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Anniversaire du traité de l’Elysée : 5 réalisations majeures du couple franco-allemand

Le 22 janvier 1963, le chancelier allemand Konrad Adenauer et le général de Gaulle scellaient la réconciliation franco-allemande en signant le traité de l’Elysée. L’acte marque le démarrage du “moteur franco-allemand” en instituant des rencontres périodiques entre les dirigeants et fonctionnaires des deux pays. Conjointement, il formule des objectifs de coopération dans de nombreux domaines : affaires étrangères, défense, éducation ou encore recherche scientifique. A l’occasion des 55 ans de l’accord, Toute l’Europe revient sur 5 réalisations marquantes du “moteur franco-allemand”.

Airbus A380
Un Airbus A380 à l’aéroport de San Francisco - Crédits : Todd Lappin

L’OFAJ, une organisation pour unir la jeunesse

Première émanation du traité de l’Elysée, l’Office franco-allemand pour la jeunesse (OFAJ) est créé dès juillet 1963 afin de rapprocher jeunes Français et Allemands. Derrière le projet se trouve l’idée que la réconciliation et l’approfondissement de la relation passe aussi par la société civile. L’OFAJ permet ainsi à des jeunes de 3 à 30 ans de participer à des échanges des deux côtés du Rhin dans les domaines scolaire, professionnel ou associatif. Vivre une expérience physique dans l’autre pays devant favoriser la “compréhension mutuelle entre les peuples” .

L’OFAJ n’organise pas lui-même les rencontres, mais apporte un soutien financier et opérationnel aux structures compétentes. Pendant les dix premières années de son existence, l’organisme connaît une activité intense, et permet à près de 300 000 jeunes d’explorer la culture de l’autre pays. Si elle a depuis connu une baisse de son financement, ce sont tout de même 8,2 millions de jeunes qui ont participé aux échanges depuis 1963.

La compréhension mutuelle passe également par la langue. L’OFAJ finance ainsi des programmes et met à disposition des outils pédagogiques pour faciliter l’enseignement et l’apprentissage des deux langues. Malgré ces efforts, l’attrait pour la langue du voisin est en baisse dans chacun des pays : dans le secondaire en 2012, seuls 14,4% des jeunes Français avaient choisi d’apprendre l’allemand. En Allemagne, le chiffre de jeunes apprenant le français se situait autour de 20%.

Airbus, une coopération industrielle pour peser sur la scène mondiale

La coopération franco-allemande en matière industrielle a souvent achoppé sur les intérêts nationaux. Exception majeure : la création d’Airbus, également soutenue par d’autres pays européens.

En 1965, l’Allemagne, la France et le Royaume-Uni lancent des discussions sur la création d’un consortium, avec pour finalité la création d’une entreprise de transport aérien à l’échelle européenne. En 1969, Londres abandonne le projet, tandis que l’Allemagne et la France approfondissent leur coopération. Airbus Industrie est lancé en 1970 sous la forme d’un groupement d’intérêt économique (GIE), financé à 50% par les entreprises françaises d’aéronautique et 50% par les allemandes. Celles-ci sont rejointes en 1971 par l’Espagne, puis de nouveau par le Royaume-Uni en 1979.

En 2000, tous les partenaires à l’exception du Britannique BAE Systems fusionnent pour créer l’European Aeronautic Defence and Space company (EADS), qui détient à 80% Airbus. La période est florissante : entre 2002 et 2011, l’avionneur devance même son concurrent américain Boeing. La relation interne n’est pourtant pas sans heurts : c’est une direction bicéphale franco-allemande qui dirige le groupe. Entre 2000 et 2007, le système de partage du pouvoir est à la source de nombreuses tensions, et est finalement abandonnée en 2007 avec la nomination de Louis Gallois. L’actuel patron du groupe Airbus est l’Allemand Thomas Enders.

La brigade franco-allemande, prémices de l’Europe de la défense

Avant la fin des années 1980, les divergences des dirigeants français et allemand sur la question nucléaire et sur l’OTAN rendaient difficilement concevable la perspective d’une entente dans le domaine stratégique.

En 1987, ne nouvelle impulsion est donnée par Helmut Kohl et François Mitterrand. Bonn et Paris prennent conscience de leurs objectifs communs, et accélèrent la coopération dans le domaine militaire : un Conseil de sécurité franco-allemand est créé, suivi de la brigade franco-allemande en 1989. Composée de bataillons français, allemands et mixtes, elle intervient pour la première fois en Bosnie en 2002-2003 puis en Afghanistan en 2004-2005. La brigade compte dans ses rangs 6 000 hommes et femmes, et sa dernière intervention remonte à 2015, au Mali. L’initiative a surtout contribué à la création de l’Eurocorps en 1992, un corps européen qui devait permettre une plus grande indépendance vis-à-vis de l’OTAN.

Basée sur un fonctionnement unique en Europe, la brigade présente toutefois des limites. En 2015, des parlementaires français regrettaient que les soldats communiquent maintenant en anglais, et non plus en allemand et français comme c’était le cas lors de sa création. Ils relevaient également les disparités matérielles entre Français et Allemands, et la sous-utilisation de la brigade, pourtant un symbole important de la réconciliation.

Brigade franco-allemande

Arte, une télévision pour rapprocher les peuples

Le 30 mai 1992 à 20h, la même image s’affiche simultanément sur les écrans des téléspectateurs français et allemands. C’est celle d’une grande soirée culturelle à l’opéra de Strasbourg, qui marque le lancement de la chaîne franco-allemande Arte. Le projet initié par Helmut Kohl et François Mitterrand est ambitieux : utiliser la télévision et des émissions culturelles pour “favoriser la compréhension et le rapprochement entre les peuples” .

De nombreux obstacles se dressaient pourtant devant la création d’une chaîne binationale. La première est la structure totalement différente de l’audiovisuel dans les deux pays. Alors qu’il est centralisé en France, il est du ressort des Länder en Allemagne. Il faut ainsi l’accord des onze ministres-présidents des régions d’Allemagne de l’Ouest pour signer le traité qui établit les fondements de la chaîne en 1990. Le groupe est fondé un an plus tard, en 1991, établissant le siège à Strasbourg ainsi qu’un pôle propre à chaque pays, à Baden-Baden et Paris.

L’autre difficulté est celle de la programmation, alors que la compétition audiovisuelle dans les deux pays est rude. Comment attirer devant les mêmes programmes deux peuples fondamentalement différents ? Depuis la création de la chaîne, les chiffres d’audience sont en constante augmentation, mais restent modestes. En Allemagne, Arte était crédité de 1% de la part d’audience en 2016. En parallèle du côté français, elle connaissait la plus haute audience de son histoire avec 2,3% des parts.

L’intégration européenne, le cœur de la relation franco-allemande

La construction de l’Union européenne est une raison d’être du tandem franco-allemand, ce qui ne signifie pas pour autant que les deux pays partagent une vision parfaitement identique. Au contraire, c’est souvent au travers de compromis et de négociations parfois musclées entre les deux pays que se sont construites les institutions européennes.

Le partenariat est fragile à ses débuts, et la concordance de vues, sur le plan institutionnel, ne se renforce véritablement qu’en décembre 1974 avec le tandem formé par Valéry Giscard d’Estaing et Helmut Schmidt. Le président français, plutôt partisan d’une Europe des Etats, obtient du chancelier allemand la création du Conseil européen, qui réunit les dirigeants européens. En échange, Paris concède l’élection du Parlement européen au suffrage universel. Quatre ans plus tard, en 1978, les deux dirigeants lancent le Système économique européen (SME), visant à renforcer la stabilité des monnaies européennes. En 1972, alors qu’ils étaient tous deux ministre des Finances, MM. Giscard d’Estaing et Schmidt avaient déjà mis sur pied le Serpent monétaire européen, ancêtre du SME.

Les relations s’approfondissent encore avec le couple François Mitterrand-Helmut Kohl. Sous l’impulsion des deux pays, l’Acte unique européen est signé en 1986, prévoyant un marché unique sans frontières intérieures. En 1990, les deux dirigeants signent également une lettre commune pour accélérer l’intégration européenne. Vingt mois plus tard, en 1992, le traité sur l’Union européenne est signé à Maastricht.

Du traité de Lisbonne à la résolution de la crise grecque, les négociations franco-allemandes ont depuis lors continué à façonner le visage de l’Union européenne. En 2010, Nicolas Sarkozy et Angela Merkel ont réaffirmé leur volonté de travailler main dans la main en adoptant l’agenda 2020, définissant les objectifs de coopérations pour les années à venir. Et les premiers mois de la relation entre Emmanuel Macron et Angela Merkel confirment cette importance historique du moteur franco-allemande pour l’Europe.

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