L’Europe est-il un enjeu important de cette campagne ?
Oui, cela se voit avec la forte popularité du parti UKIP, qui a pris un nombre de votes important au Parti conservateur. Sans le UKIP, ce dernier aurait certainement la majorité…
La question européenne a toujours divisé le Parti conservateur, dès les années 1980. Il est très difficile de réunir un parti profondément divisé sur cette question centrale. Mais bien qu’une frange minoritaire prône la sortie de l’Union, le parti doit aussi se distinguer du UKIP. C’est d’ailleurs pourquoi les conservateurs les plus eurosceptiques ont fini par rejoindre Nigel Farage.
Les sondages prévoient un certain déclin du UKIP : comment l’expliquer ?
Cela s’explique surtout par le mode de scrutin électoral : dans la plupart des circonscriptions, un vote pour le UKIP est un vote perdu (ce ne serait pas le cas avec un scrutin proportionnel). Les électeurs qui pourraient être favorables au UKIP ont ici tendance à se tourner vers d’autres partis. Mais cela ne signifie pas que le parti ne va pas à nouveau progresser lors des prochaines élections.
Après, il est possible que le parti soit en train de perdre de la vitesse, notamment à cause de certaines gaffes pendant la campagne. Enfin, le leader Nigel Farage a dit qu’il démissionnerait de la présidence du parti s’il ne gagnait pas la circonscription du South Thanet où il se présente… or les pronostics sont très incertains. Et comme le parti doit beaucoup à la popularité de son chef, il pourrait connaître un vrai déclin si Farage n’est pas élu.
David Cameron a repris plusieurs thèmes de campagne du UKIP, notamment l’Europe et l’immigration… cette stratégie fonctionne-t-elle ?
C’est là que UKIP a vraiment gagné : même les travaillistes ont repris le thème de l’immigration. Et aujourd’hui aucun parti politique, sauf peut-être les Verts, ne paraît pas hostile aux immigrés. Tous ont fait la promesse de réguler l’immigration, la seule différence est le degré de régulation. Or les conservateurs, qui n’ont pas atteints les objectifs chiffrés qu’ils avaient déjà fixés il y a cinq ans, sont dans une position difficile sur ce point.
Si les travaillistes l’emportent, vont-ils à nouveau se rapprocher de l’Union européenne ?
Il est clair que les travaillistes sont plus pro-européens que les conservateurs, donc on peut s’attendre à une coopération plus importante avec les partenaires européens. Et bien sûr, les travaillistes n’ont pas promis de référendum sur la sortie de l’Union. Mais même s’ils l’emportent, ils n’auront pas la majorité absolue et devront constituer un gouvernement minoritaire. Dans ce cas il leur sera très difficile de faire quoi que ce soit de controversé, surtout sur l’Europe. Donc on n’aura pas de grands changements ou de réorientation sur la politique européenne.