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Comment sont choisis les présidents des institutions européennes ?

Après avoir élu son nouveau président au début du mois, le Parlement européen a validé le choix d’Ursula von der Leyen à la Commission européenne le 16 juillet 2019. De nouvelles têtes s’apprêtent aussi à prendre leurs fonctions à la Banque centrale européenne et au Conseil européen. Mais qui préside à ces choix ?

Charles Michel, Ursula von der Leyen, David Sassoli, Koen Lenaerts, Josep Borrell et Christine Lagarde
De gauche à droite : Charles Michel, Ursula von der Leyen, David Sassoli, Koen Lenaerts, Josep Borrell et Christine Lagarde - Crédits : Jim Matis / Tomaz Silva / Wikimédia Commons

Tandis que les eurodéputés tentent de gagner de l’influence, les gouvernements des Etats membres restent les principaux maîtres de ce jeu, avec d’intenses négociations en sous-main.

Au Parlement européen, une élection interne

Le président du Parlement européen, chargé de veiller au respect des procédures, superviser le travail des commissions et représenter l’institution à l’extérieur, est élu par les eurodéputés (article 14 du traité sur l’Union européenne) à chaque début de législature, ainsi qu’à la moitié de leur mandat. Soit une fois tous les deux ans et demi.

David Sassoli (S&D, Italie) a ainsi succédé le 3 juillet 2019 à Antonio Tajani (PPE, Italie), et sera remplacé en janvier 2022, sûrement par un élu du PPE.

Pour se présenter, les candidats doivent réunir le soutien d’un groupe parlementaire ou au minimum de 38 eurodéputés. Ils sont départagés par le vote des parlementaires, jusqu’à ce que l’un d’entre eux obtienne la majorité absolue. Au quatrième et dernier tour possible, le choix est restreint aux deux candidats arrivés en tête au troisième tour.

En l’occurrence, deux tours ont suffi pour départager les 4 candidats et élire David Sassoli.

Depuis l’instauration du suffrage universel au Parlement européen en 1979, socialistes (S&D) et chrétiens-démocrates (PPE) se sont ainsi succédé de façon quasi systématique au perchoir de l’assemblée. Des accords de “grande coalition” ont régulièrement été scellés en début de mandat, pour que ce poste revienne tour à tour aux candidats de ces deux grands partis.

Malgré le recul des partis traditionnels en 2019, et la perte de majorité des groupes PPE et S&D, ce dernier a bien obtenu la présidence de l’hémicycle.

A la Commission, guerre d’influence entre les chefs d’Etat et le Parlement

Le président de la Commission européenne occupe un poste clé de l’UE, qui consiste à proposer les “lois” européennes et à diriger les travaux de mise en œuvre des politiques de l’UE (fonction exécutive). Il participe également aux réunions du Conseil européen et du G7.

D’après les règles consacrées par le traité de Lisbonne entré en vigueur le 1er décembre 2009, le président de la Commission européenne est “élu” tous les cinq ans par le Parlement européen, sur proposition du Conseil européen.

En principe, ce sont donc les chefs d’Etat et de gouvernement qui sélectionnent un candidat à la majorité qualifiée renforcée (72% des Etats membres représentant 65% de la population), avec la seule obligation de “tenir compte” du résultat des dernières élections européennes, selon l’article 17 du traité sur l’Union européenne.

Lors du sommet du 30 juin 2019, les chefs d’Etat et de gouvernement ont désigné l’Allemande Ursula von der Leyen (PPE) comme prétendante au poste. Elle a été approuvée par le nouveau Parlement européen le 16 juillet 2019.

A l’issue du renouvellement du Parlement en 2014, une autre lecture de cette disposition avait permis aux eurodéputés d’imposer à ce poste le chef de file du groupe parlementaire européen sorti “vainqueur” des urnes (ou capable, même sans être arrivé premier, d’obtenir le vote d’une majorité de députés européens), selon la procédure dite du “Spitzenkandidat” (“tête de liste”). Face au social-démocrate allemand Martin Schulz (S&D), Jean-Claude Juncker, qui avait mené la campagne des européennes pour le Parti populaire européen (PPE), est devenu le président de la Commission en 2014.

En récompensant le chef de file du parti européen sorti vainqueur du scrutin, les chefs d’Etat et de gouvernement avaient enfin respecté à la lettre le vote des électeurs, selon les eurodéputés. En 2019, les groupes parlementaires avaient donc à nouveau désigné leurs Spitzenkandidaten en amont des élections européennes : Manfred Weber au PPE, Frans Timmermans au S&D, ou encore Margrethe Vestager à l’ADLE. Mais la donne a changé…

Cette fois, les chefs d’Etat et de gouvernement n’ont pas cédé la main sur ce poste stratégique de l’UE. Le 23 février 2018 notamment, à l’issue d’un sommet des 28 dirigeants européens, le président du Conseil européen Donald Tusk déclare ainsi que ceux-ci “ne pouvai[en]t garantir à l’avance qu’il[s] proposerai[en]t l’une des têtes de liste au poste de président de la Commission européenne” et que ce mécanisme des Spitzenkandidaten ne présentait “aucun caractère automatique” . Une décision rappelée à de nombreuses reprises par les dirigeants eux-mêmes, notamment français et allemand.

Les dirigeants du Conseil européen conservent par ailleurs le pouvoir de désignation des autres commissaires européens à la majorité qualifiée renforcée, et notamment du haut représentant de l’Union pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité (le socialiste espagnol Josep Borrell est actuellement proposé par les Vingt-Huit à ce poste). Mais leur liste devra de nouveau être soumise au vote d’approbation du Parlement européen.

La nomination des commissaires européens

Le nouveau collège de commissaires européens entrera en fonctions à l’automne 2019. Ces derniers sont nommés pour un mandat de 5 ans. Chaque Etat membre présente d’abord son candidat. Le président de la Commission répartit ensuite les différents portefeuilles (Concurrence, Affaires étrangères, Economie, Energie, Transports, etc.).

La nouvelle équipe doit alors être approuvée par le Conseil européen à la majorité qualifiée renforcée. Puis par le Parlement européen, après l’audition - parfois très minutieuse - de chaque candidat par les commissions compétentes. Les eurodéputés peuvent ainsi menacer de ne pas adouber le nouveau collège si tel ou tel candidat n’est pas écarté. De fait, en 2014, la Slovène Alenka Bratusek avait été retoquée et remplacée.

Au Conseil européen, une nomination entre pairs

Le nouveau président du Conseil européen entrera, pour sa part, en fonction le 1er décembre 2019. Au cours du Conseil européen du 30 juin, Charles Michel a été choisi par les chefs d’Etat et de gouvernement à la majorité qualifiée. Chargé de piloter les travaux et d’encourager le consensus entre les dirigeants, le Belge libéral succédera à Donald Tusk, ce dernier ayant déjà effectué deux mandats à la suite d’Herman Van Rompuy, qu’il avait remplacé le 1er décembre 2014.

Depuis l’inscription de ce poste dans le traité de Lisbonne en 2007 (article 15 du traité sur l’Union européenne), le président du Conseil européen est élu pour un mandat de deux ans et demi, renouvelable une fois, au cours duquel il ne peut pas exercer de mandat national.

Selon la pratique, “lorsque le Conseil européen débat de l’élection de son président, cette partie de la réunion est présidée par le chef d’État ou de gouvernement de l’État membre exerçant la présidence tournante de l’UE” , précise le site internet de l’institution.

Au Conseil de l’UE, une présidence tournante

En dehors du domaine des Affaires étrangères, le Conseil de l’UE - qui réunit les ministres des Etats membres par domaine de compétence - est présidé par le représentant du pays qui exerce la présidence tournante de l’Union européenne.

Les Etats membres se succèdent en effet à cette responsabilité tous les six mois, selon un ordre établi par le Conseil lui-même, à l’unanimité. Depuis le 1er juillet 2019, la Finlande assure cette responsabilité. En 2020 viendront la Croatie puis l’Allemagne.

De son côté, le Conseil des Affaires étrangères est présidé par le haut représentant de l’Union pour les Affaires étrangères. Ce dernier est un membre du collège des commissaires européens.

LIRE AUSSI : La présidence tournante du Conseil de l’Union européenne

A la BCE, une décision de l’Eurogroupe

Mario Draghi quittera la présidence de la Banque centrale européenne (BCE) qu’il occupait à la suite de Jean-Claude Trichet depuis 2011. Il devrait être remplacé par la Française Christine Lagarde pour un mandat de 8 ans non renouvelable.

Les ministres des Finances de la zone euro, qui siègent à l’Eurogroupe, nomment le président de la BCE à la majorité qualifiée, sur proposition du Conseil des ministres des Finances de l’UE. Ce dernier préside le conseil des gouverneurs (principale instance de décision) et le directoire de la BCE (gestion quotidienne) ; il représente également l’institution lors des réunions européennes et internationales.

Et dans les cours…

A la Cour de justice de l’Union européenne, les 28 juges de la Cour de Justice (un par Etat membre) sont nommés pour un mandat renouvelable de six ans, d’un commun accord par les gouvernements des Etats membres après consultation d’un comité spécialisé. Ces juges désignent parmi eux le président de la Cour (Koen Lenaerts, jusqu’en 2021), qui dirige les travaux de l’institution et préside les audiences pour une période renouvelable de trois ans.

Le principe est le même à la Cour des comptes européennes : elle est composée de 28 membres nommés pour un mandat renouvelable de six ans par le Conseil, après consultation du Parlement européen. Ces membres désignent parmi eux le président de la Cour pour un mandat renouvelable de trois ans.

Un nouveau président de la Cour des comptes européenne prendra ses fonctions le 1er octobre, pour un mandat de trois ans. A moins que l’Allemand Klaus-Heiner Lehne, désigné en 2016 par les 28 membres de cette institution, ne soit renouvelé.

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