Le trio européen aura usé de beaucoup de persuasion mais celle-ci n’aura pas été vaine. Plusieurs heures de discussion auront été nécessaires pour convaincre Dmitri Medvedev de retirer ses troupes de Géorgie. L’accord conclu ne concerne cependant pas les provinces séparatistes d’Ossétie et d’Abkhazie. L’Union européenne et la Géorgie se sont tout de même félicitées des avancées réalisées sur le dossier. Un dossier qui reste pourtant très sensible, alors que s’ouvre mardi 9 septembre le sommet UE-Ukraine à Paris.
La Russie s’engage à retirer ses troupes de Géorgie …
L’ambassadeur de Géorgie en France considère que “C’est maintenant au Kremlin de décider si il veut coopérer avec l’Europe”
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La visite du trio européen à Moscou ce lundi 8 septembre 2008 n’aura pas été inutile. En effet, après plusieurs heures de négociation, houleuses selon les observateurs sur place, le Président russe Dmitri Medvedev s’est engagé à retirer l’ensemble de ses troupes de Géorgie d’ici le 15 octobre.
Un accord [pdf] a ainsi été conclu entre l’Union européenne et la Russie sur la mise en oeuvre effective et réelle du plan de paix signé avec la Géorgie le 12 août dernier. Ce dernier, négocié sous la houlette de la Présidence française de l’Union européenne, prévoyait un retrait des troupes russes avant le 22 août.
Les autorités russes n’avaient cependant pas respecté leur engagement et ont même reconnu, le 25 août, l’indépendance des provinces séparatistes d’Ossétie et d’Abkhazie. Une reconnaissance unilatérale immédiatement condamnée par l’Union européenne et son président en exercice, Nicolas Sarkozy.
Le nouvel accord prévoit donc un retrait rapide, d’ici un mois, des troupes russes de Géorgie. Cependant, les autorités russes ne se sont engagées que sur un retrait limité, et entendent maintenir leurs positions dans les provinces séparatistes.
… mais entend rester “longtemps” en Ossétie et en Abkhazie
A l’occasion de la conférence de presse conjointe avec la délégation européenne à Moscou, le Président russe a rappeler “Nos opinions divergent sur la reconnaissance de l’Ossétie et de l’Abkhazie”
L’Union européenne peut se réjouir : la Russie s’est engagée sur un calendrier précis pour le retrait de ses troupes de Géorgie. Elle a également reconnu le rôle de garant de la paix joué par l’Union européenne.
Il reste pourtant une ombre au tableau de ces négociations menées de front par le trio européen. L’accord conclu le 8 septembre ne couvre que la Géorgie, c’est-à-dire les cinq “checkpoints” situés entre Poti et Sénaki. Il ne s’étend donc pas aux provinces séparatistes d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie, dont l’occupation par les troupes géorgiennes est à l’origine du conflit.
Dmitri Medvedev a même réaffirmé que la Russie entendait bien rester “encore longtemps” sur ces territoires afin d’y assurer le maintien de la paix. Il n’est pas non plus revenu sur sa décision de reconnaître l’indépendance de ces deux provinces.
L’accord conclu entre l’UE et la Russie prévoit cependant le déploiement de 200 observateurs supplémentaires dans les régions géorgiennes adjacentes à l’Ossétie et à l’Abkhazie afin de remplacer, d’ici le 1er octobre 2008, les troupes russes.
De plus, la Russie s’est engagée à participer, le 15 octobre prochain, au Sommet international à Genève sur l’avenir de l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie. Mais cet engagement ne doit pas être interprété comme un retour sur la reconnaissance de l’indépendance des deux provinces.
Le bilan de la rencontre entre les représentants de l’Union européenne et les autorités russes semble donc en demi-teinte. Le Président géorgien, Mikhaïl Saakachvili, qui accueillait lundi soir M. Sarkozy, M. Barroso et M. Solana à Tbilissi, s’est cependant déclaré satisfait des progrès réalisés par la délégation européenne sur le dossier.
Le Président géorgien a également souligné le rôle de médiateur de l’UE dans ce conflit, précisant que “La Géorgie toute entière est reconnaissante (…) pour l’intervention audacieuse, on peut dire historique, [de l’Union européenne] dans ces pourparlers pour essayer d’arrêter la guerre” .
Le sommet UE-Ukraine s’ouvre dans un contexte tendu
Ironie de l’histoire ou hasard du calendrier, c’est au lendemain des négociations UE-Russie, le mardi 9 septembre, que s’ouvre à Paris le sommet UE-Ukraine.
Une réunion importante pour la Présidence française de l’Union européenne mais également pour ce pays de l’Est qui pourrait devenir un jour candidat à l’entrée dans l’UE.
Nicolas Sarkozy accueille donc ce mardi le Président ukrainien, Viktor Iouchtchenko, en présence de José Manuel Barroso et de Javier Solana. Ce sommet devrait se conclure par l’adoption d’une déclaration conjointe qui scellera le cadre politique de la relation Union européenne-Ukraine.
Ce sommet s’inscrit dans le contexte d’un approfondissement des relations entre l’Union européenne et l’Ukraine, et doit être l’occasion de donner un élan décisif aux négociations du nouvel accord renforcé lancées en 2007.
L’Ukraine est un ancien satellite de l’URSS et a l’une des relations les plus complexes avec la Russie. En effet, le gouvernement ukrainien aujourd’hui en place est “atlantiste” , c’est-à-dire proche des Etats-Unis et de l’OTAN. Cependant une grande partie de la population est “pro-russe” .
De plus, l’Ukraine est très dépendante de la Russie sur le plan énergétique. Le rapprochement UE-Ukraine va donc se concrétiser dans un contexte de relations très tendues entre la Géorgie et la Russie, mais également entre la Russie et l’UE.
Sources
Mise en oeuvre du plan du 12 août 2008 [pdf] - Présidence de la République française
Conférence de presse conjointe avec M. Dmitri MEDVEDEV, Président de la Fédération de Russie - 08/09/08 - Présidence de la République française
Conférence de presse conjointe avec M. Mikheil SAAKACHVILI, Président de Géorgie - 08/09/08 - Présidence de la république française
Sommet Union européenne-Ukraine - Paris - 09/09/08 - Présidence française de l’Union européenne
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