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L’Europe fait rêver la Moldavie

A l’occasion de la visite du Premier ministre moldave Vlad Filat, Presseurop et le CAPE ont organisé une conférence de presse pour mettre en avant ce pays situé aux portes de l’Europe mais encore méconnu. Le Premier ministre a dressé un Etat des lieux de la situation économique et politique, et insisté sur la vocation européenne de son pays. La coalition au pouvoir, que préside M. Filat, s’est baptisée “Alliance pour l’intégration européenne”. Tout un programme.

Le lourd héritage de l’ex-URSS

Gangrenée par la corruption et les trafics, en crise politique ouverte depuis l’indépendance autoproclamée il y a 20 ans de sa partie orientale la Transnistrie… La Moldavie ne manque pas de défis à relever. Le Premier ministre en a bien conscience, qui insiste sur les progrès à faire pour atteindre les standards de l’Union européenne. Il n’en reste pas moins que le petit pays, voisin de la Roumanie, ne cache pas ses ambitions. Prochaine étape sur le chemin de l’adhésion : la signature d’un accord d’association qui viendrait remplacer l’accord de partenariat en vigueur.

Les négociations sont actuellement en cours en vue de la signature de ce nouvel accord. En attendant, le gouvernement moldave multiplie les gages de bonne volonté vis-à-vis des autorités de l’Union. A commencer par la relance de l’économie, en partenariat avec le FMI et la Banque mondiale. Le Premier ministre souligne également ses efforts en matière de sécurisation des frontières : “nous avons mis en place plusieurs mesures de sécurité qui ne nous ont pas été imposées, en vue d’obtenir le régime de libre-circulation. Nous aurons par exemple des passeports biométriques à partir de 2011” .

La Transnistrie a déclaré son indépendance en 1990. Elle n’est pas reconnue par l’Union européenne, et refuse son rattachement à la Moldavie. En savoir plus.


D’autres problèmes demeurent, et de taille. La Moldavie n’a pas de président stable, du fait d’une majorité trop faible pour l’élire au Parlement - il lui faut réunir 3/5e des voix des députés. Mais le plus gros fardeau de Vlad Filat, c’est la Transnistrie. Cette région orientale, qui s’étend tout en longueur sur une surface de 4 163 km² s’est autoproclamée indépendante il y a 20 ans, et n’a jusqu’à aujourd’hui été reconnue que par les petites républiques d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud, toutes deux dans une situation similaire.

La Transnistrie, “trou noir” de l’Europe


Le Premier ministre se montre lucide sur les faibles chances du règlement de ce conflit à court terme, mais s’inscrit dans une démarche ouverte : “le conflit doit être résolu pacifiquement et durablement avec l’aide de nos partenaires, la seule approche envisageable étant le dialogue et la négociation avec les autorités - même si elles ne sont pas reconnues” . Un dialogue qui doit d’abord être au service d’une amélioration de la qualité de vie, “par exemple avec la réouverture de la ligne de train entre Chisinau et Odessa, qui passe par la Transnistrie. Nous avons également parlé de la remise en route des trains de marchandises, et du problème des communications téléphoniques car la situation est aberrante : pour communiquer avec des Moldaves, les habitant doivent utiliser des suffixes et passer par la Russie ou par un autre pays” .

L’invitation faite par le président transnistrien, Igor Smirnov, ne sera acceptée par la Moldavie que sous certaines conditions : “un ordre du jour très clair, avec la perspective de réouverture des négociations dans le format 5+2” . Ces négociations internationales avec la médiation de la Russie, de l’Ukraine, de l’OSCE, des Etats-Unis et de l’Union européenne avaient été suspendues en 2006 par la Transnistrie qui accusait son voisin de blocus économique.

Vlad Filat n’hésite pas à invoquer le rôle de l’Europe dans le règlement définitif du conflit, estimant qu’un signal clair de la part des Vingt-Sept “pourrait être un argument fort non seulement pour le processus de transformation intérieure, mais aussi pour le processus d’unification du pays” qui ne sont pas “parallèles” mais “interdépendants” .

Appel du pied à l’Union qui pourrait s’avérer particulièrement efficace dans le contexte de la prochaine présidence polonaise, même si le Premier ministre insiste sur le soutien unanime qu’il aurait reçu des Etats membres : “nous avons organisé une réunion le 30 septembre 2010 où les représentants de 24 pays européens ont participé, seuls trois pays n’ont pas pu déléguer de représentant, et ce pour des questions d’organisation” .

La Moldavie, prochaine candidate à l’adhésion ?


Une bonne image que la Moldavie entretient pour aller au-devant des craintes européennes en matière d’immigration. L’entrée prochaine de la Roumanie dans l’espace Schengen fera de sa frontière avec la Moldavie un point de passage stratégique. Mais M. Filat se veut rassurant, insistant sur la capacité de son pays à contrôler ses frontières.

“50% des élèves étudient le français comme première langue étrangère et 1 200 jeunes font leurs études supérieures en France” .

Reste la question de l’échéance. Le Polonais Donald Tusk - l’un des avocats les plus fervents de la Moldavie - a invité son homologue à profiter de la présidence de son pays pour présenter officiellement la candidature moldave. Si le Premier ministre reste évasif - le pays adhérera “lorsqu’il sera prêt” , il multiplie les initiatives en faveur du rapprochement UE-Moldavie.

Une stratégie dans laquelle s’inscrit son voyage en France, pays qu’il n’a pas choisi par hasard. Tout comme la Roumanie, la Moldavie est un îlot de latinité dans une zone majoritairement slavophone et les liens culturels sont forts : “nous sommes membres de l’Organisation internationale de la Francophonie. Plus de 50% des élèves étudient le français comme première langue étrangère et 1 200 jeunes font leurs études supérieures dans les établissements français” , souligne le ministre.

Mais les liens sont aussi économiques - de nombreuses entreprises françaises sont présentes en Moldavie - et politiques. Sur ce dernier point, Vlad Filat met en garde : “nous comprenons bien que la situation dans le Sud génère une vague d’émotion qui amène à réviser la politique de voisinage de l’UE. Mais je considère qu’elle ne devrait pas être vue à travers le prisme historique” .

Plus d’un tiers des moldaves affirme avoir été victime de corruption au cours de l’année 2010, et le fonctionnement des institutions reste imparfait. Ces sont les deux chantiers principaux dans lesquels le gouvernement moldave va devoir poursuivre son engagement. “Le pays a encore beaucoup de progrès à faire pour atteindre les standards de l’Union européenne, notamment en matière de droits de l’Homme” reconnait Vlad Filat. Mais le pays semble s’inscrire dans une dynamique favorable, et pourrait s’avérer être un Etat test pour le succès de la politique de partenariat oriental de l’Union.

En savoir plus

La Moldavie, un succès européen majeur pour le Partenariat oriental ? - Fondation Robert Schuman

Parcours européen de la Moldavie - Jerzy Buzek, président du Parlement européen

Baromètre mondial de la corruption - Transparency International

UE Partenariat Oriental : quelles perspectives ? - DiploWeb

Les marges orientales de l’Union européenne : un voisinage inconfortable - DiploWeb

La tentation de Moscou - Presseurop

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