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Les Lettons rejettent le russe comme seconde langue officielle

Samedi 18 février, les Lettons ont voté à 74,62% en faveur du “non” au référendum proposant de faire du russe la seconde langue officielle du pays. La forte participation (69,23%) peut être considérée comme un signe fort de l’attachement du peuple letton à la défense de son identité nationale, vis-à-vis de la culture russe.

Amorcer le dialogue

Incorporée à l’Empire russe au XVIIIe siècle, indépendante au sortir de la Première Guerre mondiale, la Lettonie a ensuite été occupée par l’Union soviétique en 1940, cédée à l’Allemagne l’année suivante et transformée en République socialiste en 1944. Indépendante depuis 1991 et la chute de l’Union soviétique, le pays se construit dans le souvenir douloureux de la domination russe et cherche à se bâtir un avenir sur la base d’une identité culturelle nationale propre. Aujourd’hui, la communauté russophone de Lettonie, qui représente environ 33% de la population, est largement considérée comme une minorité immigrante selon Vladimir Lindermans, leader de l’organisation “Langue maternelle” à l’origine du référendum.

Du propre aveu de ses instigateurs, le référendum du 18 février avait peu de chance d’aboutir sur la victoire du “oui” et donc de la reconnaissance du russe comme une langue officielle. Il s’agissait plutôt d’amorcer un dialogue vers une meilleure reconnaissance des droits de cette importante minorité. Nils Usakovs, maire de Riga, capitale où vit une importante communauté russophone, s’est par exemple prononcé en faveur du référendum même s’il se montre plus favorable à une langue officielle unique. Pour lui, l’enjeu principal du référendum était bien d’infléchir la politique du gouvernement en attirant l’attention sur le rejet ressenti par de nombreux russophones.

Cloisonnement entre russophones et lettonophones

La Lettonie apparaît en effet comme un pays scindé, avec peu de contacts entre la population parlant le letton et celle parlant le russe. Présents principalement dans les grandes villes, comme Riga ou Daugavpils, les russophones ne parlent pas nécessairement la langue officielle de leur pays et travaillent pour la plupart dans le secteur privé,la pratique du letton étant obligatoire pour être fonctionnaire. Le même cloisonnement est valable du côté lettonophone. La campagne du référendum a d’ailleurs été marquée par de nombreux rappels au joug soviétique dont le pays a été victime pendant cinq décennies.

Avec une meilleure reconnaissance de la minorité russophone, les tensions entre les communautés pourraient s’apaiser. La Lettonie aurait en effet beaucoup à gagner avec la reconnaissance du russe comme langue officielle : “les Russes de Lettonie sont prêts à travailler pour la Lettonie, mais il faut qu’ils aient les mêmes droits et qu’ils ne soient pas considérés comme des citoyens de seconde zone” , déclare Vladimir Lindermans.

L’Europe comme solution ?

L’Europe pourrait alors être l’une des voies de progrès possible pour la résolution du conflit linguistique letton. Un fort sentiment européen et occidental existe en Lettonie depuis la fin de la Guerre froide, et la ratification d’une norme comme la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires pourrait constituer un premier pas en avant important. A l’échelle régionale, il convient également de souligner que les échanges entre les Lettons et les habitants des deux autres Etats baltes se font essentiellement en russe.

Cependant, dans l’attente d’une éventuelle évolution positive, force est de constater que la victoire du “non” à 74,62% au référendum du 18 février demeure sans appel quant à la volonté de la majorité du pays de rejeter l’influence du russe. Le fait que le parti russophone “Centre de l’Harmonie” (gauche) n’ait pas pris part à la coalition gouvernementale en dépit de sa première place aux élections législatives de septembre 2011 est un autre signe attestant de la méfiance des lettonophones.

En savoir plus

Discours nationaliste et politique linguistique en Lettonie indépendante - Sergueï Panov - 24/08/2008

Sources

Le russe, langue officielle dans l’UE ? - 17/02/2012 - Presseurop
La Lettonie rejette une nouvelle fois ses russophones - 20/02/2012 - Libération

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