Le 5 octobre 2009, Catherine Geslain-Lanéelle, Directrice exécutive de l’EFSA (Autorité Européenne de Sécurité des Aliments), s’est rendue à la commission Environnement du Parlement européen pour se prêter au jeu des questions/ réponses.
Cette audition a été l’occasion de creuser la grande variété de sujets que traite l’Autorité Européenne de Sécurité des Aliments, des nanotechnologies aux méthodes d’évaluation des OGM par ces fameuses allégations nutritionnelles et de santé.
Un processus d’homologation obligatoire
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Les allégations nutritionnelles sont les informations sur les caractéristiques d’une denrée alimentaire : tous les “Fort en calcium” , “Allégé en sucre“qui constituent des arguments de vente à succès. Ces allégations sont soumises à un règlement européen depuis 2006, dont l’application est scrupuleusement suivie par l’EFSA.
Dans un premier temps, les sociétés agroalimentaires doivent faire parvenir leurs dossiers aux Etats membres qui transmettent à la Commission, qui est chargée d’opérer un premier tri avant de finalement soumettre les requêtes à l’évaluation scientifique de l’EFSA.
A l’occasion de cette ultime étape, non seulement l’EFSA doit autoriser les allégations pour être insérées dans une liste harmonisée pour toute l’Union européenne (UE), mais l’autorité européenne veille ensuite au respect des conditions listées jusqu’à leur étiquetage, soumis lui aussi à des règles strictes.
Un contrôle très long et sévère
De 44 000 dossiers reçus par la Commission européenne, celle-ci n’en a finalement fait suivre que 4 185 à l’EFSA. De nombreuses demandes nationales avaient le même objet. En effet, la mention de boisson énergisante sur une canette aura le même effet sur un Britannique, un Chypriote ou un Hongrois.
Les allégations sur les produits sont sensiblement identiques sur les produits partout en Europe. Ce sont les mêmes arguments de vente qui portent, d’où le travail gargantuesque de la Commission consistant à réunir les requêtes similaires, afin de faciliter et accélérer les évaluations scientifiques.
De nombreux grands groupes se sont vus refusés leurs dossiers. Les sociétés qui proposent du thé qui facilite la concentration, ou du chocolat qui fait grandir ont vu leurs dossiers déboutés. L’eau qui fait maigrir s’est fait prendre au piège également et doit être retirée du marché d’ici fin décembre 2009, car ses allégations santé ont été jugées infondées !
Le sujet a été ravivé lors de l’audition de la dirigeante de l’EFSA, car récemment, l’Autorité Européenne de Sécurité des Aliments a jugé scientifiquement incorrectes des allégations de sociétés de yaourts probiotiques* et de boissons énergisantes très connues.
Bonne nouvelle, les actes des industriels agro-alimentaires sont désormais pistés et régulés. Ils ne peuvent définitivement plus librement inscrire des allégations mensongères sur leurs emballages, et les réformes annoncées iront dans le sens d’une surveillance toujours plus accrue**.
Le rôle des agro-alimentaires et des consommateurs
Il faut cependant être vigilant à quelques travers. Il ne sera pas facile d’exclure les sociétés agro-alimentaires du créneau “santé” qui marche si fort. Comme l’a rappelé Mme Geslain-Lanéelle, directrice de l’EFSA, lors de son audition devant le Parlement, l’autorité ne demande que le retrait des allégations de l’emballage et non pas le retrait des produits du marché. Ces produits ne sont en aucun cas dangereux, ils n’ont simplement pas les caractéristiques particulières dont ils font leur argument de vente principal. Nuance !
Si ces sociétés n’inscriront plus les allégations nutritionnelles ou de santé sur leurs emballages, elles n’abandonneront pas pour autant ce secteur de vente. Dans le meilleur, et espérons la plupart des cas, elles se mettront à jour ou elles opteront pour des moyens détournés comme les campagnes publicitaires ou des partenariats avec des instituts de recherche afin de donner une caution scientifique à leurs produits.
La boucle est bouclée, et on en revient à l’attention que les consommateurs eux-mêmes doivent porter à une meilleure consommation. Le rapport entre consommateurs et sociétés agro-alimentaires doit être réglementé, d’autant plus qu’en matière d’allégations nutritionnelles ou de santé, les personnes ciblées sont particulièrement sensibles (personnes âgées, personnes malades).
Mais l’œil critique et vigilant du consommateur actif restera toujours indispensable à toutes les réglementations imaginables en la matière.
En savoir plus :
Communiqué de presse de l’EFSA
*les probiotiques sont des micro-organismes vivants, comme les bactéries lactiques, qui peuvent améliorer l’équilibre de la flore intestinale, donc influencer positivement la santé.
**depuis janvier 2008, une proposition de règlement de la Commission concernant l’Information des consommateurs sur les denrées alimentaires est actuellement en discussion pour sévir sur les critères d’attribution des allégations nutritionnelles, ou d”étiquetage nutritionnel (indication de la valeur nutritionnelle des aliments)