Depuis 2000, pour battre les Européens, il faut être Américain… ou Thaïlandais
Le Festival de Cannes a beau être un événement international mondialement suivi, il s’avère que le cinéma européen y occupe une place prépondérante. Un bref coup d’œil aux films primés et aux sélections en atteste. Ces dernières années, les succès européens à Cannes ont été particulièrement nombreux. En effet, des cinéastes européens comme les Britanniques Mike Leigh et Ken Loach, les Belges Luc et Jean-Pierre Dardenne, le Grec Theo Angelopoulos, l’Italien Nanni Moretti, le Danois Lars von Trier, le Polonais Roman Polanski, le Roumain Cristian Mungiu, l’Autrichien Michael Haneke et les Français Laurent Cantet et Abdellatif Kechiche ont tous remporté la Palme d’or au cours des vingt dernières années.
Et si l’on ajoute à cette liste, les noms des films et des artistes européens récompensés dans l’ensemble des compétitions cannoises, le plébiscite des productions européennes apparaît avec encore plus de clarté. Cette année encore, nombreux seront les représentants du cinéma européen à gravir les fameuses marches du Palais des festivals. Au sein du jury, présidé par la réalisatrice néo-zélandaise et auteure de La Leçon de piano, Jane Campion, figureront Carole Bouquet et le metteur en scène danois Nicolas Winding Refn, dont le film Drive avait connu un accueil chaleureux en 2011. En compétition officielle pour la Palme d’or, sont présents les Français Bertrand Bonello, Michel Hazanavicius et Olivier Assayas, le Franco-suisse Jean-Luc Godard, qui présentera le probablement iconoclaste Adieu au langage ou encore l’Italienne Alice Rohrwacher. Quant à, Mike Leigh, Ken Loach et aux frères Dardenne, ils chercheront à remporter une deuxième, voire une troisième palme d’or.
MEDIA et Eurimages, soutien incontournable des cinéastes européens
Dans ces récents succès du cinéma européen, les institutions de l’Union européenne ne sont pas étrangères. En effet, le programme MEDIA, de la Commission européenne, ainsi que le fonds Eurimages, du Conseil de l’Europe, participent activement au financement et au développement du cinéma d’auteur européen. Depuis 2000, ce ne sont pas moins de 10 palmes d’or qui ont été soutenues par MEDIA : les quatre seuls films qui n’en n’ont pas profité n’étant pas des productions européennes. L’Europe peut donc se prévaloir d’apporter un soutien financier en apparence modeste (quelques centaines de milliers d’euros) mais parfois décisif à des films dont le budget est bien souvent très réduit.
Cette année, 7 des 8 films issus de l’Union européenne en compétition ont été financés par le programme MEDIA, renommé “Europe Créative” à compter de cette année. Seul Saint Laurent de Bertrand Bonello, réalisateur de l’Apollonide sorti en 2011, n’en n’a pas bénéficié. Quant au fonds Eurimages, trois films ayant reçu son apport figurent dans la sélection officielle. C’est le cas de Sils Maria, d’Olivier Assayas, de Deux jours, une nuit, des frères Dardenne, ainsi que de Winter Sleep, du Turc Nuri Bilge Ceylan, qui est le fruit d’une coproduction turque, allemande et française.
Au total, ce sont 21 films soutenus par MEDIA et 7 par Eurimages qui seront projetés à Cannes durant la quinzaine. Une liste étendue au sein de laquelle figurent aussi bien des grands noms du cinéma, des productions engagées sur des thèmes politiques ou sociaux, que des jeunes auteurs dont l’essor est dépendant des soutiens publics et des festivals projetant leurs œuvres. Dès lors, il n’est pas étonnant que le Festival de Cannes, dont la dimension ne s’est jamais restreinte à la culture, fasse la part belle au cinéma européen. Cette année, le Festival a même été réduit d’une journée pour que la date de clôture ne coïncide pas avec celle des élections européennes.