“Nous pouvons déjà observer les changements sur le marché. Mais nous ne sommes pas convaincus que les solutions proposées par Alphabet [société mère de Google, NDLR], Apple et Meta respectent leurs obligations”, a déclaré lundi le commissaire européen au Marché intérieur Thierry Breton [France info]. Ce jour-là, la Commission européenne a ouvert cinq enquêtes contre ces trois grandes entreprises du numérique, qu’elle “soupçonne de ne pas avoir tiré toutes les conséquences des nouvelles règles” prévues par le Digital Markets Act (DMA), écrit Le Monde.
Autopromotion et données personnelles
L’exécutif européen reproche ainsi “à Alphabet d’avoir exploité le quasi-monopole de son moteur de recherche Google pour favoriser, grâce à de meilleurs référencements, ses propres services de comparateurs de prix au détriment des concurrents dans la recherche d’hôtels, de billets d’avion ou d’autres biens de consommation vendus en ligne” [Libération].
Google et Apple sont également soupçonnés de “limiter la capacité des développeurs à communiquer librement [avec les utilisateurs finaux], à promouvoir des offres et à conclure directement des contrats, y compris en imposant divers frais”, a déclaré la Commission, citée par la chaîne de télévision américaine CNN.
La firme à la pomme va en outre devoir rendre des comptes sur la manière dont elle permet ou non “aux utilisateurs d’avoir plus de moyens pour personnaliser leurs appareils en désinstallant des logiciels, en modifiant les paramètres par défaut [d’Apple] ou en utilisant des écrans de choix pour inviter les utilisateurs à choisir un navigateur ou un moteur de recherche pour leur téléphone” [Politico].
Autre entreprise dans le viseur de la Commission : Meta. Son service payant proposé à ceux qui, sur Instagram ou Facebook, “veulent échapper à la publicité ciblée” pour éviter de livrer leurs données personnelles “contreviendrait aux règles du DMA”, indique Le Monde. Pour Bruxelles, ce choix “n’offre pas de véritable alternative”, rapporte Libération.
Enfin, des “éclaircissements” ont été demandés à Apple sur la possibilité de télécharger des “applications sur des boutiques alternatives à son App Store” [Libération], ainsi qu’à Amazon à propos des “pratiques de classement […] sur son marché en ligne”, en vue de s’assurer que l’entreprise ne favorise pas ses propres produits [Euronews].
“Flexibilité et réactivité”
Les sociétés ciblées n’ont pas tardé à réagir. Le porte-parole de Meta Matt Pollard a par exemple déclaré que son entreprise “continuerait à s’engager de manière constructive avec la Commission” [Euronews]. “Nous continuerons à défendre notre approche dans les mois à venir”, a de son côté affirmé le responsable de la concurrence de Google, Olivier Bethell [CNN]. Tandis que chez Apple, on se déclare “convaincu” d’avoir “fait preuve de flexibilité et de réactivité vis-à-vis de la Commission européenne et des développeurs, en écoutant et en intégrant leurs commentaires” [Politico].
La Computer & Communications Industry Association (CCIA), qui représente les industries de la tech, a quant à elle dénoncé la “précipitation” de Bruxelles, ajoutant que le lancement de ces enquêtes “[risquait] de confirmer les craintes de l’industrie que le processus soit politisé” [Le Nouvel Obs].
La décision européenne intervient deux semaines après l’expiration du délai de mise en œuvre du DMA, le 7 mars. Ce règlement vise une meilleure concurrence entre les acteurs du numérique et renforce les pouvoirs de contrôle et de sanction de la Commission européenne.
Celle-ci a en effet déjà condamné Google à plusieurs reprises dans le cadre de la politique européenne de la concurrence. En 2017 notamment, la société avait écopé d’une “amende de 2,4 milliards d’euros” pour avoir favorisé ses propres services, rappelle Le Nouvel Obs. Plus récemment, Apple s’est vu “infliger début mars une amende de 1,8 milliard d’euros […] au terme d’une enquête ouverte en juin 2020 après une plainte de la plateforme de streaming musical Spotify”, note Libération.
Le DMA, lui, “prévoit des amendes pouvant aller jusqu’à 20 % du chiffre d’affaires mondial en cas d’infraction grave et répétée”, contre 10 % jusqu’alors, rappelle France info. “Bruxelles s’est également doté d’un pouvoir de démantèlement des contrevenants, une arme de dissuasion et de dernier recours”. Enfin, le règlement doit permettre à la Commission d’aller plus vite. Les procédures engagées hier seront ainsi conclues “dans un délai maximum de 12 mois”, espère-t-elle.
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