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Comment les politiques publiques peuvent-elles promouvoir l’égalité femmes-hommes en Europe ?

Le Forum Égalité : “pour l’égalité de genre en Europe”, qui se tient à Angers (8-10 mars), s’est intéressé pour sa première journée au rôle et aux moyens d’action des décideurs publics pour combler les écarts entre les femmes et les hommes, notamment dans le domaine de la culture.

Mercredi 8 mars, universitaires, décideuses publiques et membres d'ONG ont évoqué les situations dans leurs pays respectifs
Mercredi 9 mars, universitaires, membres de l’administration publique et membres d’ONG ont évoqué les situations dans leurs pays respectifs - Crédits : Toute l’Europe

Nous devons faire plus, et plus vite”. Depuis mardi soir et la séance d’inauguration du Forum Égalité : “pour l’égalité de genre”, les intervenants qui se succèdent à la tribune du centre des congrès d’Angers viennent confirmer les propos introductifs de la ministre française de la culture Roselyne Bachelot.

A commencer par son homologue Graça Fonseca, ministre portugaise de la culture, qui est longuement revenue sur une œuvre fondamentale de la littérature féministe portugaise : Les Nouvelles lettres portugaises. L’ouvrage a été publié en 1974 par les “Trois Marias”, trois écrivaines “qui ont bravé la dictature pour défendre le droit des femmes”, a-t-elle rappelé.

Beaucoup reste à faire

L’exemple choisi n’est pas anodin. En plus de la présidence française du Conseil de l’Union européenne, ce Forum Égalité s’inscrit également dans le cadre de la saison France-Portugal, une programmation culturelle commune aux deux pays entre février et octobre 2022. L’apport du livre est rappelé à de nombreuses reprises par les intervenantes, universitaires ou fonctionnaires, qui s’expriment ce mercredi 9 mars. Toutes rappellent que des progrès ont été réalisés depuis la publication de cet ouvrage, censuré dans son pays d’origine, mais toutes en conviennent également : beaucoup reste à faire.

Ce constat est illustré par les témoignages de trois femmes, invitées à s’exprimer sur les difficultés rencontrées au cours de leur carrière. Elles exercent dans le domaine de la musique à Angers et ses environs. Clarisse Arnou, gérante d’un label souligne par exemple que “seuls 15 % des directeurs de labels [en France] sont des femmes”. Autre exemple évoqué par le panel : “2,3 % des concerts joués dans l’Union européenne en 2021 ont été écrits par des femmes”. Les causes sont multiples selon ces entrepreneuses : “Manque de confiance en soi”, autocensure de la part de certaines femmes”, mais aussi “manque de réseaux féminins, contrairement aux hommes” et surtout “stéréotypes à l’encontre des femmes dans la culture”.

En raison de l’actualité, l’organisation a invité la journaliste et écrivaine ukrainienne Irena Karpa à s’exprimer sur la situation dans son pays. Après avoir illustré son propos par de nombreux exemples de femmes ukrainiennes impliquées dans le conflit, elle s’est adressée au public, émue : “J’aimerais dire comme votre soutien est important pour nous, par l’information, par le soft power. Les manifestations et les pressions sur les gouvernements que vous exercez nous aident à sauver des vies”.

Des outils pour la promotion de l’égalité

La première matinée de débats était ainsi consacrée à l’action des pouvoirs publics pour lutter contre ces facteurs allant à l’encontre de l’égalité de genre, en particulier dans le domaine de la culture. L’occasion pour les intervenantes d’évoquer les pratiques en France, au Portugal ainsi qu’en République tchèque.

Pour Agnès Saal, Haute fonctionnaire au sein du ministère français de la Culture, “la puissance publique a une responsabilité particulière” dans la lutte pour promouvoir l’égalité de genre. Selon l’ancienne directrice générale de la Bibliothèque nationale de France, les pouvoirs publics doivent faire preuve “d’incitation et parfois d’injonction, même si ce mot peut faire peur à certains”.

Parmi les solutions évoquées, l’une d’elles revient régulièrement : imposer des quotas de femmes. De telles mesures ont par exemple été mises en œuvre au Portugal, explique Carla Cerqueira, professeure adjointe à l’université Lusófona à Lisbonne. Pour la chercheuse, “mettre en œuvre des mesures de discrimination positive” permet de “corriger un déséquilibre initial”. Sans les quotas, “nous allons devoir attendre très longtemps” avant d’avoir une égalité de fait, déplore quant à elle Hana Stelzerová, directrice du Czech Women Lobby, pour qui ces mesures sont également nécessaires.

Le deuxième outil utilisé par les pouvoirs publics est d’ordre financier. “Il est important de conditionner les aides publiques à des organisations qui promeuvent l’égalité et la lutte contre toutes les discriminations”, souligne Agnès Saal.

Parmi les autres solutions évoquées, Hana Stelzerová pointe notamment le rôle central de l’éducation. “Enseigner le respect et l’égalité” dès le plus jeune âge est essentiel, “dès la maternelle !”.

Un accompagnement et une reproduction à l’échelle européenne

Si les intervenantes font état de la situation dans leurs pays respectifs, elles écoutent d’une oreille attentive les constats et les solutions chez leurs voisines. Et soulignent également la nécessité d’une action au niveau européen.

Un peu plus tôt dans la matinée, Themis Christophidou, directrice générale pour l’Éducation, la Jeunesse, le Sport et la Culture à la Commission européenne a ainsi mis en avant les politiques dessinées à l’échelle du continent. Celle-ci a affirmé que la promotion de l’égalité de genre était un élément “central dans les politiques menées” par l’exécutif européen. Valoriser les œuvres de femmes ou les projets qui parlent des femmes est ainsi une priorité du programme Europe Creative. “L’égalité est également une valeur transversale dans le programme Horizon Europe, à destination de la recherche et de l’innovation”, abonde-t-elle. Parmi les initiatives mises en place, la fonctionnaire européenne retient notamment “Girls go circular”, un projet qui vise à donner à 50 000 jeunes filles de 14 à 18 ans des compétences dans le domaine numérique, où elles sont très minoritaires.

La Commission européenne s’engage également contre les violences faites aux femmes. C’est en tout cas l’objet d’une proposition de l’exécutif européen, présentée mardi 8 mars, qui érige en infraction pénale certaines pratiques comme les mutilations génitales féminines et la cyberviolence. Pour Hana Stelzerová, combattre ces violences est “primordial”. La Convention d’Istanbul, que la proposition européenne vise à promouvoir, est l’un des “outils concrets” à défendre au niveau du continent, selon cette dernière.

Mais Themis Christophidou le rappelle en conclusion, l’Union européenne n’a pas de compétence exclusive dans le domaine et a invité les États membres à plus de coopération. Instaurée depuis plusieurs années, la méthode ouverte de coordination (MOC), un cadre de coopération entre les États membres, a tout de même permis d’établir 26 propositions dans le secteur culturel en juin 2021.

A l’échelle de l’UE, les initiatives nationales doivent faire nombre. Puis il faut les étendre. Des progrès dans un pays doivent désormais pouvoir s’appliquer dans les 27″, conclut Agnès Saal. Faire plus et plus vite donc. 

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