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[Revue de presse] Retour des djihadistes : des Européens divisés et embarrassés

Sommés par Donald Trump de rapatrier leurs djihadistes arrêtés en Syrie, les pays européens sont dans l’embarras. Par son ampleur, cette situation est inédite et aucune solution commune n’émerge. Chaque Etat membre avance ses propres solutions, de l’acceptation du retour de ses ressortissants au refus total.

La cheffe de la diplomatie européenne Federica Mogherini le 18 février 2019 - Crédits : Mario Salemo / Conseil de l'UE
La cheffe de la diplomatie européenne Federica Mogherini le 18 février 2019 - Crédits : Mario Salemo / Conseil de l’UE

Ultimatum de Donald Trump à l’Europe

Alors que l’organisation terroriste Etat islamique (EI) a été battue en Irak, et est en passe de l’être en Syrie, le président américain Donald Trump a exhorté le 17 février les Etats européens à rapatrier leurs ressortissants djihadistes emprisonnés en Syrie. “Il n’y a pas d’alternative, car nous serions forcés de les libérer” , a prévenu le président des Etats-Unis [Le Monde avec l’AFP et Reuters], qui a annoncé en décembre le retrait progressif de ses troupes du sol syrien.

Des représentants des autorités du nord-est de la Syrie qui détiennent ces djihadistes étrangers ont, pour leur part, nuancé la portée des déclarations du président des Etats-Unis” , rapporte cependant le quotidien. Le responsable des relations internationales du nord-est syrien, contrôlé par les Forces démocratiques syriennes (FDS, majoritairement kurdes), a ainsi déclaré : “Nous ne les relâcherons pas. Jamais nous ne pourrions faire cela” . Mais il a lui aussi appelé leurs Etats d’origine à “assumer leurs responsabilités, soulignant des risques d’évasion à la faveur d’une éventuelle attaque de la Turquie sur le territoire, rendue possible par le retrait américain” , fait savoir Le Monde. Selon ce responsable, les FDS détiendraient 800 hommes étrangers et retiendraient 700 femmes et 1 500 enfants dans des camps de déplacés.

La question du retour des djihadistes s’est ainsi invitée au programme du Conseil des ministres des Affaires étrangères à Bruxelles, lundi 18 février. “Un nouveau test d’unité pour l’Union sur un sujet éminemment sensible qui n’était pas officiellement à l’ordre du jour de ce Conseil des Affaires étrangères, et dont ces ministres se seraient volontiers passés” , commente Le Figaro.

Pas de solution européenne commune

“S’il y a effectivement une forme d’unanimité à refuser les rapatriements collectifs proposés par Trump, les Vingt-Huit avancent en ordre dispersé sur la manière de traiter la question de ces combattants de l’État islamique restés en Syrie” , poursuit le journal.

D’autant qu’à l’issue de la réunion, “la haute représentante pour la politique extérieure de l’UE, Federica Mogherini, [n’a pu] que reconnaître que le retour des ressortissants européens ayant combattu pour Daesh relève de la souveraineté de chacun des Etats membres de l’Union” , même si elle “préconise comme beaucoup qu’il y ait une approche commune” [RFI].

En attendant, les responsables européens tentent de gagner du temps” , estime le média. Les différents Etats membres concernés par le problème, comme la France, la Belgique, le Royaume-Uni ou l’Allemagne n’ont ainsi que commencé à faire connaître leurs positions. Et avec précaution, tant la situation est “compliquée, embarrassante pour la plupart des capitales européennes qui font face à l’hostilité d’une partie de leurs opinions publiques farouchement opposées à ces retours” , comme le rappelle RFI.

Refus du rapatriement des djihadistes

Certains Etats membres préfèrent ainsi que leurs ressortissants djihadistes soient jugés sur les lieux de leurs crimes. C’est notamment le cas du Royaume-Uni, qui “rejette carrément la demande de Donald Trump” [Ouest-France].

Les Suédois ont adopté une approche similaire. “Les Suédois de l’EI qui ont commis des crimes doivent en priorité être jugés dans les pays où ils se trouvent” , a affirmé le ministre de l’Intérieur Mikael Damberg [Le Monde avec l’AFP et Reuters]. Le quotidien précise que la Suède est “très en retard sur le plan pénal” . “Le fait de partir rejoindre une organisation terroriste ne tombe sous le coup de la loi que depuis 2016, soit avant les grands départs de 2014 et 2015, et le crime consistant à appartenir à une organisation terroriste ne doit être créé que cette année” . “Si Stockholm rapatriait ses ressortissants, la justice suédoise n’aurait pas les moyens de les juger” , considère donc le journal.

Même son de cloche en Belgique, dont “le Premier ministre Charles Michel s’est prononcé lundi pour que les djihadistes étrangers - et notamment belges - détenus en Syrie soient ‘au maximum’ jugés dans la région, tout en invoquant la possibilité de créer une juridiction internationale ad hoc” [Le Soir avec Belga].

Des retours judiciarisés acceptés

D’autres Etats, à l’instar de l’Allemagne et de la France, acceptent le principe du retour des djihadistes sur leur sol, à condition qu’ils soient traduits en justice dès leur arrivée. C’est-à-dire, pour les hommes en âge de combattre, qu’ils soient placés en garde-à-vue, puis en détention provisoire en attente d’un procès.

L’Allemagne a affirmé ce lundi vouloir s’assurer [elle-même] du jugement de ses ressortissants djihadistes encore en Syrie, même si leur rapatriement tel que réclamé par Donald Trump s’annonce à ce stade ‘extrêmement difficile’ ” , rapporte Ouest-France, qui reprend ici les mots d’Heiko Maas, ministre des Affaires étrangères allemand.

Concernant la France, si “jusqu’à récemment, [elle] était opposée au retour des djihadistes français en zone irako-syrienne” [LCI], la donne a changé.

Nicole Belloubet, ministre de la Justice, a en effet reconnu une “situation géopolitique nouvelle établie avec le retrait des forces américaines” décidé fin décembre par Donald Trump. “Lorsque des personnes de retour des combats arrivent, nous les judiciarisons” , a-t-elle déclaré, admettant ainsi des retours de djihadistes en France traités au cas par cas, expliquent Les Echos.

Si “aucun chiffre exact n’a en effet circulé publiquement sur le nombre de Français” djihadistes retenus en Syrie, “des sources concordantes évoquent le cas de 130 personnes, - une cinquantaine d’hommes et femmes et des dizaines d’enfants - actuellement dans les mains de la coalition arabo-kurde des Forces démocratiques syriennes (FDS)” , d’après LCI.

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