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Le Conseil européen des 21 et 22 juin : enjeux et perspectives


Les 27 chefs d’Etat et de gouvernement se réunissent jeudi et vendredi à Bruxelles afin de tenter de relancer les négociations sur les réformes de l’Union et de trouver une solution pour sortir de l’impasse institutionnelle.

Objectif : réformer les institutions

Deux ans après l’ouverture de la période de réflexion entamée suite aux “non” français et néerlandais de mai et de juin 2005, l’idée d’un traité simplifié proposée par Nicolas Sarkozy, semble désormais s’imposer comme une solution pour sortir du blocage. Mais si les 27 semblent s’accorder sur la forme, d’importantes divergences demeurent sur le fond.

Conscients des risques d’enlisement si aucun texte de compromis n’est trouvé, Paris et Berlin ont multiplié les entretiens bilatéraux afin de préparer le terrain des négociations pour le Conseil européen à venir.

C’est ainsi que le président de la République s’est entretenu avec bon nombre de ses homologues européens parmi lesquels : Romano Prodi, José-Luis Zapatero, José Socrates, Tony Blair, Lech et Jaroslaw Kaczynski, ou encore Jan-Peter Balkenende.

La révision des traités : comment ça marche ?

Le dispositif de révision des traités est inscrit dans le Traité sur l’Union européenne (art. 48 TUE) ; c’est au Conseil européen, autrement dit aux chefs d’Etat et de gouvernement, qu’il appartient de décider des modifications à apporter. Ces modifications ne peuvent entrer en vigueur qu’après avoir été ratifiées par tous les Etats membres. Ces derniers sont ensuite libres de choisir le mode de ratification : référendum ou vote au Parlement.

Afin d’effectuer les réformes institutionnelles nécessaires, le Conseil européen se doit d’aboutir à un consensus sur les dispositions du futur traité. Ainsi, seul un accord à l’unanimité sur un futur traité pourra permettre de débloquer la situation ; auquel cas, les chefs d’Etat et de gouvernement pourraient décider de convoquer une nouvelle Conférence intergouvernementale (CIG) afin d’adopter définitivement le nouveau traité.

Conseil européen / CIG : quelles différences ?

Le Conseil européen désigne la réunion des chefs d’Etat ou de gouvernement des Etats membres de l’Union européenne. Son rôle est de donner à l’Union européenne les impulsions nécessaires à son développement et de définir les orientations politiques générales.

Le terme “conférence intergouvernementale” (CIG) désigne une négociation entre les gouvernements des Etats membres dont l’objectif est d’apporter des modifications aux traités.

Des points de désaccord persistants

Réunis le 17 juin 2007 en Conseil Affaires générales à Luxembourg, les ministres européens des Affaires étrangères se sont montrés confiants quant à la possibilité pour le Conseil européen de parvenir à un accord qui satisfasse tout le monde malgré de nombreux points de désaccord persistants.

Parmi les points les plus sensibles figurent le système de calcul des votes au Conseil et l’inclusion de la Charte des droits fondamentaux.

La Pologne semble s’opposer à la réforme du système de vote au Conseil, telle qu’envisagée par le Traité constitutionnel soit maintenue (système à la double majorité plus représentatif de la taille de la population) et souhaite au contraire un nouveau dispositif dans lequel les voix seraient attribuées en fonction de la racine carrée de la population des Etats.

Le système de vote au Conseil

Le dispositif actuel issu du Traité de Nice prévoit un système de “pondération” des voix en fonction de la population des Etats ; avec ce système la Pologne bénéficie de 27 voix au Conseil, la France, l’Allemagne, le Royaume-Uni et l’Italie de 29 voix.

Le Traité constitutionnel prévoyait quant à lui un système de vote à la double majorité : 55 % des Etats et 65 % de la population, ce qui aurait proportionnellement diminué le nombre de voix de la Pologne et augmenté celui de l’Allemgane.

Le Royaume-Uni ne serait quant à lui pas favorable à l’inclusion de la Charte des droits fondamentaux proclamée solennellement lors du Conseil européen de Nice en décembre 2000. Cette charte n’a, à ce jour, aucune valeur juridique. L’intégration de la Charte dans le Traité constitutionnel aurait permis à ce texte d’être juridiquement contraignant ; les Etats auraient ainsi été tenus de respecter ce texte. Afin de concilier les exigences britanniques et le souhait émis par d’autres Etats de rendre cette Charte juridiquement contraignante, le Présidence allemande propose que le futur traité fasse référence à la Charte qui serait annexée au traité, ce qui laisserait la possibilité d’un “opt-out” pour le Royaume-Uni.

Les ministres européens des Affaires étrangères semblent cependant s’être mis d’accord sur l’abandon de dispositions prévues par le Traité constitutionnel jugées trop “supranationales” :

les symboles de l’Union (drapeau et hymne européens) ;
le terme “Constitution” ;
l’appellation “ministre” pour la personne qui sera choisie pour représenter l’Union européenne dans les négociations internationales.

D’autres sujets de discussion tout aussi épineux attendent encore les chefs d’Etat et de gouvernement jeudi et vendredi : primauté du droit communautaire, rôle des Parlement nationaux, répartition des compétences entre l’Union européenne et les Etats membres, extension du champ de décision à la majorité qualifiée, politique étrangère et de sécurité commune (PESC)…

Quelques dispositions controversées du Traité constitutionnel

Les symboles de l’Union européenne : l’Union européenne dispose déjà de symboles : un drapeau représentant un cercle de douze étoiles sur fonds bleu, un hymne (“Ode à la Joie” de Beethoven), une monnaie unique : l’Euro, une journée européenne le 9 mai et une devise “Unie dans la diversité” . Ces symboles devaient être formellement inscrits dans le Traité constitutionnel ;

Le terme Constitution : faisant trop référence à des formes d’organisation étatique, il devrait être supprimé ;

Le ministre des Affaires étrangères de l’Union européenne : si les Etats membres ne semblent pas contester l’opportunité de créer un tel poste pour que l’Union puisse parler d’une seule voix dans les négociations internationales, le titre de “ministre” devrait être modifié ;

La primauté du droit communautaire : reconnue dès 1963 par la Cour de justice des Communautés européennes, ce principe devait figurer dans le Traité constitutionnel ;

Le rôle des Parlements nationaux : le Traité constitutionnel prévoyait de le renforcer : meilleure association au processus législatif européen, contrôle de l’application du principe de subsidiarité. Ces pouvoirs pourraient encore être accrus dans le futur traité avec par exemple, un rallongement du délai laissé aux parlements nationaux pour examiner un texte (8 au lieu de 6 semaines) ;

La répartition des compétences : le Traité constitutionnel propose une clarification de la répartition des compétences entre Union européenne et Etats membres ;

L’extension du champ de décision à la majorité qualifiée : le Traité constitutionnel faisait de la majorité qualifiée le mode de décision “ordinaire” et diminuait par conséquent les domaines soumis à l’unanimité ;

La politique étrangère et de sécurité commune (PESC) : introduit par le Traité de Maastricht, ce domaine relève pour l’instant de la seule compétence des Etats. Le Traité constitutionnel, en supprimant les trois piliers existants, proposait que l’Union européenne, et plus seulement les Etats, puisse intervenir dans ce domaine.

Les 27 doivent également se pencher sur la possibilité de doter le Conseil européen d’une présidence stable, d’une durée minimale de 2 ans, afin de remplacer le système actuel de présidence tournante de 6 mois qui devrait rapidement montrer ses limites dans une Europe élargie. Le premier ministre britannique Tony Blair, qui assistera à son dernier Conseil européen, semblerait de plus en plus pressenti pour occuper ce poste.

Pour préparer le sommet qui a débuté jeudi 21 juin à 18h, la présidence allemande a distribué à ses partenaires, mardi 19 juin, un projet de mandat de négociation pour la CIG, fruit des entretiens bilatéraux d’Angela Merkel avec ses différents partenaires. Ce document de 11 pages confirme l’abandon définitif du terme “Constitution européenne” , des symboles de l’Union, mais aussi de l’ambition, née à Laeken en 2001, de fusionner les deux traités existants en un texte unique.

C’est donc une boîte de Pandore que le Conseil européen s’apprête à ouvrir avec, à la clé, la poursuite des négociations et des réformes pour une Europe plus fonctionnelle, plus efficace et plus démocratique.

Sources

Sommet européen : le président du Parlement adresse un message fort - Communiqué de presse - 21/06/07 - Parlement européen
Ne pas laisser passer les chances de l’Europe - Communiqué de presse - 21/06/07 - Présidence allemande
La chancelière Angela Merkel invite les chefs d’État et de gouvernement au Conseil européen les 21 et 22 Juin 2007 à Bruxelles - Communiqué de presse - 20/06/07 - Présidence allemande
Sommet européen : le président du Parlement adresse un message fort - Communiqué de presse - 21/06/07 - Parlement européen
Rencontre interparlementaire sur l’avenir de l’Europe : préserver la substance de la constitution - Communiqué de presse - 12/06/07- Parlement européen
Députés européens et nationaux débattent de l’avenir de l’Europe - Communiqué de presse - 12/06/07- Parlement européen

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