Touteleurope.eu est le site pédagogique de référence sur les questions européennes : Qui sommes-nous ?

Black Friday : comment l'Union européenne veut contrôler les dérives

Importé des États-Unis, cet événement commercial s’est développé récemment en Europe. Moins réglementé que les soldes d’hiver ou d’été, le phénomène connait un succès grandissant auprès des magasins et des enseignes de e-commerce, mais l’Union européenne reste vigilante.

En France, la majorité des achats réalisés durant le Black Friday sont effectués sur des sites de e-commerce
En France, la majorité des achats réalisés durant le Black Friday sont effectués sur des sites de e-commerce - Crédits : VioletaStoimenova / iStock

-30 %, -50 % voire - 70 % : à quelques semaines des fêtes de fin d’année, les promotions s’affichent partout sur les vitrines de magasins, comme sur les sites de e-commerce. Encore inconnu du grand public il y a une dizaine d’années, le Black Friday (vendredi noir en français) est devenu un rendez-vous commercial incontournable. Selon une étude OpinionWay, 75 % des Français attendraient le Black Friday pour acheter toute ou une partie de leurs cadeaux de Noël cette année. Leur budget moyen s’élèverait à 416 euros. 

Officiellement, le Black Friday est ce vendredi 24 novembre, mais dans de nombreuses enseignes, les réductions ont déjà débuté. Une période synonyme de hausse des ventes et donc toujours propice à des dérives. Dans un guide publié en ligne, la douane et la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) mettent d’ailleurs en garde les consommateurs pour éviter de “se faire arnaquer”.

De son côté, l’Union européenne a mis en place ces dernières années des dispositifs pour tenter de mieux protéger les consommateurs. Avec ses deux nouveaux règlements sur les services et les marchés numériques (DSA et DMA), elle veille particulièrement à ce qui se passe sur les grandes plateformes de e-commerce.

L’action de l’Union européenne

Depuis mai 2022, l’Union européenne a renforcé les règles concernant les promotions pour tenter de protéger les consommateurs. Une directive dite “omnibus” précise les règles pour encadrer les baisses de prix. Lorsqu’il affiche une réduction, le marchant doit indiquer comme prix de référence le prix le plus bas qu’il a lui-même appliqué sur les 30 derniers jours.

Cette mesure est censée limiter le nombre de fausses promotions constatées lors des Black Friday précédents. Sauf que dans la pratique, la situation est loin d’être complètement assainie”, précise l’UFC-Que Choisir sur son site. L’association de consommateurs estime que les vendeurs respectent globalement la législation européenne, mais qu’ils jouent avec ces nouvelles règles. Preuves à l’appui, elle démontre que de nombreuses enseignes gonflent leurs prix dans les semaines précédant le Black Friday afin de faire croire à une promotion plus intéressante.

L’édition 2023 sera la première placée sous le signe du Digital Markets Act (DMA ou règlement sur les marchés numériques) entré en vigueur le 2 mai dernier. Ce texte vise à mieux encadrer les activités économiques des plus grandes plateformes. Ces dernières sont accusées de rendre les plus petites entreprises et les consommateurs particulièrement dépendants de leurs services et d’empêcher la concurrence des autres sociétés. Avec le DMA, elles n’ont plus le droit de favoriser leurs propres services et produits par rapport à ceux des entreprises qui les utilisent, ou d’exploiter les données de celles-ci pour les concurrencer. Les services de la Commission devront peut-être attendre la prochaine édition du Black Friday pour mesurer le succès du nouveau règlement. Les entreprises visées par le texte ont jusqu’au 6 mars 2024 pour se conformer aux obligations du DMA.

Entré en vigueur en août 2023 pour les très grandes plateformes et les très grands moteurs de recherche, le Digital Services Act (DSA ou règlement sur les services numériques) devrait également avoir son rôle à jouer. Le texte, qui modernise une partie de la directive de 2000 sur le commerce électronique jusque-là inchangée, s’attaque quant à lui aux contenus (haineux, pédopornographiques, terroristes…) et aux produits illicites (contrefaits ou dangereux) proposés en ligne.

Si le DSA ne remet pas en cause la responsabilité limitée des plateformes vis-à-vis des contenus et produits illicites qu’elles hébergent (notion d’hébergeur “passif”), celles-ci devront en revanche proposer un outil permettant aux utilisateurs de les signaler. Une fois ce signalement effectué, elles devront alors retirer ces contenus et produits ou en bloquer rapidement l’accès.

Le DMA et le DSA, complètent la législation européenne liée à la régulation numérique, quelques années après l’entrée en application du règlement général sur la protection des données, en mai 2018. Le RGPD est un texte réglementaire qui encadre le traitement des données personnelles de manière égalitaire sur tout le territoire de l’Union européenne.

Le Black Friday, un phénomène récent en Europe

Le Black Friday tire son origine des Etats-Unis, où il désigne la journée suivant Thanksgiving, soit le dernier vendredi du mois. L’expression daterait des années 1950 mais plusieurs théories circulent sur son origine exacte. Le phénomène est beaucoup plus récent sur le continent européen. Avec une différence notable par rapport aux Etats-Unis : il se développe d’abord en ligne. Outre-Atlantique, le Black Friday est généralement synonyme de gigantesques scènes de bousculades au lever des rideaux des magasins.

Au début des années 2010, plusieurs sites de e-commerce tentent d’importer le concept du Black Friday sur le Vieux Continent, dont le géant américain Amazon. Le phénomène prend de l’ampleur en 2014 en France quand de grandes enseignes comme la Fnac, Darty ou Auchan reprennent l’idée. Il se développe sur le même modèle en Allemagne, en Italie et dans toute l’Europe. Selon le sondage OpinionWay, 53 % des Français qui prévoient de participer au Black Friday souhaitent réaliser leurs achats uniquement en ligne (contre 10 % en magasin exclusivement et 37 % de manière hybride).

Aujourd’hui, une grande majorité des marques européennes misent sur le Black Friday, mais pas seulement pour 24 heures. Contrairement aux soldes, le Black Friday est peu réglementé en ce qui concerne les dates. L’événement s’est donc rallongé pour devenir chez certains une Black week (semaine noire) voire un Black November (novembre noir).

Qu’est-ce que le Green Friday, le Blue Friday ou encore le Block Friday ?

De nombreux groupes et associations dénoncent le consumérisme du Black Friday et tentent de proposer des alternatives.

C’est notamment le cas du Green Friday qui veut proposer un mode de consommation à la fois responsable et éthique. “Chaque année, l’industrie textile jette 4 millions de tonnes de vêtements et en vend 5 millions en Europe”, indique le collectif Green Friday, à l’origine de l’événement.

En Belgique, ce mouvement s’appelle le Blue Friday. Les marques s’engagent à reverser une partie de leurs revenus à une association environnementale.

Certaines associations choisissent d’autres méthodes d’action. A l’image d’Extinction Rebellion, qui revendique “la désobéissance civile non violente” dont les militants bloquent régulièrement l’accès à certains magasins en cette journée de promotions. L’opération porte le nom de Block Friday.

Quitter la version mobile