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Brexit : “Personne n’a intérêt à établir des barrières tarifaires”

Alors que Bruxelles et Londres se sont accordés sur une période de transition post-Brexit, fixant la date définitive du Brexit au 31 décembre 2020, les négociations sur un accord de libre-échange sont toujours en cours. En l’absence d’accord, le Brexit pourrait coûter 65 milliards d’euros par an aux entreprises européennes et britanniques. Catherine Mathieu, économiste à l’Observatoire français des conjonctures économiques, nous en dit plus.

Le coût du Brexit

Avec le Brexit, l’Union européenne perd l’un de ses plus gros contributeurs au budget européen. Comment compenser ce manque à gagner pour l’UE ?

Les 27 peuvent décider d’augmenter leur contribution au budget européen. Actuellement cela concernerait principalement la France et l’Allemagne. Des pays comme la Pologne, qui a depuis plusieurs années une croissance relativement forte, ou des Etats récemment arrivés dans l’UE, pourraient aussi être amenés à contribuer davantage. Mais aucun n’a de franche volonté d’augmenter sa participation au budget européen. C’est d’ailleurs l’objet de grandes discussions au sein de l’UE. D’un autre côté, les pays d’Europe de l’Est ne souhaitent pas non plus voir se réduire les transferts dont ils bénéficient. C’est notamment vrai pour ceux qui ont une agriculture assez importante

Bruxelles a présenté en mars dernier un projet d’accord de libre-échange plus modeste que ce qu’attendent les Britanniques. Le scénario d’une absence d’accord et du retour de barrières tarifaires est-il plausible ?

De mon point de vue, il est très peu probable que de nouvelles barrières tarifaires soient mises en place. Cela aurait un impact négatif pour les entreprises du Royaume-Uni, mais aussi pour celles de l’UE. Qui y aurait intérêt ? Si les pays de l’UE le font, ils pénalisent en principe les entreprises britanniques. Mais les Britanniques feraient très vraisemblablement de même, or le Royaume-Uni est aujourd’hui importateur net en provenance des autres pays de l’UE.

Selon un document publié par la commission du parlement britannique en charge de la sortie de l’UE, le Brexit réduirait dans tous les cas le PIB britannique de 2 à 8 points au cours des 15 prochaines années. Un accord serait donc également coûteux pour le Royaume-Uni ?

Si l’on maintient l’absence de barrières tarifaires, donc que l’on met en place un partenariat, de type accord de libre-échange entre le Royaume-Uni et l’UE, cela aura un impact relativement faible sur l’économie britannique. Il faut aussi préciser si l’on parle uniquement de marchandises ou de marchandises et de services. C’est en l’absence d’accord sur les services, que les effets négatifs sur l’économie britannique seraient les plus importants. .

Les entreprises internationales et britanniques se disent aujourd’hui : “Je ne sais pas quel va être le cadre des relations entre l’UE à 27 et le Royaume-Uni dans deux ans. Est-ce que j’investis aujourd’hui au Royaume-Uni, ou est-ce que je préfère investir dans l’UE ?” . C’est un effet d’incertitude. Mais si un accord de libre-échange est trouvé, la contrainte de l’investissement se lève. Donc on entre dans un cadre où il y a très peu d’impact négatif sur l’économie britannique comme sur l’économie européenne. 

Quelles seraient les conséquences du Brexit sur le chômage au Royaume-Uni ?

S’il n’y a pas d’accord, les échanges économiques entre les deux zones seront ralentis par la mise en place de barrières tarifaires et non tarifaires. Et le Royaume-Uni sera le premier touché car il est plus petit que l’ensemble de l’UE. Aujourd’hui, environ la moitié des exportations britanniques vont vers les pays de l’UE, tandis que du côté européen les exportations vers le Royaume-Uni représentent moins de 10 % du total. Dans l’incertitude, les entreprises pourraient donc décider de réduire leurs investissements au Royaume-Uni et, de ce fait, réduire le nombre d’emplois. A court terme, ce scénario peut avoir un effet important de freinage de l’économie britannique et de remontée du chômage.

La mise en place du Brexit se fait-elle déjà ressentir sur l’économie de l’UE et du Royaume-Uni ?

Il y a eu un effet à court terme et immédiat après le vote de juin 2016 sur l’économie britannique, avec une baisse du taux de change de la livre de 15% par rapport à l’euro. Les prix des produits importés au Royaume-Uni ont augmenté, ce qui a provoqué une poussée de l’inflation et a donc freiné le pouvoir d’achat et la consommation des ménages britanniques.

La baisse des marchés financiers a quant à elle été peu durable. Mais depuis quelques mois, le taux de change de la livre s’est stabilisé par rapport à l’euro et l’inflation britannique a ralenti de 3% à 2,4%. L’effet négatif de la baisse passée de la livre sur l’inflation est en train de disparaître. Désormais, le principal effet du vote du Brexit est l’effet d’incertitude. Les entreprises britanniques attendent, avant d’investir, de savoir quelles seront les conditions de l’accord. L’économie britannique a donc un peu ralenti Mais l’impact du Brexit sur l’économie britannique dépendra avant tout du futur partenariat entre le Royaume-Uni et l’UE.

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