L’Ode à la joie, hymne européen, compte parmi les symboles de l’Union européenne aux cotés du drapeau et de la devise.
Elle a été d’abord adoptée comme hymne par le Conseil de l’Europe en 1972, avant de devenir un symbole de l’Union européenne en 1985.
L’hymne, extrait de la neuvième symphonie de Ludwig von Beethoven et repris sans parole, symbolise les idéaux de liberté, de paix et de solidarité incarnés par l’Europe.
Lorsqu’il compose le dernier mouvement de sa symphonie n°9 en 1823, Ludwig van Beethoven décide de mettre en musique l’Ode à la joie (Ode an die Freude), poème de l’Allemand Friedrich von Schiller, écrit en 1785. Le texte célèbre la fraternité entre les hommes, unis par la joie : “Joie, belle étincelle divine / […] Tes charmes assemblent / Ce que, sévèrement, les coutumes divisent / Tous les humains deviennent frères” .
Sous la plume de Beethoven, l’air repris par un chœur en allemand reprend les codes de l’hymne : une mélodie simple, facile à chanter et un un tempo proche de ceux des marches militaires. Cette œuvre connaît alors un grand succès et est utilisée par plusieurs mouvements politiques, notamment par les ouvriers allemands au XIXe siècle.
Du Conseil de l’Europe aux Communautés européennes
Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, les gouvernements européens tentent d’instaurer une paix durable en créant le Conseil de l’Europe, en 1949. L’institution cherche des symboles à la hauteur de son ambition de réconciliation européenne. L’hymne de Beethoven n’est d’abord pas une évidence, en raison de son utilisation pendant les années du conflit. “S’il n’est pas ‘idéologisé’ par les nazis, comme Wagner, la 9e reste cependant l’une des œuvres les plus jouées en Allemagne entre 1939 et 1945″ , explique ainsi Le Figaro.
Les 200 ans de la naissance du compositeur, célébrés en 1970, remettent sa musique au goût du jour. En 1972, l’Assemblée consultative du Conseil de l’Europe accepte “comme hymne européen [le] prélude à l’Ode à la Joie, 4e mouvement de la IXe Symphonie de Beethoven” . Le chef d’orchestre autrichien Herbert von Karajan est alors chargé d’arranger cet air pour en faire l’hymne de l’Europe. L’arrangement officiel dure environ deux minutes et adopte un tempo plus lent que celui choisi à l’origine par Beethoven.
Sur recommandation du Conseil de l’Europe, les Communautés européennes se penchent sur l’adoption de l’Ode à la joie comme hymne. Ce sont finalement les travaux du Comité Adonnino sur “l’Europe des citoyens” , chargé de réfléchir aux moyens de rapprocher l’Europe de ses populations, qui tranche la question des symboles de l’Union européenne. Suivant ses conclusions, le Conseil européen de Milan en juin 1985 adopte alors l’hymne européen comme symbole officiel. Celui-ci sera interprété le 29 mai suivant lors de la cérémonie officielle de levée du drapeau devant le siège de la Commission.
En 2005, les législateurs européens inscrivent l’hymne de l’Union comme symbole officiel dans le projet de traité établissant une Constitution pour l’Europe en 2005. Mais après l’échec de la Constitution européenne, cette disposition n’est pas reprise dans le traité de Lisbonne. Dans une déclaration annexée au traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, une quinzaine d’Etats membres rappellent néanmoins que le drapeau, l’hymne, la devise, l’euro et la journée de l’Europe “continueront d’être, pour eux, les symboles de l’appartenance commune des citoyens à l’Union européenne et de leur lien avec celle- ci”.
Un symbole de liberté, de paix et de solidarité
La mélodie de Beethoven évoque “les idéaux de liberté, de paix et de solidarité incarnés par l’Europe”, selon le site officiel de l’UE. Bien que la version originale soit en allemand et que des interprètes la proposent dans d’autres langues (y compris en latin ou en espéranto), l’Union européenne a quant à elle fait le choix de ne pas privilégier l’une des 24 langues officielles et de laisser l’hymne “sans paroles”, dans le “langage universel de la musique” .
De plus, comme le rappelle le site officiel, “l’hymne européen n’est pas destiné à remplacer les hymnes nationaux des pays de l’Union européenne.” Il est interprété lors des cérémonies officielles de l’Union européenne et pour tout événement lié à l’Europe. Il a, par exemple, été utilisé à l’occasion de cérémonies militaires comme l’inauguration de l’Eurocorps à Strasbourg le 5 novembre 1993.
L’hymne officiel fait sans cesse l’objet de réinterprétations. En mai 1998, le Conseil de l’Europe commande ainsi au compositeur français Christophe Guyard une nouvelle version de l’hymne européen. Sur le thème de “l’Ode à la joie” de Beethoven, il crée la “Rhapsodie sur l’Hymne Européen” pour grand orchestre et différentes versions instrumentales. Plus récemment, d’autres versions plus modernes ont vu le jour : hip-hop, jazz et même techno.
Reprise et réadaptée, “l’Ode à la joie” incarne l’Union européenne aux yeux des Européens, au point de se placer en tête des téléchargements au Royaume-Uni le vendredi 31 janvier 2020, jour où le pays a quitté l’Union européenne.