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Touteleurope.fr / MAEE : Michel Barnier, vous avez déjà été commissaire européen chargé, à l’époque, de la Politique régionale : dans quel état d’esprit abordez-vous votre nouveau mandat ?
Je reviens à la Commission sous l’autorité d’un homme que je respecte, José Manuel Barroso, avec la confiance de mon pays qui m’a désigné, et du président de la République française. Je reviens avec beaucoup de passion, d’enthousiasme, de volontarisme, un peu d’utopie aussi…”
Le traité de Lisbonne change-t-il la manière dont fonctionnera la Commission ?
J’ai d’ailleurs voulu, pour cette raison là, être élu au Parlement européen, être un commissaire politique qui ait peut-être en plus cette légitimité démocratique” .
Le portefeuille « Marché intérieur » a été obtenu par la France après de longues négociations. En quoi ce poste est-il stratégique ?
“Tout d’abord, ce n’est pas la France qui a obtenu ce poste, ce n’est pas la France qui est au Marché intérieur : c’est un Français. Et un Français qui va prêter serment : c’est un moment important et exigeant devant la Cour de justice. Etre commissaire européen, c’est laisser de côté les intérêts nationaux au profit de l’intérêt général européen.
Je vous rappelle que depuis le traité de Rome en 1957, le cœur du projet européen c’est le marché commun, c’est-à-dire notre vie économique et sociale commune. Comme je l’ai dit devant le Parlement lors de mon audition : de quoi est né ce projet européen (à partir de la communauté du charbon et de l’acier dans les années 50, sous l’impulsion de Schuman, de Jean Monnet, d’Adenauer et de quelques autres grands hommes d’Etat) ? De l’envie d’être ensemble, au lendemain de la seconde guerre mondiale, pour être en paix, durablement ensemble, pour créer ensemble du progrès collectif… et du besoin, de l’intérêt à être ensemble à travers l’économie : c’était la mutualisation du charbon et de l’acier, avec la CECA. Ca a été ensuite le marché commun, puis la monnaie unique, des politiques communes, l’agriculture, l’environnement, la politique régionale, d’autres politiques encore…
Je voudrais donc qu’on retrouve, conjugués, cette envie et ce besoin d’être ensemble. Et c’est en quoi le marché intérieur est un enjeu stratégique : parce que c’est la vie économique et sociale de 500 millions de consommateurs et de citoyens, de 5 millions d’entreprises dont 90% sont des petites entreprises” .
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Je veux retrouver à travers ce grand portefeuille toutes les dimensions de l’économie sociale de marché, qui est à la base du projet européen. Tirer les leçons de la crise, qui n’est pas finie, en termes de régulation, de transparence, de contrôle, pour que ça ne recommence pas. Même si l’on ne peut empêcher d’autres crises d’arriver, qu’on tire au moins les leçons de cette crise qui est la plus violente depuis 1929. Je vais travailler sur ces différents axes” .
“Je ne suis pas le seul concerné par une telle idée. Il y a le commissaire à la Fiscalité, le commissaire chargé de l’Economie et de la Monnaie, le commissaire à la Concurrence… C’est une réflexion que nous aurons probablement, et pas nous seuls Européens. C’est une idée à laquelle le président Barroso a donné son approbation sur le principe.
“Des chantiers ont déjà été ouverts. Le débat sur la régulation liée aux fonds spéculatifs a lieu par exemple en ce moment, à partir des propositions de la Commission, au Parlement européen et au Conseil des ministres.
“Oui. C’est un vrai progrès (parmi d’autres) d’avoir grâce au traité de Lisbonne un président désormais stable du Conseil européen, au lieu d’avoir un président qui tourne tous les 6 mois. Qui plus est, ce président est un homme d’autorité et intelligent, M. Van Rompuy. Et l’on peut faire confiance à M. Van Rompuy pour exercer cette responsabilité avec beaucoup de volontarisme.
Et l’on va avoir, dans les années qui viennent, d’autres catastrophes, comme on a eu un tsunami il y a 5 ans, des catastrophes industrielles comme Tchernobyl, des grands incendies qui ont touché la Grèce ou le Portugal, des inondations comme celles qui ont touché l’Allemagne en 2002, des catastrophes maritimes comme l’Erika. Dans tous ces cas là, de catastrophes qui sont violentes, tellement graves qu’elles dépassent les forces d’un seul pays ou d’une seule région, il faut que la solidarité joue. Et la solidarité joue d’autant mieux qu’elle a été préparée, que les équipes ont été mises ensemble dans des entraînements, des exercices communs, qu’elle puisse être inter-opérable. Tout ça se prépare.
Propos recueillis par Touteleurope.fr et Estelle Poidevin (MAEE)
Montage : Kadir Demir
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