Le Premier ministre sortant n’a pas subi la défaite annoncée par les sondages. Créant la surprise, Pedro Sánchez pourrait même être le mieux placé pour former un gouvernement. Si le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) dont il est à la tête est arrivé second lors des élections législatives anticipées dimanche 23 juillet, avec 122 sièges, il paraît être dans une situation plus favorable que les conservateurs du Parti populaire (PP).
Menés par Alberto Núñez Feijóo, ces derniers ont obtenu 136 sièges. Mais aucune des deux formations n’atteint la majorité absolue fixée à 176 sièges. Et le PSOE pourrait avoir moins de difficultés que son adversaire à trouver des alliés pour gouverner.
Pedro Sánchez reconduit ou de nouvelles élections organisées ?
De son côté, le PP s’était dit prêt à bâtir un exécutif avec le parti d’extrême droite Vox, troisième du scrutin avec 33 sièges. Mais le cumul de leurs forces ne devrait pas être suffisant pour obtenir la majorité nécessaire à la formation d’un gouvernement. Le PSOE peut quant à lui compter sur le soutien de Sumar, mouvement de gauche fondé par la ministre du Travail Yolanda Díaz, fort de 31 sièges. De même que sur plusieurs formations basques et catalanes.
La grande inconnue demeure le choix que fera le parti Junts. Créé par l’indépendantiste catalan Carles Puigdemont, résidant en Belgique pour échapper à la justice espagnole après un référendum d’autodétermination jugé illégal en Catalogne en 2017, les voix de ses députés pourraient être cruciales pour Pedro Sánchez. Car l’investiture d’un gouvernement socialiste en coalition avec d’autres formations de gauche pourrait buter sur un vote négatif de Junts. Ce qui est loin d’être exclu, le parti s’étant engagé dans une logique de confrontation face au gouvernement Sánchez.
En cas d’échec à construire un nouvel exécutif, des élections pourraient à nouveau être convoquées. Celles de dimanche, initialement prévues en novembre, avaient déjà été anticipées après la défaite de la gauche aux élections régionales et municipales fin mai.
La présidence du Conseil de l’Union européenne en suspens
Si le résultat de ces tractations politiques intéresse au premier plan les Espagnols, celles-ci concernent aussi l’Union européenne. Car l’Espagne assume, depuis le 1er juillet jusqu’au 31 décembre, la présidence du Conseil. Les ministres dirigeant les réunions de l’institution pourraient donc tous changer en cas d’alternance politique à Madrid. De quoi conduire à une redéfinition des priorités de la présidence actuelle, qui a notamment mis la transition écologique et la justice sociale en avant ?
Le rôle d’une présidence tournante du Conseil consiste cependant avant tout à coordonner les positions des Etats membres de l’UE pour parvenir à des compromis. Si le pays présidant l’institution peut choisir de mettre un domaine sur le devant de la scène, il ne bénéficie pas pour autant d’un pouvoir décisionnaire accru. L’impact d’un changement de couleur politique du gouvernement espagnol aurait donc un impact modéré sur la gouvernance de l’Europe.