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Elargissement de l'UE : pourquoi l'adhésion de l'Ukraine, de la Moldavie et de la Géorgie va prendre du temps

En début d’année 2022, l’Ukraine, la Moldavie et la Géorgie ont envoyé leur candidature d’adhésion à l’UE. Elles ont depuis obtenu le statut de candidat de la part des Vingt-Sept. Mais le processus d’intégration à l’Union européenne est long et exigeant.

Aujourd’hui, l’Ukraine, la Géorgie et la Moldavie souhaitent rejoindre l’Union européenne, notamment pour se protéger de la menace russe - Crédits : montage Toute l’Europe

Tout s’est accéléré à la suite de l’invasion de Ukraine par la Russie, le 24 février 2022. L’UE ayant rapidement accordé son soutien à Kiev, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a signé une demande d’adhésion à l’Union européenne le 28 février. 

Une candidature suivie par celles de la Moldavie et de la Géorgie le 3 mars 2022. Ces anciennes républiques soviétiques craignent d’être les prochaines cibles de Vladimir Poutine. Le 23 juin, les chefs d’Etat et de gouvernement des Vingt-Sept ont accordé le statut de candidat à l’adhésion européenne à l’Ukraine et à la Moldavie. Mais pas à la Géorgie, car des efforts supplémentaires lui ont été demandés. 

Moins d’un an et demi plus tard, le 8 novembre 2023, la Commission européenne a recommandé aux Vingt-Sept d’ouvrir les négociations d’adhésion avec l’Ukraine et la Moldavie, et d’attribuer le statut de candidat à la Géorgie. Le Conseil européen du 14 décembre a ensuite marqué un grand pas pour l’intégration de ces trois pays à l’UE : suivant la préconisation de la Commission, les chefs d’Etat et de gouvernement se sont accordés pour ouvrir ces négociations d’adhésion avec l’Ukraine et la Moldavie et attribuer le statut de candidat officiel à la Géorgie.

Un processus long

La procédure d’adhésion prend en règle générale plusieurs années. L’intégration à l’UE est un processus au long cours : le droit du pays candidat doit devenir conforme au droit européen, ce qui donne lieu à des négociations souvent complexes. Si les premières vagues d’élargissement à l’Ouest avaient pu être achevées relativement rapidement, les exemples plus récents ne manquent pas pour illustrer l’important délai qui peut exister entre le dépôt de candidature et l’adhésion officielle à l’UE :

  • La Hongrie et la Pologne ont envoyé leur demande d’adhésion en 1994 et ont intégré l’Union seulement en 2004 ;
  • La Roumanie et la Bulgarie ont adressé leur candidature à l’Union européenne en 1995 et ont finalement adhéré en 2007 ;
  • La Croatie a présenté sa demande d’adhésion en 2003 et a rejoint l’Union en 2013.

Pourquoi l’intégration demande-t-elle du temps ?

La Commission européenne doit d’abord rendre un avis sur chacune des demandes d’adhésion après les avoir examinées. Ce qu’elle a fait le 17 juin 2022 pour les candidatures ukrainienne, moldave et géorgienne, dans un délai particulièrement rapide. L’avis était positif pour les deux premières, mais négatif pour la dernière. 

Une fois l’avis rendu par l’exécutif européen, les candidatures doivent être acceptées à l’unanimité par les Etats membres. Le pays obtient alors le statut de candidat à l’adhésion. Le 23 juin 2022, là encore avec une certaine rapidité, les Vingt-Sept ont attribué ce statut à l’Ukraine et à la Moldavie. 

Le processus d’intégration donne ensuite lieu à des négociations généralement longues et complexes. Leur ouverture doit, encore une fois, être acceptée à l’unanimité par les Vingt-Sept après avis de la Commission. Et les négociations d’adhésion ne peuvent aboutir à une intégration dans l’UE qu’avec, de nouveau, l’accord de tous les pays de l’UE.

Pour adhérer à l’UE, le pays doit notamment satisfaire trois grands critères (les “critères de Copenhague”) conditionnant son intégration :

  • Des institutions stables garantissant la démocratie, l’état de droit, les droits de l’homme et le respect et la protection des minorités ;
  • Une économie de marché viable et la capacité de faire face à la concurrence et au marché de l’Union européenne ;
  • L’acquis communautaire, c’est-à-dire la capacité de mettre en œuvre les obligations découlant de l’adhésion, et notamment de souscrire aux objectifs de l’Union politique, économique et monétaire.

Quels obstacles à l’intégration pour l’Ukraine, la Moldavie et la Géorgie ?

Plusieurs difficultés importantes marquent ces trois candidatures. Pour l’Ukraine, il s’agit en premier lieu de la guerre qui l’oppose depuis le 24 février à la Russie. Il apparaît particulièrement difficile de garantir des institutions stables et une économie viable lorsqu’un pays est en proie à un conflit armé.

En outre, les pays de l’ex-URSS subissent une forte corruption. Selon le baromètre mondial de la corruption de 2021 établi par l’ONG Transparency International, l’Ukraine en particulier est le pays d’Europe le moins bien classé, avec un score de 32 sur 100 (et de 36 pour la Moldavie). La candidature de la Géorgie a aussi pâti de certains liens conservés par les milieux politiques et économiques avec la Russie.

Enfin, la Moldavie apparaît comme l’un des pays les plus pauvres d’Europe. Et l’économie de l’Ukraine, qui ne répondait pas encore aux critères d’intégration, est lourdement affectée par la guerre. 

Où en sont-ils vis-à-vis de l’UE ?

L’Ukraine a signé un accord de partenariat et de coopération bilatéral avec l’UE en 1994. Elle a ensuite souscrit à l’objectif d’une adhésion à long terme. En 2005, le Plan d’action conjoint UE-Ukraine, destiné à servir de cadre aux réformes à effectuer dans le pays pour un rapprochement avec l’Union, a été adopté. Des négociations sur un accord d’association ont été lancées en 2007, mais le texte n’a été signé qu’en 2014. Ce traité vise à renforcer les liens politiques et économiques de l’UE et de l’Ukraine. Quatre jours après l’offensive lancée par la Russie, Kiev a effectué une demande officielle d’adhésion le 28 février 2022. Après un avis positif de la Commission européenne le 17 juin 2022, le Conseil européen a à son tour validé la candidature ukrainienne le 23 juin 2022. Après une recommandation de la Commission européenne du 8 novembre 2023, les Etats membres ont annoncé l’ouverture des négociations d’adhésion avec l’Ukraine le 14 décembre.

La Moldavie a de son côté signé un accord d’association avec l’UE en 2014, en même temps que l’Ukraine et la Géorgie, dans le cadre du Partenariat oriental auquel participent les trois pays. La Moldavie a déposé sa candidature à l’adhésion le 3 mars, comme la Géorgie. Le 17 juin 2022, Ursula von der Leyen déclare “qu’elle a le potentiel pour répondre aux critères”. Comme pour l’Ukraine, les Etats membres lui ont accordé le statut de candidat à l’adhésion le 23 juin 2022. Et le 8 novembre 2023, la Commission a aussi préconisé le lancement des négociations d’adhésion avec le pays. Comme pour l’Ukraine, le Conseil européen du 14 décembre a entériné la recommandation de l’exécutif, les Etats membres s’étant accordés pour débuter ces négociations avec Chișinău.

Au cours des années 1990, l’UE et la Géorgie se sont également rapprochées. C’est en 1999 qu’un accord bilatéral de partenariat et de coopération a été signé. En 2008, lors de la guerre russo-géorgienne, l’UE a condamné le recours à la force de la Russie. En 2014, le Parlement européen a souligné, conformément à l’article 49 du traité sur l’Union européenne, la “perspective européenne” de la Géorgie - tout comme celles de la Moldavie et de l’Ukraine - qui peut ainsi demander à devenir membre de l’UE. 

Des relations plus étroites ont été nouées avec l’entrée en vigueur en 2016 d’un accord d’association entre l’UE et la Géorgie (similaire à celui signé avec l’Ukraine). Alors que le gouvernement géorgien avait émis l’intention de présenter sa candidature à l’UE en 2024, il a emboîté le pas à Kiev et fait acte de candidature pour l’entrée dans l’Union le 3 mars 2022. Mais contrairement à l’Ukraine et à la Moldavie, le pays n’avait pas obtenu d’avis positif de la Commission en juin 2022. Les Etats membres ne lui avaient alors pas accordé le statut de candidat à l’adhésion et lui avaient demandé des efforts supplémentaires. En cause notamment : une orientation du gouvernement de plus en plus pro-russe et des atteintes répétées à l’état de droit. La Commission est cependant revenue sur sa position le 8 novembre 2023, en recommandant aux Vingt-Sept d’attribuer le statut de candidat à Tbilissi. Les Etats membres ont ensuite emboîté le pas à l’exécutif européen, en octroyant ce statut officiel de candidat à la Géorgie le 14 décembre.

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