La 8ème édition de “L’opinion européenne” dresse, au fil d’une vingtaine d’articles de chercheurs et d’universitaires, un panorama des points de vue et des comportements des citoyens européens sur des thèmes variés, de la fiscalité à la culture ou aux élections en Europe. On y apprend par exemple qu’en 2006, les revendications pour un salaire minimum européen se sont accentuées en Europe, que l’abstention aux diverses échéances électorales s’est élevée à 27,04 %, que plus de 8 européens sur 10 ont regardé, ne serait-ce qu’une minute, la coupe du monde de football, et que l’Européen moyen mesure 169,9 cm.
Cependant, plus qu’une simple énumération des humeurs et attitudes européennes, le collectif d’auteurs s’attache à mettre en relief les lignes directrices qui naissent de la confrontation des opinions nationales. Ils font ainsi apparaître l’esquisse d’une véritable opinion européenne et invitent à la réflexion sur le “vivre européen” et sur le devenir de la construction européenne.
Quelle puissance pour l’Europe ?
L’article introductif d’Alain Lancelot, professeur émérite des universités et président du Comité scientifique de la Fondation Robert Schuman, dresse le portrait d’une Europe en opposition avec la forme de puissance dont se prévalent les Etats-Unis et les Empires traditionnels. De façon inédite, l’Europe se construit en complémentarité avec les Etats nations. Sa légitimité est rationnelle et peut ainsi se greffer à la légitimité traditionnelle des Etats. Le principe de subsidiarité est la clef de voûte de cette nouvelle forme de puissance.
De là, naît une explication des causes des résistances françaises. L’émergence de pouvoirs locaux est vécue comme une série de coups portés à l’encontre du “Grand tout” un et indivisible qu’est la République française. Alain Lancelot établit un diagnostic de l’Europe actuelle, constate la vitalité des nations et, en parallèle, l’affirmation renforcée de l’Identité européenne. Selon lui, seule la France place ces deux appartenances en opposition.
Le Bug 2006 : changer le logiciel européen
Dans un article intitulé “Union européenne : le bug 2006” , Yves Bertoncini et Thierry Chopin, enseignants à Sciences Po, analysent l’impasse dans laquelle se trouve l’UE après l’échec de la ratification du Traité constitutionnel. Pour eux, le malaise est avant tout “d’ordre psychologique et conceptuel” . Ce qui est en jeu désormais est la “capacité de l’UE à obtenir l’adhésion des peuples qu’elle a vocation à servir, en tirant les conséquences politiques des signaux qui lui ont été adressés en 2005” .
Or, l’année de réflexion que s’était donnée l’UE pour répondre à cette question n’a abouti à aucune proposition tangible. Ce “bug” a, pour les auteurs, des origines économiques, politiques et géopolitiques. Toutes témoignent du désarroi des dirigeants et de leur incapacité à innover dans la résolution des problèmes.
Pour les auteurs, il faut désormais “changer de logiciel” : la “crise existentielle” de l’UE ne sera surmontée que si celle-ci est capable de se “transformer assez” pour répondre aux défis du XXIe siècle.
Dominique Reynié (dir.), L’opinion européenne en 2007, La Table ronde / Fondation Robert Schuman, 2007