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La primauté du droit européen remise en cause par la Pologne

Le tribunal constitutionnel polonais, proche du gouvernement national conservateur, a affirmé dans une décision, jeudi 7 octobre, l’incompatibilité entre certaines parties des traités européens et la Constitution de la Pologne. Une décision qui exacerbe les tensions entre Varsovie et Bruxelles, et fait planer la menace d’un “Polexit”.

Le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki a remis en discussion la primauté du droit européen en demandant justement à la Cour constitutionnelle polonaise de statuer sur cette question
Le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki a remis en discussion la primauté du droit européen en demandant à la Cour constitutionnelle polonaise de statuer sur cette question - Crédits : Union européenne

Par un arrêt rendu jeudi 7 octobre, “le tribunal constitutionnel polonais a décidé que certains articles des traités européens sont incompatibles avec sa Constitution nationale et sapent la souveraineté du pays”, indique Le Monde. Les institutions européennes “agissent au-delà du champ de leurs compétences”, a déclaré la présidente du tribunal, Julia Przyłębska, dénonçant “l’ingérence de la Cour de justice de l’UE dans le système juridique polonais” [RFI]. Le porte-parole du gouvernement polonais, Piotr Müller, a de son côté salué un arrêt qui confirme “la primauté du droit constitutionnel sur les autres sources de droit”, rapporte la radio internationale.

Pour le quotidien espagnol El País, cité par Courrier international, il s’agit d’un “verdict dévastateur aux conséquences imprévisibles”. “La plus haute instance juridique du pays, qui avait reporté sa décision quatre fois d’affilée, affirme ainsi la primauté du droit polonais sur le droit européen”, commente Le Monde.

Aggravation des tensions entre Bruxelles et Varsovie

L’arrêt est une “nouvelle étape du conflit qui oppose depuis 2016 les institutions européennes au gouvernement populiste polonais au sujet de ses réformes qui remettent en cause, de l’avis de l’unanimité des juristes, l’indépendance de la justice et les fondements de l’Etat de droit” [Le Monde]. Des réformes “qui ont aussi valu à la Pologne plusieurs condamnations de la Cour de justice de l’UE”, ajoute France 24.

Selon Politico, le tribunal constitutionnel de Pologne est ainsi “sous le contrôle du parti au pouvoir, Droit et Justice, et composé de plusieurs juges nommés en violation de la constitution polonaise”. Sa présidente, Julia Przyłębska, “est une proche de l’homme fort du pays et chef de la majorité, Jarosław Kaczyński “, complète Le Monde.

Inquiétudes

Cette décision a provoqué de multiples réactions au sein des instances européennes. “La Commission européenne est ‘préoccupée’ par la décision du tribunal polonais, a réagi le commissaire européen à la Justice Didier Reynders, déclarant que “l’UE ‘utilisera tous les outils’ à sa disposition pour protéger la primauté du droit européen qui se trouve ‘au cœur de l’Union’ “, cite France 24.

Pour une source européenne du Monde, commentant une décision qui “interpelle toute la communauté européenne”, il s’agit même d’un “gros doigt d’honneur que nous fait la Pologne”. Dans ce climat de tensions, la Commission dispose de moyens de pression dont elle a déjà usé à plusieurs reprises.

Le mois dernier, le commissaire européen chargé de l’Economie, Paolo Gentiloni, a prévenu que l’affaire judiciaire polonaise pourrait avoir des ‘conséquences’ sur le versement des fonds de relance à la Pologne”, rappelle notamment RFI. Des propos qualifiés de “chantage” par le gouvernement polonais. Pour l’heure, “l’Union européenne n’a pas encore approuvé les 23 milliards d’euros de subventions et les 34 milliards d’euros de prêts bon marché prévus pour ce pays”. Des responsables européens ont cependant “expliqué que l’argent pourrait être déboursé le mois prochain, mais que des conditions strictes seraient posées en échange en matière du respect de l’État de droit” [RFI].

Vers un Polexit ?

Le bras de fer juridique entre Bruxelles et Varsovie en vient à faire “craindre que la Pologne ne finisse par quitter l’Union européenne”, analyse L’Express. Ryszard Terlecki, le vice-président Droit et Justice du Parlement polonais, a récemment “appelé à des ‘solutions drastiques’ dans le conflit qui oppose son pays à l’UE” [France 24]. “Les Britanniques ont montré que la dictature de la bureaucratie bruxelloise ne leur convenait pas. Ils ont fait demi-tour et sont partis”, a-t-il déclaré [Le Figaro].

Ces déclarations apparaissent cependant isolées, Ouest-France indiquant que “le PiS, […] assure ne pas envisager de ‘Polexit’ . Le Premier ministre Mateusz Morawiecki a fait une déclaration dans ce sens vendredi, assurant que “son pays souhaitait rester dans l’Union européenne” [Le Figaro]. RFI note par ailleurs que “les Polonais [eux-mêmes] sont majoritairement enthousiastes à l’égard de l’Union européenne, plus de 80 % d’entre eux soutenant l’appartenance à l’UE qui a accordé à leur pays des milliards d’euros de subventions et tout son acquis, stimulant ainsi son développement depuis son adhésion en 2004″.

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