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Allemagne : Andrea Nahles élue à la tête d’un parti social-démocrate divisé

Élue dimanche 22 avril avec 66% des voix, l’ancienne ministre du Travail Andrea Nahles a pris la tête du Parti social-démocrate (SPD) allemand. La favorite du scrutin devra maintenant s’atteler à rassembler un parti fortement divisé, et dont les résultats sont en chute libre.

Andrea Nahles
La nouvelle présidente du Parti social-démocrate allemand (SPD), Andrea Nahles - Crédits : SPD Schleswig-Holstein / CC BY 2.0

Réunis en congrès à Wiesbaden, près de Francfort, les délégués du Parti social-démocrate allemand (SPD) ont élu à leur tête l’ancienne ministre du Travail (2013-2017), Andrea Nahles. Franceinfo note qu’elle devient ainsi la “première femme à diriger la plus vieille formation politique du pays, fondée il y a 154 ans, avec pour mission de la sortir de la crise” . Agée de 47 ans, dont “30 [passés] au sein du SPD”, Andrea Nahles a obtenu 66% des voix, face à son unique adversaire, la maire de Flensburg (Schleswig-Holstein), Simone Lange.

Avec cette élection, le SPD “se cherche une ligne nouvelle et gagnante” [France Culture]. Aux élections législatives de septembre 2017, le parti a en effet essuyé “la pire défaire de son histoire (…) depuis la dernière guerre” , rappelle Challenges. La Croix précise que les sociaux-démocrates ont recueilli “20,51% des voix, loin derrière la CDU-CSU d’Angela Merkel (32,9%)” . Le score de Mme Merkel est toutefois insuffisant pour lui permettre de gouverner seule et après l’échec des négociations avec les libéraux et les verts, cette dernière s’est à nouveau tournée vers le SPD, avec qui elle gouvernait depuis 2013. Après des mois de négociations, le SPD “se résout, en février (…) à former une nouvelle coalition gouvernementale avec les conservateurs” . Martin Schulz, alors chef des sociaux-démocrates, est “contraint à la démission, ses partisans lui reprochant de revenir sur son engagement de campagne de ne pas prendre part à un [nouveau] gouvernement Merkel” .

Un SPD affaibli

Aujourd’hui, de nombreux journaux français reprennent la métaphore qu’avait formulée le quotidien munichois Süddeustche Zeitung en février dernier, à l’égard d’Andrea Nahles, qu’il qualifiait de Trümmerfrau (“femme des décombres”) du SPD. Une référence aux femmes qui s’attelèrent à reconstruire les villes allemandes détruites après la Seconde Guerre mondiale, en l’absence des hommes morts ou disparus. De fait, comme l’écrit Franceinfo, Andrea Nahles devra “recoller les morceaux [d’une] formation très divisée” .

Le score obtenu par Mme Nahles, le 22 avril, serait même le symptôme de cette division. Car si son résultat est “net” - 66% - il “laisse tout de même apparaître les fractures [du] parti” , analyse La Croix. Face à elle, Simone Lange a tout de même réuni 28% des voix, alors qu’elle était une “quasi-inconnue jusqu’il y a peu” . Pour le quotidien Le Monde, ce résultat “sonne [ainsi] plus comme un avertissement que comme un adoubement” . Quant à la journaliste Sabine Kinkartz, dans un éditorial pour le média allemand Deutsche Welle, elle estime qu’il s’agirait de l’expression du clivage profond qui traverse le parti. Ainsi une frange pense que le parti ne pourra être sauvé que par un virage radical vers la gauche. Tandis qu’une autre souhaiterait le renouveau d’un SPD moins radical et qui ne serait pas aussi clairement opposé à la coalition avec les conservateurs, explique Sabine Kinkartz.

Renouveau

Dans ce contexte, la mission d’Andrea Nahles s’annonce complexe. Pour Le Monde, il s’agit de “préparer les conditions d’une victoire sur les conservateurs tout en présidant un parti qui continue de gouverner avec eux” . D’autant que d’après le New York Times, certains critiques ne pensent pas qu’Andrea Nahles souhaite réellement - ou soit capable - de renouveler le parti. Tour à tour présidente des jeunes sociaux-démocrates, députée de Rhénanie-Palatinat, puis ministre du Travail et des Affaires sociales sous le précédent gouvernement Merkel, Andrea Nahles ferait ainsi parti de “l’establishment” politique. Pour le New York Times, il s’agit “précisément de son problème : elle incarne tout ce qui a été de travers ces dernières années” .

Toutefois, pour le secrétaire général du parti, Lars Klingbeil, également cité par le New York Times, la position d’Andrea Nahles pourrait aussi être un avantage. En tant que leader du groupe parlementaire social-démocrate, et n’étant pas membre du gouvernement, elle est en position de “renforcer l’indépendance du parti et marquer les nouvelles lois de l’empreinte du SPD” .

Problème européen

L’émission Les enjeux internationaux, diffusée sur France culture, propose pour sa part une comparaison entre le SPD allemand de ses équivalents européens. Interviewé par Xavier Martinet, Fabien Escalona, docteur en sciences politiques, estime que la nouvelle ligne recherchée par le SPD s’inscrit dans “un contexte d’affaiblissement généralisé des sociaux-démocrates en UE” . “Alors que la plupart [des partis] sont passés de 40% à moins de 20% des voix au niveau national” au cours des 15 dernières années, “seulement 5 pays sur 27 sont dirigés par des sociaux-démocrates, dont deux (la Roumanie et Malte) rongés par des scandales de corruption” . M. Escalona explique également que ces partis “sont désormais confrontés à de nouvelles propositions radicales ou ‘disruptives’, à gauche ou à droite ; et eux-mêmes sont hésitants ou divisés, travaillés par des scissions” aussi avec des anciens ou des plus jeunes.

Notons qu’Andrea Nahles connaîtra son premier test à l’automne, avec deux élections régionales prévues [RFI].

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