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Rune Rasmussen : “L’identité des bénéficiaires des fonds communautaires devrait être rendue publique”

Le Livre vert sur l’initiative européenne en matière de transparence, rendu public par la Commission européenne le 3 mai 2006, vise à engager avec l’ensemble des parties concernées un débat sur les moyens d’améliorer la transparence dans l’Union européenne. Rune Rasmussen, EU Policy Officer pour le compte de l’association Transparency International, répond aux questions de Touteleurope.fr.

Quels sont, selon vous, les principaux enjeux des propositions du Livre vert en matière de transparence de l’utilisation des fonds communautaires à gestion partagée ? Votre organisation soutient-elle ces propositions ? Quelles sont les prochaines étapes en matière de transparence dans l’attribution des fonds communautaires ?

Transparency International croit fermement que l’identité des bénéficiaires des fonds communautaires devrait être rendue publique. Nous pensons que, si les arguments que l’on oppose à la publication de ces informations (protection des données personnelles, risque d’attiser des jalousies entre pays voisins, révélation de secrets d’affaires) sont fondés, l’enjeu d’intérêt général lié à leur publication les devance de loin.

Certains Etats membres et régions se sont particulièrement inquiétés de ce que la divulgation de l’identité des destinataires des fonds structurels risquerait d’alourdir considérablement la charge administrative de la gestion de ces fonds, pour une valeur ajoutée limitée.

Si les coûts et les bénéfices liés à la divulgation de ces informations doivent être mesurés, nous pensons que les bénéfices dépassent nettement les coûts induits.

D’abord, les coûts de la publication des noms des bénéficiaires des fonds représentent une toute petite partie des ressources et du capital politique en jeu.

Ensuite, la transparence constitue en elle-même un instrument permettant de prévenir les erreurs et la fraude délibérée. S’il est difficile d’évaluer précisément les pertes liées à la fraude aux fonds communautaires, il est vraisemblable que les gains d’efficacité réalisés grâce à la divulgation de l’identité des bénéficiaires compenseront largement l’augmentation des frais de gestion.

Par ailleurs, le fait de rendre publiques ces informations permettra aux citoyens de participer à une discussion plus éclairée sur l’utilisation de leurs impôts - élément indispensable au bon fonctionnement de la démocratie.

Enfin, certains Etats membres (comme la Slovénie et l’Estonie) publient déjà la liste des bénéficiaires des fonds structurels qu’ils gèrent, et montrent ainsi que cela est possible, à des coûts raisonnables.

Pour Transparency International, toutefois, la publicité des destinataires des fonds n’est qu’un premier pas vers une réforme plus large du système de gestion des financements de l’Union européenne. Dans le système actuel, les Etats membres sont chargés de la gestion et de la distribution des fonds, mais ils ne sont pas légalement responsables de l’utilisation correcte et efficace de l’argent. Il en est de même pour la Commission européenne. Nous pensons que, dans le cadre d’une future réforme, la gestion des fonds devrait aller de pair avec cette responsabilité, soit que les ministres des Finances des Etats membres approuvent formellement les dépenses réelles, soit qu’un autre système de ce type établisse cette responsabilité.

Le Livre vert sur la Transparence avance plusieurs propositions d’actions en vue de rendre plus transparentes l’action des lobbies et leurs relations avec les institutions européennes. Quelle appréciation Transparency International porte-t-elle sur ces propositions ? Pensez-vous que le lobbying peut demeurer strictement auto-régulé ?

Nous pensons que des efforts devraient être faits pour rendre plus transparentes les activités de lobbying. L’échange continu d’informations entre les groupes de pression, les entreprises et les citoyens d’une part, et les politiques, le Parlement et l’administration d’autre part, devrait se faire de la manière la plus ouverte et la plus transparente possible. Sans transparence, ces échanges d’informations ne peuvent satisfaire aux exigences démocratiques.

Nous pensons que l’enregistrement des lobbyistes est un élément essentiel de ces exigences, et appelons à la mise en place d’un système d’enregistrement obligatoire. Au minimum, nous estimons que l’adoption d’un système d’enregistrement volontaire devrait être obligatoirement assortie d’une clause de révision. Cette révision aurait lieu deux ans après l’introduction du système d’enregistrement. S’il s’avérait alors que moins de 95% des lobbyistes ont choisi de s’enregistrer volontairement, un système obligatoire serait automatiquement mis en place. Transparency International craint en effet qu’en deça de 95% d’inscriptions sur le registre des groupes de pression, la crédibilité de toutes les actions en faveur d’une plus grande transparence des activités de lobbying soit menacée.

Si la Commission devait retenir un système volontaire d’enregistrement, il nous semble qu’il ne suffira pas, pour inciter l’ensemble des groupes de pression à adhérer au système, d’offrir aux lobbyistes enregistrés des alertes leur signalant l’ouverture de consultations. Il faudra développer d’autres dispositifs incitatifs liés au quotidien des activités de lobbying.

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