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Le “rêve” d’Ivanichvili séduit les Géorgiens

L’avenir de la Géorgie est désormais entre les mains d’un nouvel homme. Le président géorgien, Mikheïl Saakachvili, a reconnu mardi la défaite de son parti aux élections législatives, remportées contre toute attente par le Rêve géorgien, la coalition d’opposition du milliardaire Bidzina Ivanichvili. Contrairement aux craintes de l’ONU, qui avait dénoncé “un climat de peur et d’intimidation à l’encontre des membres des partis de l’opposition et de la société civile”, les élections en Géorgie se sont déroulées  sans incident majeur. Grand vainqueur, Ivanichvili devra bientôt présenter aux Géorgiens les grandes lignes de son programme.

L’opposition largement en tête

Deux coalitions électorales et vingt-et-un partis politiques étaient en lice lors des élections législatives qui se sont déroulées lundi en Géorgie. Après le dépouillement des bulletins dans 29,1% des bureaux de vote pour les 77 sièges sur 150 répartis à la proportionnelle, le Rêve géorgien a recueilli 53,11% des voix contre 41,57% pour le parti M. Saakachvili, a indiqué la commission électorale de ce pays du Caucase.

Pour la première fois depuis 8 ans, le chef de l’Etat a affronté un véritable adversaire. A défaut d’une opposition solide et organisée, le candidat de l’opposition, souvent qualifié de “candidat de Moscou” en raison de ses relations proches avec la Russie, a créé la surprise en renversant le président sortant.

Une “maturité démocratique” démontrée lors du scrutin

Lundi 1er octobre, dès 8 heures du matin, environ 3 600 bureaux de vote ont ouvert dans une atmosphère électrique. Près de 1 500 observateurs internationaux étaient présents pour relever d’éventuelles infractions à la loi électorale et veiller à la bonne tenue du scrutin, auquel 3,6 millions de Géorgiens étaient invités à participer. Membre de l’équipe d’observateurs, Jean-Marie BOCKEL, sénateur du Haut-Rhine relevé que “le bon déroulement du scrutin [prouvait] une certaine maturité politique des citoyens” . “C’est une vraie victoire démocratique” , a-t-il expliqué dans un entretien à Touteleurope.eu.

Membre de la délégation de l’Assemblée permanente du Conseil de l’Europe (APCE) en tant que représentant du Sénat français, M. Bockel est revenu sur la procédure relativement longue en raison notamment du contrôle des pièces d’identité et de toutes les vérifications qui devaient avoir lieu dans les bureaux de vote. Le sénateur Bockel s’est dit impressionné “de la bonne organisation des équipes composées et présidées, d’ailleurs, majoritairement par des femmes qui mettaient de l’ordre dans tous les aspects pratiques notamment par rapport aux nombreux observateurs qui étaient présents, qu’il s’agisse d’ONG ou d’autres acteurs politiques” .

10% des électeurs privés de vote

Si l’OSCE a indiqué que “les élections législatives [ont] constitué un pas important dans le renforcement de l’organisation d’élections démocratiques, bien que certains problèmes clés doivent être résolus” , plusieurs journaux nationaux ont critiqué le déroulé du scrutin et le fait que des centaines de milliers de ressortissants géorgiens n’aient pas pu prendre part aux élections.

“Les électeurs géorgiens résidant à l’étranger [ont rencontré] de sérieux obstacles pour pouvoir voter aux élections” , expliquait lundi le site Eurasianet. Plus d’un million de ressortissants géorgiens résident - légalement ou non - en Russie, en Turquie, en Europe et aux Etats-Unis. De même, dans plusieurs cas ces Georgiens n’ont pu aller voter. C’est le cas notamment de certains travailleurs qui n’ont pû se libérer un lundi et également des Géorgiens vivant en Occident qui n’ont pu présenter au consulat de Géorgie des documents confirmant leur séjour régulier. Enfin, les Géorgiens de Russie n’ont pas pu voter, car en l’absence de relations diplomatiques entre Moscou et Tbilissi depuis 2008, aucun bureau de vote n’a été ouvert sur le territoire russe.

Le déroulement du scrutin remis en cause

Quelques jours avant les élections, la Géorgie était sous le feu des projecteurs en raison d’un scandale retentissant. Les révélations faisant état de traitements inhumains et dégradants dans les prisons de Tbilissi ont suscité une vague d’émotion dépassant le cadre des frontières du pays et ont placé le Président Saakashvili dans une situation très délicate.

Malgré la réactivité du gouvernement, la démission de deux ministres, et la promesse d’une réforme en profondeur du système pénitentiaire, personne ne peut contester que ce scandale a eu un effet considérable sur la popularité du MNU.

Dans le camp de l’opposition, la campagne électorale d’Ivanichvili a suscité de nombreux soupçons. Achat de votes, distribution de dizaines de milliers d’antennes satellites, de frigidaires et autres téléviseurs, augmentation des salaires des fonctionnaires … La question se pose aujourd’hui de savoir si le nouveau président a acheté ses électeurs.

Les grandes lignes du “Rêve Géorgien”

Pendant sa campagne, Bidzina Ivanichvili a affirmé que s’il sortait vainqueur du scrutin législatif, il réduirait le chômage, mettrait en place une couverture médicale universelle et proposerait une éducation de qualité. Pour réaliser son “rêve géorgien” , le milliardaire a promis de garantir l’indépendance de la police, de la justice et des médias. En outre, il a promis la réunification de la Géorgie, affirmant qu’il améliorerait les relations entre Tbilissi et Moscou, tout en se déclarant favorable à l’adhésion de son pays à l’Union européenne et à l’OTAN. Après les élections législatives, le scrutin présidentiel aura lieu au printemps 2013.

Selon la Constitution, le chef de l’Etat actuel, Mikhail Saakachvili, ne peut se représenter après deux mandats consécutifs. Le président de la République détient en effet la grande majorité des pouvoirs en Géorgie. Les gouverneurs de régions sont désignés par lui (après 2013, ils seront nommés par le Premier ministre). Ses opposants voyaient d’ailleurs dans l’extension des pouvoirs du Premier ministre, figurant dans la réforme constitutionnelle votée en 2010, une manipulation de Mikhail Saakachvili, qui envisageait de passer de la présidence au poste de chef du gouvernement pour continuer à diriger le pays après avoir quitté la tête de l’Etat. Ce ne sera finalement pas le cas, la réforme constitutionnelle ne pouvant désormais profiter qu’au nouveau président élu.

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