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Afghanistan : les dirigeants européens entre urgence et pragmatisme

Vingt ans après leur défaite contre les Etats-Unis, les talibans ont repris le pouvoir à Kaboul ce week-end. Alors que la Russie et la Chine comptent nouer des relations avec les nouveaux maîtres de l’Afghanistan, les Européens tentent de coordonner leurs positions.

Les opérations d’évacuation qui ont été lancées depuis l'aéroport de Kaboul se poursuivent
Les opérations d’évacuation qui ont été lancées depuis l’aéroport de Kaboul se poursuivent - Crédits : compte Twitter de l’ambassade de France en Afghanistan @AmbassadeKaboul

Sans combat, les talibans ont repris le contrôle de Kaboul ce week-end, marquant la fin d’une reconquête fulgurante de l’Afghanistan suite au retrait des forces américaines. “Tournant historique” pour Emmanuel Macron, “développement absolument amer” selon Angela Merkel : les mots des Européens marquent la gravité de la situation.

Réunis mardi 17 août en fin d’après-midi autour de Josep Borrell, chef de la diplomatie européenne, les ministres des Affaires étrangères des Vingt-Sept ont évoqué la situation. Et ont souligné l’importance d’une transition en douceur : “Le processus de négociation entre le gouvernement afghan et les Talibans offrait la meilleure chance de parvenir à une solution qui garantisse la sécurité et la coexistence pacifique en Afghanistan et dans la région”, a fait savoir Josep Borrell dans un communiqué à l’issue de cette réunion.

Le pays a besoin d’une solution politique durable et inclusive qui protège les droits des femmes et permette aux Afghans de vivre en sécurité et dans la dignité”, a de son côté déclaré le président du Parlement européen David Sassoli.

Asile et migrations

Les pays du sud de l’Europe comme Chypre, Malte, la Grèce, l’Espagne ou l’Italie, anticipent quant à eux une nouvelle vague migratoire, causée par un afflux de réfugiés afghans. Ces Etats ont demandé que la situation des futurs réfugiés soit mise à l’ordre du jour de la réunion des ministres européens de l’Intérieur ce mercredi 18 août.

Certaines voix ont appelé de façon nette à accueillir les réfugiés afghans qui souhaitaient quitter le pays. “L’asile doit être accordé à ceux qui risquent d’être persécutés”, a ainsi twitté David Sassoli lundi 16 août.

Si elle s’est dit prête à un accueil “contrôlé” des réfugiés les plus vulnérables mardi, la chancelière Angela Merkel a de son côté directement fait référence à la crise migratoire de 2015 : “nous ne devons pas répéter l’erreur que nous avons faite dans le passé en ne donnant pas assez de moyens au Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés et en laissant les gens quitter la Jordanie et le Liban à destination de l’Europe”. Une analyse proche de celle d’Emmanuel Macron, pour qui “l’Europe ne peut pas à elle seule assumer les conséquences de la situation actuelle”. “Nous devons anticiper et nous protéger contre des flux migratoires irréguliers importants qui mettraient en danger ceux qui les empruntent”, a-t-il poursuivi lors de son allocution lundi 16 août, précisant que “la France fait et continuera de faire son devoir pour protéger ceux qui sont les plus menacés”.

Mais la question ne fait pas l’unanimité. Le gouvernement hongrois, connu pour son refus de l’accueil de migrants au cours de la crise migratoire de 2015, manque ainsi à l’appel des soixante gouvernements qui, dimanche dernier, appelaient dans une déclaration commune à autoriser les Afghans qui le souhaiteraient à quitter leur territoire.

Les pays occidentaux évacuent pour l’instant leurs ressortissants vivant en Afghanistan ainsi que les nombreux Afghans qui ont aidé les puissances occidentales pendant des années, comme les traducteurs. “La sécurité des citoyens européens, du personnel et de leurs familles est une priorité à court terme”, a exprimé le président du Conseil Charles Michel. Près de 400 personnes ont en effet travaillé pour la délégation et les missions de l’UE en Afghanistan. Les équipes de l’Union sont sous la protection des Etats-Unis ainsi que des Etats membres, qui peuvent notamment mettre en place des ponts aériens et délivrer des visas pour faciliter leur exfiltration. A ce sujet, Josep Borrell a particulièrement remercié l’Espagne, l’Italie et la France pour leur soutien sur place lors d’une conférence de presse mardi 17 août.

“Nous devrons discuter avec eux”

Au-delà de l’urgence humanitaire, reste à savoir quelles relations les Etats européens entretiendront à long terme avec un Afghanistan dirigé par les talibans. “Nous devons entrer en contact avec les autorités de Kaboul, quelles qu’elles soient. Les talibans ont gagné la guerre”, a concédé Josep Borrell à l’issue de la réunion des ministres européens des Affaires étrangères mardi. “Nous devrons discuter avec eux afin d’engager un dialogue, dès que nécessaire, pour éviter une catastrophe humanitaire et une potentielle catastrophe migratoire”, a ajouté le haut représentant. A la question de savoir si les talibans d’aujourd’hui, qui cherchent une reconnaissance internationale, avaient changé par rapport aux fondamentalistes de la fin des années 1990, Josep Borrell a été assez clair : “Ils se ressemblent, mais ils parlent mieux anglais”.

Le président français a pour sa part martelé lundi que le pays “ne doit pas redevenir le sanctuaire du terrorisme qu’il a été”. “C’est un enjeu pour la paix, la stabilité internationale contre un ennemi commun : le terrorisme et ceux qui le soutiennent”, a poursuivi Emmanuel Macron. Paris et Londres ont convenu d’une initiative commune au sein du Conseil de sécurité des Nations unies, et le Premier ministre britannique Boris Johnson souhaite une réaction coordonnée du G7.

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