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Joschka Fischer veut fédérer la relance européenne

Les égoïsmes nationaux qui entachent la gestion de la crise économique nuisent à l’Europe : tel est le message adressé par le groupe Spinelli lors d’une réunion au Parlement européen le 12 janvier, intitulée “les Etats-Unis d’Europe : vers une société transnationale”. Joschka Fischer et ses partenaires veulent ainsi relancer l’idée fédérale au sein d’une Europe en perte de repères.Â

Plus d’intégration économique

Lors d’une importante réunion mercredi 12 janvier au Parlement européen, les membres du groupe Spinelli, un nouveau réseau fédéraliste, ont appelé à une accélération de l’intégration européenne. Ceux-ci souhaitent faire prendre conscience aux pouvoirs décisionnels qu’une meilleure intégration politique des Etats membres doit être entreprise le plus rapidement possible pour sortir rapidement et efficacement de la crise dans laquelle l’Europe est plongée depuis maintenant plus de deux ans.

Le Groupe Spinelli :

Son objectif est celui d’une Europe fédérale et post-nationale, une Europe des citoyens. C’était selon eux le rêve que les pères fondateurs s’attachèrent à réaliser, en particulier le projet d’Altiero Spinelli. Il est entre autres porté par quatre eurodéputés : Guy Verhofstadt (Président ALDE), Daniel Cohn-Bendit (Président des Verts/ALE), Sylvie Goulard (ALDE) et Isabelle Durant (Vice-Présidente du Parlement européen). Jacques Delors (ancien Président de la Commission ) et Pat Cox (ancien Président du Parlement) y apportent également leur soutien.

Si les ténors du groupe Spinelli s’accordent pour dire que l’Europe se trouve dans une mauvaise passe, ils critiquent également la gestion de la crise par le couple franco-allemand, qui derrière une unité affichée ne parvient pas à penser en termes d’intérêt européen. Tandis que “malgré les baisers, la France et l’Allemagne se trouvent dans une période difficile” pour Joschka Fischer, Daniel Cohn-Bendit s’alarme sur la situation actuelle : “dire que l’Europe va dans la mauvaise direction est un euphémisme” .

L’intérêt général mis à l’épreuve

La conférence intitulée “Les Etats-Unis d’Europe : vers une société transnationale” avait pour but de réactiver le sentiment fédéraliste en cette période de “souverainisme économique” . A titre d’exemple, le rejet par la France et l’Allemagne d’un éventuel renforcement du fonds de stabilité européen (en prévision d’une éventuelle défaillance des économies portugaises et espagnoles) leur paraît symptomatique de ce manque d’esprit européen qui fait tant défaut à la gouvernance européenne.

José Manuel Barroso, qui assistait à la réunion, a abondé dans leur sens : “ce ne sont pas seulement les fédéralistes qui plaident pour une meilleure intégration, ce sont aussi les marchés. Ils envoient des messages clairs chaque jour. Il ne s’agit donc pas d’une utopie, c’est une question de réalisme” a-t-il déclaré aux journalistes.

Vers une “union sacrée” ?

Les spécialistes de l’Union européenne sont également prompts à signaler que les crises précédentes ont fréquemment joué le rôle d’impulsion pour créer une rapide intégration européenne. Le philosophe Jean-Marc Ferry, qui a co-animé le débat, allait également dans ce sens : autant utiliser la crise pour revenir aux fondamentaux des Pères de l’Europe et serrer les rangs.

C’est bien ce qui manque à l’Europe actuellement. Le président d’Europe Ecologie Daniel Cohn-Bendit, co-président du groupe Verts/ALE au Parlement européen, s’amuse en effet de l’inquiétude des Etats membres face à leur transfert de souveraineté à l’Europe, alors que cette souveraineté nationale est surtout menacée par l’essor des pays émergents. En effet, on assiste depuis la crise grecque au rachat de la dette européenne par la Chine et le Japon.

L’Europe apparaît donc plutôt comme un paravent efficace dans la concurrence internationale acharnée.

Quel type de gouvernance pour l’Union européenne ?

Mais le point le plus pertinent abordé lors de cette réunion concerne la façon dont la gouvernance peut être menée. La soi-disant perte de souveraineté nationale met effectivement en lumière l’opposition entre deux méthodes de gouvernance européenne : fédérale (ou communautaire) et intergouvernementale.

Ces deux manières de gouverner l’Europe ont pu, avant l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, reposer sur la distinction entre les 3 piliers de l’UE, la méthode “communautaire” désignant le mode de fonctionnement institutionnel du premier pilier, et reposant sur une logique d’intégration, mais toujours dans le respect du principe de subsidiarité. Cette dernière se caractérise notamment par le monopole du droit d’initiative de la Commission, le recours général au vote à la majorité qualifiée au Conseil, le rôle actif du Parlement européen souvent co-législateur avec le Conseil. En matière de justice, la Cour de justice doit assurer l’uniformité d’interprétation du droit communautaire.

La fusion des piliers

Le traité de Lisbonne a étendu la méthode communautaire, rebaptisée “procédure législative ordinaire” à de nombreux aspects du domaine de la justice et des affaires intérieures, nommé dorénavant “espace de liberté, de sécurité et de justice (LSJ)” , abolissant le troisième pillier de l’Union puisqu’il a fusionné la Communauté européenne avec l’Union européenne.

Les deuxième et troisième piliers , “intergouvernementaux” , obéissaient quant à eux à un partage du droit d’initiative plus en faveur des Etats membres, le Parlement étant quant à lui consulté. Après l’entrée en viguer du traité de Lisbonne, il a été dit que la méthode intergouvernementale a été privilégié avec le renforcement du Conseil, en la personne du Président permanent de l’union européenne, Herman Van Rompuy.

Pour une Europe plus représentative

Attaché à la tradition communautaire, Jochka Fischer plaide pour une plus grande implication du Parlement européen dans le déroulement des organisations, pour que celles-ci imposent davantage de thématiques européennes. “Le Parlement européen a une bonne opportunité : il dispose de plus de compétences et les citoyens doivent sentir qu’il les représente démocratiquement” affirme-t-il dans un entretien consultable sur le site web du Parlement européen.

L’ancien ministre des Affaires étrangères estime également que la crise doit être l’occasion d’un sursaut européen et plaide pour une immédiate Union économique. “L’ Europe doit être forte. Cela ne sera possible que si nous rassemblons nos intérêts. C’est laborieux mais possible si nous exerçons notre souveraineté de façon commune. Le but serait d’arriver aux Etats-Unis d’Europe, une vraie association d’Etats démocratiques qui mettent leur souveraineté en commun. Mais nos identités nationales continueront à exister et les Etats nations continueront, en conséquence, à jouer un rôle fort. Nous nous différencierons beaucoup des autres Etats unis de par le monde” .

Le philosophe Ferry a quant à lui appelé à ce que les parlements nationaux, régionaux, locaux des Etats membres de l’UE soient amenés à constituer des liens plus puissant que ceux d’aujourd’hui pour en faire une véritable “réseau” dans lequel le Parlement européen serait “la clé de voute” . Etant donné que l’argument selon lequel l’Europe est facteur de paix a vécu, il faut une nouvelle “raison d’être” , à savoir une société civile transnationale. Il faut donc garantir une véritable liberté de mouvement (pas seulement celle des capitaux et des hommes d’affaires) ainsi que l’existence de partis politiques européens.

En savoir plus :

Le Groupe Spinelli : une nouvelle aventure fédéraliste au sein du Parlement européen - Le Taurillon

Le groupe Spinelli - Site officiel

Le groupe Spinelli rénove le fédéralisme au Parlement - interview de Sylvie Goulard sur l’origine du groupe Spinelli

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