Mardi 6 février, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, “a définitivement retiré la proposition de réglementation sur l’usage durable des pesticides (SUR)” [Le Figaro].
“Élément central” de la stratégie “de la ferme à la table”, la déclinaison agricole du Pacte vert, le projet de loi était “bloqué par les eurodéputés et fustigé dans les récentes manifestations agricoles”, résume BFM TV. Il visait notamment “à réduire de moitié l’usage des pesticides dans l’UE”, précise la chaîne. Avec pour cible initiale 2030. Il prônait également “une interdiction de l’utilisation de pesticides dans des zones telles que les parcs et jardins publics, les écoles et les terrains de sport”, complète la BBC.
Face aux critiques, Ursula von der Leyen a renoncé à cette proposition législative : “elle a été rejetée par le Parlement [européen], il n’y a plus de progrès non plus au Conseil (les États membres). C’est pourquoi je proposerai au collège (des commissaires) de retirer cette proposition”, a-t-elle déclaré devant les eurodéputés [Le Télégramme].
Une proposition qui divisait
Le projet, “mis sur la table par l’exécutif européen en juin 2022″, était passé entre les mains “des négociateurs des Etats membres de l’Union européenne (UE) et du Parlement européen”, rappelle La Croix.
Or, les eurodéputés avaient rejeté “la proposition fin novembre [2023], après des amendements d’élus PPE (droite) la vidant largement de sa substance”, note Le Télégramme. Ce rejet a contribué à enterrer la proposition “à quelques mois des élections européennes de juin 2024 alors que le Pacte vert de l’UE fait figure d’épouvantail”, poursuit le quotidien. Sur ce dossier chaud, “les agriculteurs, les entreprises agroalimentaires et agrochimiques […] avaient obtenu le soutien du PPE”, souligne le quotidien allemand Handelsblatt.
Au niveau des Etats, “les négociations entre les Vingt-Sept [étaient] durablement enlisées, plusieurs Etats s’alarmant de l’impact sur les rendements et la production”, indique Europe 1. En raison des protestations grandissantes des agriculteurs, l’UE est “confrontée à des demandes croissantes de la part des Etats membres pour changer son approche” des questions environnementales [BBC]. Peu avant la décision d’Ursula von der Leyen, “en France, le premier ministre Gabriel Attal [avait] annoncé [jeudi 1er février] la ‘mise sur pause’ du plan Écophyto, qui ouvrait la voie à une réduction progressive des pesticides dans l’Hexagone”, remarque La Croix.
Décision clivante
A l’annonce de cette décision, “le lobby des agriculteurs européens COPA-COGECA a salué les remarques [d’Ursula] von der Leyen”, rapporte Reuters. Sa présidente, Christiane Lambert s’en est félicitée : “la Commission européenne reconnaît enfin que son approche n’était pas la bonne et renforce ainsi la crédibilité et l’importance du dialogue stratégique actuel”, a-t-elle écrit sur X [Reuters].
Tout le monde n’est pas de cet avis. Christian Giraudet, apiculteur syndicaliste a par exemple dénoncé à France Bleu une décision “désastreuse” : “je suis désolé pour l’apiculture, pour les insectes, et vraisemblablement aussi pour la santé humaine”. Il rappelle que “les cheptels d’abeilles s’effondrent sans arrêt : tous les ans, ils diminuent de 20 à 30 %”, établissant un lien avec l’utilisation intensive des pesticides.
Même son de cloche chez l’eurodéputé Pascal Canfin (Renew, libéraux), président de la commission Environnement du Parlement européen, qui a déploré “une erreur, une occasion manquée”, cite Le Devoir. “Nous étions sur le point de retravailler ce texte en profondeur”, a-t-il regretté [Le Devoir]. De son côté, l’eurodéputée “Marie Toussaint, tête de liste des Écologistes pour les élections européennes de juin”, a décrit l’abandon de ce texte comme “une honte”, rapporte La Croix.
“Un symbole de polarisation”
Lors de l’annonce du retrait de la proposition, Ursula von der Leyen a souligné qu’elle était “devenue un symbole de polarisation”, cite Le Télégramme. Elle “a encore une fois assuré, mardi, prendre conscience du malaise agricole : face aux effets du changement climatique et de la guerre en Ukraine, ‘nombre d’agriculteurs se sentent acculés […] Ils méritent d’être écoutés’ ” [Le Monde]. La cheffe de l’exécutif européen souhaite “aller au-delà d’un débat polarisé, instaurer la confiance” [Europe 1]. “Nous devons éviter de nous rejeter mutuellement la faute, et chercher ensemble des solutions aux problèmes”, a-t-elle affirmé, relate Europe 1.
Concernant les pesticides, la présidente de la Commission a toutefois maintenu que “le sujet [restait] d’actualité”, fait savoir Le Télégramme. Selon Ursula von der Leyen, “la Commission pourrait faire une nouvelle proposition beaucoup plus mûre, avec la participation des parties prenantes”. “Sans avancer de date” pour l’instant, remarque Le Télégramme. Un nouveau texte législatif ne serait “envisageable qu’après les élections européennes”, estime Handelsblatt.
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