pays membres de l’union Européenne qu’il est temps d’agir pour éviter
sa désintégration et parvenir à relever le défi par rapport à l’hégémonise de la Chine qui grignote chaque jour un peu plus l’espace mondial
le flux des migrands dans l ue et les pays anglophones pourrais a mon sens tourner a des guerres de religions a court termes en aucun cas européens et anglophones ne risquerais pas la vie d enfants dans ses tentatives de plus en plus fréquentes et leurs pays de naissances ne font rien pour éviter ces atrocitees qui sont helas de plus en plus frequentes