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La deuxième vie de l’Union pour la Méditerranée

A l’heure où les révolutions arabes s’étendent comme une trainée de poudre du Maghreb au Machrek, les partisans du projet avorté d’Union pour la Méditerranée (UpM) se sentent pousser des ailes. Et entendent bien surfer sur cette vague révolutionnaire pour remettre en selle un projet lancé officiellement en 2008, mais qui était déjà une des promesses de campagne du candidat Sarkozy en 2007.

Un projet axé sur le développement économique

L’opération Plomb durci a été menée par l’armée israelienne dans la bande de Gaza entre décembre 2008 et janvier 2009. Elle a été controversée, notamment du fait de l’utilisation d’armes dont l’usage est limité par le droit international humanitaire.
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L’objectif de cette Union : “promouvoir l’intégration économique et les réformes démocratiques dans seize pays voisins situés au sud de l’UE, en Afrique du Nord et au Moyen-Orient” , se faisant le relais du processus de Barcelone qui s’était révélé être un semi-échec. En effet les pays impliqués n’avaient pas réussi à surmonter les conflits politiques internes à la zone - dont le conflit israelo-palestinien, condition sine qua non de la construction d’une zone de paix et de prospérité économique. C’est sur ce même obstacle qu’a rapidement buté l’UpM, jusqu’à la suspension définitive des réunions suite à l’opération “Plomb durci” dans la bande de Gaza. Quant au secrétaire, le jordanien Ahmad Massa’deh, il a démissionné en janvier tout juste un an après sa prise de fonction, indiquant que les conditions dans lesquelles il avait accepté sa mission avaient changé.

L’UpM se compose de six initiatives phares : la dépollution de la Méditerranée, la mise en place d’autoroutes maritimes et terrestres, un programme de protection civile commun sur les catastrophes naturelles ou causées par l’homme, un plan solaire méditerranéen, une université euro-méditerranéenne, et enfin l’initiative méditerranéenne de développement des entreprises.



Un nouveau volet politique

Pour Nicolas Sarkozy, ces axes essentiellement économiques ont vocation à être complétés par un approfondissement de la dimension politique : c’est pourquoi il a appelé dimanche à la refondation de l’UpM. Ce volet politique doit selon Henri Guaino, chef de la mission interministérielle pour l’UpM, se concentrer sur les thématiques des droits de l’Homme, de la démocratie et de la liberté. A son sens, les bouleversements en cours dans une partie du monde arabe rendent cela possible. Il plaide enfin pour un renforcement du codéveloppement, “pour éviter que ces révolutions ne tournent mal” . Lors de son allocution de dimanche 27, le président Sarkozy a également laissé entrevoir d’autres préoccupations pour cette refondation : les flux migratoires et le terrorisme. A cela s’ajoute la volonté de se doter “de nouveaux outils pour promouvoir l’éducation et la formation de la jeunesse” .


La France, qui avait été à l’initiative du projet d’Union pour la Méditerranée, est concernée au premier chef : c’est du moins l’opinion de M. Guaino qui affirme que, “l’Algérie, le Maroc, la Tunisie c’est presque un problème de politique intérieure ” . Le nouveau ministre des Affaires étrangères Alain Juppé souhaite à son tour se saisir de cette initiative qu’il qualifie de prémonitoire.

Mais certains tirent un bilan plus critique de l’UpM, c’est le cas de l’Institut Thomas More qui note des problèmes internes qui ne sauraient être réglés par une plus grande politisation. A commencer par un désaccord au sein même de l’UE sur ses priorités entre une Europe nordique et orientale qui regarde vers l’Est, et une Europe latine plus tournée vers le Sud de la Méditerranée. Ce blocage s’est d’ailleurs manifesté dès la création de l’UpM avec un conflit entre A. Merkel et N. Sarkozy, puis plus gravement avec des promesses de financement non tenues. L’Union pour la Méditerranée se trouvait donc en déshérence depuis plusieurs mois, sans gouvernance ni réels moyens.


Quel avenir pour l’UpM ?

Le dialogue 5+5 est une enceinte de dialogue politique informel, qui regroupe les cinq pays de l’Union du Maghreb arabe (l’Algérie, la Libye, le Maroc, la Mauritanie, la Tunisie) ainsi que cinq pays de l’Union (l’Espagne, la France, l’Italie, Malte et le Portugal).
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Le renforcement d’un volet politique n’est pas non plus approuvé unanimement, puisqu’il est perçu comme trop ambitieux au regard de l’expérience passée et des moyens mis à disposition. La Banque européenne d’investissement (BEI) ou encore l’Institut T. More proposent des solutions plus pragmatiques. Le chiffre de six priorités avancées au départ pourrait être réduit, les actions gérées à un niveau plus local, avec des schémas plus simples (type 5+5).

De son côté la BEI qui est le premier acteur financier public en Méditerranée (1,6 milliards d’euros par an) a mis en place la Facilité euro-méditerranéenne d’investissement et de partenariat. Cet instrument permet de financer des investissements publics majeurs, et de soutenir le développement industriel des pays de la rive Sud.

Il est donc nécessaire de tirer le bilan de l’Union pour la Méditerranée avant d’envisager sa réactivation, faute de quoi elle pourrait s’avérer n’être qu’un dérivatif pour les échecs de la diplomatie française et européenne, estime Dorothée Schmid, chercheuse à l’IFRI. La prochaine plénière de l’Assemblée parlementaire de l’Union pour la méditerranée qui se tiendra à Rome les 3 et 4 mars sera l’occasion d’effectuer ces clarifications.

Sources :

Henri Guaino sur France Inter à propos de l’Union pour la Méditerranée
Henri Guaino sur RTL
Allocution de Nicolas Sarkozy le 27 février à l’occasion du remaniement
Site de l’Institut Thomas More
Page officielle de l’UpM
L’action de la BEI en Méditerranée : l’exemple du Maroc - Toute l’Europe
Interview du vice-président de la BEI, P. de Fontaine Vive - Toute l’Europe

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