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  • Synthèse

L’emploi et le social dans l’Union européenne

Omniprésentes dans les débats publics nationaux, les questions sociales et d’emploi sont également une composante importante de la politique européenne. Afin de mettre en œuvre une véritable Europe sociale, des efforts sont actuellement entrepris pour favoriser l’harmonisation sociale et l’emploi.

Le vice-président exécutif de la Commission européenne en charge de l'économie, Valdis Dombrovskis, présente une proposition de directive visant à favoriser des salaires minimums adéquats dans les Etats membres de l'Union européenne, le 28 octobre 2020 - Crédits : Lukasz Kobus / Commission européenne
Le vice-président exécutif de la Commission européenne en charge de l’économie, Valdis Dombrovskis, présente une proposition de directive visant à favoriser des salaires minimums adéquats dans les Etats membres de l’Union européenne, le 28 octobre 2020 - Crédits : Lukasz Kobus / Commission européenne

L’Europe dans le monde

Par rapport au reste du monde, y compris au sein du groupe des pays les plus avancés sur le plan économique, l’Europe est une exception dans le domaine social et celui de l’emploi.

Les droits sociaux, lesquels comprennent le droit du travail, y sont généralement plus importants que partout ailleurs. Le droit à un congé maladie, par exemple, est souvent très développé sur le Vieux Continent, alors qu’il est à l’inverse quasi-inexistant aux Etats-Unis. D’importantes disparités existent néanmoins entre Etats européens en termes de protection sociale, avec certains pays plus protecteurs que d’autres, à l’instar du Danemark ou de la France.

En revanche, les taux de chômage en Europe sont souvent plus élevés que ceux des autres pays occidentaux. En moyenne au sein de l’Union européenne, 6,2 % des actifs étaient sans emploi en janvier 2020 et 7,4 % dans la zone euro, alors que le taux de chômage se situait à 3,6 % aux Etats-Unis à la même période et à 2,4 % au Japon (chiffres : Eurostat, janvier 2020). La crise sanitaire et économique liée au Covid-19 est cependant venue rebattre les cartes, avec un taux de 7,9 % aux Etats-Unis en septembre 2020, comparable à celui de la zone euro, à 8,3 %.

La situation en Europe

En matière d’emploi et de droits sociaux, l’Europe se situe donc globalement à l’avant-garde dans le monde, mais connaît de fortes disparités d’un Etat membre à l’autre. Ces dernières s’expliquent principalement par le fait que les institutions européennes ne disposent pas de compétences étendues dans ces domaines et que les situations économiques varient fortement suivant les pays.

Le taux de chômage moyen de l’UE s’élevait à 6,2 % en janvier 2020, avant la pandémie de Covid-19. En constante diminution depuis 2013, il variait de 2 % en République tchèque à 16,4 % en Grèce. 13 pays pouvaient donc se targuer d’avoir atteint une situation de plein emploi (un taux de chômage inférieur à 5 %), à l’instar de l’Allemagne, de la Hongrie, de Malte, des Pays-Bas et de la Pologne. Tandis que d’autres demeuraient confrontés au chômage de masse, vestige de la crise économique de 2008, telles que la Grèce et l’Espagne, connaissant toutes deux un taux de chômage supérieur à 10 % (13,8 % pour l’Espagne en janvier 2020). La situation était identique s’agissant du chômage chez les moins de 25 ans. La moyenne européenne s’élevait alors à 14,2 % et les chiffres varient de 5,7 % en Allemagne à 33,6 % en Grèce. Au total, dans 12 Etats membres sur 27, le taux de chômage des jeunes dépassait le seuil des 15 %.

Encore une fois, la pandémie de Covid-19 et la crise économique qui s’en est suivie ont fortement changé la donne. Après une constante diminution pendant plusieurs années, le chômage est reparti à la hausse, établissant la moyenne de l’Union européenne à 7,5 % en septembre 2020. Même constat pour la zone euro, avec un taux à 8,3 % contre 7,4 % en janvier. La quasi-totalité des Etats membres sont touchés par une augmentation de leur taux de chômage entre janvier et septembre, à l’exception notable de la France (de 8,1 % à 7,9 %). Mais cette situation particulière pourrait masquer une croissance du nombre de personnes ayant renoncé à chercher un emploi, et n’étant donc plus comptées parmi les chômeurs.

Au-delà des chiffres du chômage, d’autres indicateurs témoignent des disparités européennes sur les questions sociales. Parmi ceux-ci, l’existence et le montant du salaire minimum. 21 Etats membres sur 27 en prévoient un, tandis que son montant varie considérablement en fonction notamment du niveau de vie : en brut il est d’environ 2 150 euros au Luxembourg et de 1 550 euros en France, contre environ 300 euros en Bulgarie.

Politique

Les politiques sociales et d’emploi n’ont acquis leur dimension européenne qu’assez tardivement, à partir des années 1980. Avant cela, ces questions relevaient exclusivement de la sphère nationale.

A partir de 1985 et de l’arrivée de Jacques Delors à la tête de la Commission européenne, l’UE lance le “dialogue social européen” . Pour la première fois, les syndicats de salariés et le patronat européens se rencontrent. En 1989, la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux est adoptée, permettant la mise en œuvre d’accords-cadres contraignants, comme sur le congé parental, le travail à temps partiel ou encore les contrats à durée déterminée.

La lutte contre le chômage devient également un sujet de préoccupation majeur pour l’Union européenne. En 1993 est créé le réseau EURES, qui permet d’échanger les offres et demandes d’emplois au niveau européen et qui favorise la mobilité des travailleurs. Puis, en réaction à la crise économique et financière de 2008, est lancée la Garantie européenne pour la jeunesse, dont l’objectif est de garantir à tous les moins de 25 ans un emploi, un stage ou une formation dans les quatre mois suivant la fin de leurs études ou de leur dernière expérience professionnelle.

Enfin, les droits sociaux figurent parmi les priorités de la Commission européenne présidée par Jean-Claude Juncker (2014-2019). C’est également le cas pour la présidente actuelle Ursula von der Leyen.

En 2017, est ainsi adopté le socle européen des droits sociaux. Ce texte reconnaît la nécessité de rééquilibrer les considérations économiques et budgétaires avec les enjeux sociaux.

En 2018, l’épineuse révision de la directive sur les travailleurs détachés a également abouti, après deux ans de négociations. Est consacré le principe “à travail égal, rémunération égale sur un même lieu de travail” . Les conventions collectives du pays d’accueil sont désormais appliquées, tandis que le détachement est limité à 12 mois. A cette révision de la directive s’ajoute la création de l’Autorité européenne du travail, dont les activités commencent en octobre 2019.

La révision de la directive sur les travailleurs détachés et la création de l’AET s’inscrivent dans la lutte contre le dumping social permis dans l’UE par des écarts de développement encore importants entre les Etats membres. Ce sujet brûlant est source de ressentiment et de défiance de la part des citoyens vis-à-vis du projet européen. En effet, si la révision de la directive sur le détachement des travailleurs a été menée à bien en 2018, elle est jugée insuffisante par de nombreuses formations politiques, notamment en France. La plupart d’entre elles insistent sur la nécessité d’inclure également le paiement, par les entreprises, des charges sociales du pays d’accueil et non de provenance des travailleurs.

Enjeux et perspectives

Plus généralement, les institutions européennes cherchent à remédier à ce qui est vu comme une absence d’Europe sociale. Mais si ceci leur est régulièrement reproché, elles pâtissent paradoxalement d’un manque de compétences formelles en la matière.

En octobre 2020, la Commission européenne a proposé une base commune pour le salaire minimum en Europe, conformément à l’engagement pris par Ursula von der Leyen en juillet 2019 devant les eurodéputés, avant même le début de son mandat. La présence du salaire minimum et la fixation de son montant dépendent de la compétence des Etats membres. C’est pourquoi l’ambition du texte est limitée à une convergence en la matière. La proposition de directive entend notamment garantir des salaires minimums “adéquats” (en comparaison avec le coût de la vie) dans les pays qui en prévoient un, à renforcer le rôle des partenaires sociaux dans la fixation de leurs montants et à suivre le niveau de protection des salariés, par le biais de rapports annuels présentés par les Etats membres à la Commission.

Une proposition timide, en comparaison avec celles formulées par les candidats aux élections européennes en mai 2019. Mais il convient de rappeler, encore une fois, à cet égard que les Etats membres gardent la main sur la fixation éventuelle d’un salaire minimum et demeurent particulièrement attachés à cette compétence. Le socle européen des droits sociaux qui a déjà inspiré plusieurs directives européennes devrait ainsi déboucher sur un nouveau plan d’action en matière sociale au printemps 2021.

Par ailleurs, la crise liée à la pandémie de Covid-19 et ses conséquences économiques désastreuses ont placé la question sociale au cœur des priorités de la Commission. Une question notamment traitée avec l’accord en juillet 2020 au Conseil européen des chefs d’Etat et de gouvernement sur un plan de relance européen, baptisé Next Generation EU, lequel prévoit le versement de 750 milliards d’euros aux Etats membres sous forme de transferts et de prêts. Si cet accord doit encore être approuvé par les eurodéputés, il implique que les plans de relance nationaux que Next Generation EU financera favorisent, outre l’enjeu environnemental, la résilience économique et sociale.

Article initial rédigé par Jules Lastennet

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