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Yannick Neuder : “L’Europe doit encore davantage faire confiance aux Régions”

Yannick Neuder, vice-président chargé des fonds européens pour la Région Auvergne-Rhône-Alpes, revient sur des projets de territoires financés par l’UE depuis 2014. Pointant du doigt les complexités du montage de ces projets, il appelle à une simplification ainsi qu’à un rapprochement des citoyens et de la politique de cohésion européenne.

Yannick Neuder est le vice-président délégué à l’enseignement supérieur, recherche, innovation, numérique et fonds européens de la Région Auvergne-Rhône-Alpes
Yannick Neuder est le vice-président délégué à l’enseignement supérieur, recherche, innovation, numérique et fonds européens de la Région Auvergne-Rhône-Alpes - Crédits : Charles Pietri / Région Auvergne-Rhône-Alpes

Quels ont été les thèmes prioritaires de votre Région dans l’octroi de fonds lors de la programmation des fonds européens 2014-2020 ?

Pour la période 2014-2020 qui s’achève, la Région Auvergne-Rhône-Alpes s’est inscrite pleinement dans la stratégie Europe 2020 visant une croissance intelligente, durable et inclusive.

Ainsi, à travers les cinq programmes pour lesquels la Région est autorité de gestion (Auvergne, Rhône-Alpes, Rhône-Saône, FEADER et Alcotra), représentant 3,2 milliards d’euros, la Région a financé des projets permettant d’assurer le développement, l’attractivité et l’adaptation de nos territoires aux enjeux d’avenir. De plus, la Région a veillé à la bonne articulation des fonds européens avec les politiques et dispositifs régionaux qu’elle a elle-même initiés afin de garantir un fort effet levier pour des projets au service du quotidien des auvergnats et des rhônalpins.

Ces principes ont guidé tous les projets financés par les fonds européens.

Pourriez-vous nous parler d’une réalisation emblématique financée grâce à l’Union européenne dans votre Région dont vous êtes particulièrement fier ?

De nombreux projets portés et financés par la Région nous rendent particulièrement fiers et effectivement un certain nombre d’entre eux ont été cofinancés grâce aux fonds européens. Je pense notamment aux mesures d’urgences prises par la Région dès le début de la crise sanitaire du Covid 19.

Le projet “CovidAir, par exemple, s’inscrit dans le cadre de la lutte contre la crise sanitaire liée au Covid-19, et a pour objectif de développer une méthode de diagnostic simple du virus, et potentiellement d’autres pathologies respiratoires, grâce à la détection de métabolites traceurs dans l’air expiré.

Au-delà de cette pandémie, un nouveau champ pour le dépistage de pathologies respiratoires est en train de voir le jour. Les travaux de CovidAir sont pilotés par des scientifiques de l’Institut des agents infectieux des Hospices Civils de Lyon, en collaboration avec l’Institut de recherches sur la catalyse et l’environnement de Lyon (IRCELYON, CNRS / Université Claude Bernard Lyon 1), l’Institut des sciences analytiques (ISA, CNRS / Université Claude Bernard Lyon 1) et enfin le Centre international de recherche en infectiologie (CIRI – INSERM/CNRS/Université Claude Bernard Lyon 1/ENS de Lyon).

Grâce au soutien de la Région et avec l’appui des financements du Fonds européen de développement régional (331 401 euros de FEDER) et de l’État, les porteurs du projet ont pu notamment acquérir un spectromètre de masse, dont la sensibilité et la résolution sont inégalées dans le monde.

Dans le domaine du numérique, on peut notamment citer la construction du Réseau d’Initiative Publique (RIP) « Auvergne Très Haut Débit ». Ce projet, porté par la Régie Auvergne Numérique, a permis de financer des équipements et des travaux pour la construction du Réseau d’Initiative Publique (RIP) dans sa composante FTTH (Fiber To The Home) sur la phase 1 de l’opération globale.

Le FEDER a contribué à hauteur de 13 millions d’euros au financement de cette phase (de 2014 à 2017). Le déploiement de ce réseau Haut débit concerne 77 communes dans sa Phase l sur les 4 départements auvergnats (Allier, Cantal, Haute-Loire, Puy-de-Dôme). Ces travaux ont permis de connecter 94 732 prises FttH. 89 375 ménages peuvent ainsi accéder à l’internet à une vitesse de téléchargement d’au moins 30 Mb/sec (ménages qui n’avaient auparavant aucun accès ou seulement un accès plus limité).

L’Europe soutient également des projets qui améliorent le quotidien des habitants.

Un autre beau projet : la réhabilitation de l’ancien internat du Lycée de Presles, à Cusset dans l’Allier, en un conservatoire artistique. Ici, le FEDER intervient pour financer des travaux de réhabilitation et de reconversion de l’ancien internat (subvention FEDER : 970 388 euros). Ce bâtiment était inutilisé, en friche. La communauté d’agglomération de Vichy a souhaité le rénover afin d’en faire un conservatoire de musique pour les écoles de Vichy et Cusset. Le quartier de Presles fait également l’objet d’un Programme de Renouvellement urbain et ce projet de conservatoire est en adéquation avec la volonté d’ouvrir le centre-ville de Cusset sur ce quartier.

Après 18 mois de travaux, le nouveau site du Conservatoire a ouvert ses portes le 18 novembre 2019 à quelque 940 élèves dans un bâtiment moderne de 4 étages et 2 750 m2. Grâce à ces nouveaux locaux, les élèves bénéficient d’enseignements pédagogiques innovants et d’un accueil avec des équipements à la pointe de la technologie.

Quelles sont vos attentes de la nouvelle programmation 2021-2027 ?

La simplification est un enjeu fort des fonds européens, qui restent très contraints par le cadre européen et les différents contrôles diligentés. Plusieurs mesures de simplification ont été déployées par la Région Auvergne-Rhône-Alpes dans le cadre de la programmation 2014-2020 (taux et montants forfaitaires notamment). L’enjeu pour la programmation 2021-2027 sera de systématiser le recours à ces mesures et d’en développer de nouvelles pour permettre aux porteurs de concentrer leur énergie sur leur projet plutôt que sur des aspects administratifs et réglementaires. J’attends également que les mesures de simplification annoncées par la Commission européenne ne soient pas vidées de leur sens par une surinterprétation réglementaire à chaque strate de contrôle.

Après deux hivers marqués par la pandémie et la paralysie des stations de ski, quelles politiques comptez-vous engager pour soutenir ce secteur particulièrement dynamique dans la région ?

La Région a adopté en février 2020 un premier Plan Montagne doté de 400 millions d’euros pour aider les acteurs économiques à faire face à la crise à travers des mesures d’urgence. Il prévoit également un plan de relance pour la montagne visant à diversifier les activités proposées et à continuer la transition vers la “montagne 4 saisons”.

Ce Plan prévoit notamment, la création d’un dispositif de prêt à destination des petites et moyennes entreprises situées en zone de montagne. De 10 000 à 300 000 euros, le Prêt Montagne Auvergne-Rhône-Alpes FEDER REACT EU, dont Bpifrance assure la mise en œuvre, est un prêt participatif à taux zéro d’une durée de 7 ans dont 2 ans de différé d’amortissement du capital, sans garantie. Il finance notamment les besoins de trésorerie des entreprises liés à la situation conjoncturelle et le besoin en fonds de roulement.

Le dispositif a été doté de 38 millions d’euros de FEDER permettant à Bpifrance d’engager 152 millions d’euros de prêts. La mise en œuvre opérationnelle du Prêt a démarré le 26 mars 2021 et devrait se terminer le 31 décembre 2021.

La Conférence sur l’avenir de l’Europe a été lancée en mai dernier. En tant que Vice-Président de Région délégué aux fonds européens, comment aimeriez-vous voir évoluer la politique régionale de l’Union européenne ?

Il est essentiel que la politique de cohésion se rapproche des citoyens et s’adapte mieux aux attentes des territoires. La gestion doit être allégée afin de favoriser l’accès de ces fonds par le plus grand nombre. Pour cela, l’Europe doit encore davantage faire confiance aux Régions. Elles comprennent les enjeux de leurs territoires et sont les plus à même de mobiliser les fonds européens de façon pertinente et efficiente.

La réponse que l’Europe doit apporter au déficit démocratique qu’elle vit passe avant tout par l’image qu’elle renvoie sur les territoires. Je rencontre très souvent des porteurs de projets qui me témoignent des difficultés qu’ils rencontrent dans le montage de leur dossier et ce malgré l’aide qu’ils reçoivent de la Région. Certains en viennent même à tourner le dos aux fonds européens. La simplification est donc un enjeu majeur de l’Union.

Pour la période 2021-2027, les fonds européens en Auvergne-Rhône-Alpes seront mobilisés pour répondre aux attentes des habitants en matière de sécurité, de santé, d’attractivité des territoires. Ils doivent également accompagner la transition des territoires et des économies régionales autour des enjeux de relocation et de transition énergétique et numérique.

La Conférence sur l’avenir de l’Europe doit donc être l’occasion de débattre de ces sujets.

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