“A l’issue d’un vote à bulletins secrets ouvert lundi soir” [Le Monde], le Parlement européen a levé le 9 mars l’immunité de l’indépendantiste catalan Carles Puigdemont et de deux autres eurodéputés, Toni Comín et Clara Ponsatí. Cette décision, approuvée par 400 votes pour, 248 contre et 45 abstentions, marque un nouvel épisode d’un feuilleton qui dure depuis près de quatre ans. Les trois parlementaires sont en effet poursuivis en Espagne pour l’organisation d’un référendum d’indépendance “interdit en Catalogne” en octobre 2017, rappelle France Info. Après avoir déclaré la Catalogne indépendante à l’issue du scrutin, l’ancien président de la communauté autonome s’était installé en Belgique “pour échapper aux poursuites espagnoles” [Euronews]. En mai 2019, Carles Puigdemont “et ses anciens ‘ministres’ ” avaient ensuite été élus au Parlement européen, poursuit France Info. En plus de l’accusation de “sédition” , Euronews précise que Carles Puigdemont et Toni Comín sont aussi poursuivis pour “détournement de fonds publics” . Cette levée de l’immunité parlementaire des trois eurodéputés “ouvre la voie à un nouvel examen par la justice belge des demandes d’extradition émises par l’Espagne” à leur encontre, explique le média.
Sans grande surprise, la riposte de Carles Puigdemont ne s’est pas fait attendre. Il a dénoncé un “cas clair de persécution politique” [Libération]. Certains eurodéputés se sont opposés à la levée de l’immunité parlementaire des trois parlementaires européens, à l’instar d’Emmanuel Maurel, proche de La France insoumise, dans l’émission La faute à l’Europe ? diffusée le 9 mars sur LCP-Public Sénat. La présidente du groupe socialiste au Parlement européen a quant à elle affirmé que ce résultat était une “victoire pour la démocratie et l’État de droit” , cite El Mundo. Les eurodéputés de Podemos, alliés aux socialistes à la tête de l’Espagne, ont cependant voté contre la levée de l’immunité lors du scrutin. “Un nouveau différend au sein de la coalition” , commente le quotidien de centre droit.
Côté espagnol, le pouvoir central s’est réjoui de ce vote. La ministre des Affaires étrangères Arancha González Laya s’est ainsi félicitée de cette décision, considérant que “les problèmes de la Catalogne se résolvent en Espagne, ils ne se résolvent pas en Europe” [Midi Libre]. Ambiance différente à Barcelone, où “une centaine de personnes” est venue témoigner de sa solidarité avec les leaders indépendantistes lors d’une manifestation, rapporte Euronews.
“L’offensive judiciaire espagnole en Europe”
Si les trois parlementaires européens ont pu jusqu’ici échapper à la justice espagnole, d’anciens dirigeants catalans purgent déjà leur peine en Espagne, lit-on dans Le Monde. Le quotidien mentionne le cas d’Oriol Junqueras, “ancien vice-président du gouvernement régional de Carles Puigdemont” , qui “s’était vu retirer son mandat [d’eurodéputé] en janvier 2020 après sa condamnation” .
Si Carles Puigdemont et Toni Comín sont en fuite en Belgique, c’est la justice écossaise qui devra décider si elle exécutera le mandat d’arrêt espagnol pour Clara Ponsatí. Les trois élus pourraient donc être contraints de retourner dans leur pays. Néanmoins, selon Courrier international, “leur transfert en Espagne paraît pour le moment illusoire” . La justice belge a en effet refusé en janvier dernier l’extradition de l’ex-conseiller catalan Lluís Puig, pourtant réclamée par la Cour suprême espagnole, et alors même “qu’il n’est pas élu européen” [Courrier international].
La décision des parlementaires ouvre ainsi la porte à un “labyrinthe juridique” , d’après le quotidien catalan pro-indépendance El Punt Avui. Les élus indépendantistes ont déclaré “qu’ils [introduiraient] un recours devant la Cour de justice de l’Union européenne” [Le Monde]. En Espagne, le procureur Pablo Llarena a envoyé à cette même cour une question préjudicielle “afin de soulever un certain nombre de doutes sur la manière dont le droit communautaire doit être interprété dans cette affaire” , indique El País. Son but est de faire en sorte que la justice belge ne reprenne pas les mêmes arguments que pour le cas Lluís Puig, à savoir la crainte d’un non-respect des droits fondamentaux des accusés et la nécessité de juger l’affaire par un tribunal catalan.
Avec cette “offensive judiciaire espagnole en Europe” , la “saga” risque ainsi de durer encore de “longs mois, voire des années” , considère Le Monde. Carles Puigdemont et les deux autres députés européens bénéficient toutefois de six mois de liberté de mouvement sur le continent, “aussi longtemps que la Cour de justice de l’Union européenne décidera de l’allonger” [El Confidencial]. Il n’est pas certain qu’ils en profitent pour se rendre en Espagne, où le mandat d’arrêt contre eux reste en vigueur.
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