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Brexit : les 10 principaux points de négociation entre l’Europe et le Royaume-Uni

L’heure du Brexit est arrivée. Ce lundi 19 juin, les négociations officielles commencent entre l’Union européenne et le Royaume-Uni. L’article 50 du TFUE donne aux diplomates et aux politiques des deux côtés deux ans pour clôturer tous les dossiers que Londres et Bruxelles géraient en commun depuis plus de 40 ans. La liste des sujets à traiter est longue. Pour vous, Toute l’Europe en a sélectionné dix qui, tôt ou tard, feront objet de débat en Europe et outre-Manche. De la pêche à Gibraltar, en passant par le programme Erasmus et la politique de défense : tour d’horizon des principaux points de négociations.

Brexit

1. Le solde de tout compte

Comme tout divorce, le Brexit aussi a un coût. En tant que membre de l’Union européenne, le Royaume-Uni contribue au budget européen qui finance les activités communes. Avant de pouvoir quitter le club, Bruxelles demande donc à Londres de remplir ses engagements et de verser sa contribution déjà prévue dans le budget actuellement en cours (2014-2020). Cela permettra de poursuivre les programmes financés par l’UE, sur le continent comme au Royaume-Uni, jusqu’à la définition du prochain budget.

C’est comme au bar, vous ne pouvez pas partir tant que vous n’avez pas payé la tournée que vous avez commandée” , a expliqué le porte-parole de la Commission européenne Margaritis Schinas. Combien Londres doit alors payer ? Le montant de la note fait justement l’objet des négociations. On l’estime entre 60 et 80 milliards d’euros, mais cela dépendra de l’accord. Enfin, le Royaume-Uni est-il obligé de payer ? Non, mais un refus sur ce point porterait véritablement à un “No-Deal” , une sortie de l’UE sans accord.

2. La liberté de circulation

L’immigration a été l’un des sujets majeurs de la campagne référendaire de 2016. Les partisans du “Leave” (quitter) assuraient qu’en sortant de l’UE, le Royaume-Uni pouvait empêcher aux ressortissants européens de se rendre sur son territoire. Mais est-ce possible et quelles en seraient les conséquences ? Aujourd’hui, quelque 3 millions de citoyens européens habitent au Royaume-Uni, tandis que 1,2 million de Britanniques vivent dans un autre pays de l’UE. Dans le cadre de l’accord du Brexit, les règles qui seront imposées aux premiers vaudront aussi pour les deuxièmes. L’ambition des partisans du Leave pourrait donc se heurter aux intérêts de leurs compatriotes résidant en Espagne, en Irlande, en France ou encore en Allemagne.

3. L’Irlande

Le Royaume-Uni partage avec l’Union européenne une seule frontière terrestre (si l’on exclut le cas de Gibraltar, analysé plus bas) : celle qui sépare la République irlandaise de l’Irlande du Nord. Il s’agit d’une ligne de démarcation parmi les plus sensibles en Europe, où une guerre civile sanglante a eu lieu jusque dans les années 1990. Le Brexit pourrait provoquer ici des conséquences particulièrement lourdes. La sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne pourrait en effet signifier le retour d’une frontière renforcée entre Dublin et Belfast.

Un scénario qui semble plus probable depuis que la Première ministre britannique Theresa May a formé une coalition de gouvernement avec le Parti démocratique d’Irlande du Nord (DUP), une formation unioniste, protestante et très conservatrice. En Irlande du Nord, pourtant, les électeurs avaient voté majoritairement pour rester dans l’UE (55,8% contre 44,2%) et dans la circonscription de Derry/Londonderry, la ville symbole du conflit, près de quatre habitants sur cinq (78,3%) s’étaient exprimé contre le Brexit. Accepteront-ils le retour d’une frontière ?

4. La pêche

Le Royaume-Uni partage un deuxième type de frontière avec l’Union européenne, maritime cette fois. Les eaux de la Manche, de la mer du Nord et de la mer d’Irlande sont particulièrement importantes pour les pêcheurs européens, et notamment français. La Politique commune de la pêche (PCP) leur permet en effet de pêcher dans les eaux britanniques, et on estime que entre 30 et 50% des poissons capturés par les marins français proviennent de ce côté de la Manche. Avec le départ de Londres de l’UE et de la PCP, ces zones de pêche pourraient devenir inaccessibles aux marins européens, avec un impact considérable sur le secteur.

Tout dépendra encore une fois des négociations, et les pêcheurs espèrent pouvoir compter sur deux figures clés de la diplomatie française et européenne : l’ancien ministre français à l’Agriculture et de la Pêche Michel Barnier, devenu négociateur de la Commission européenne pour le Brexit, et l’ancien président de la région Bretagne (première région de France pour la pêche) Jean-Yves Le Drian, qui occupe aujourd’hui le poste de ministre de l’Europe et des Affaires étrangères.

Etalages de homards à Lorient - Crédits : Giovanni Vale

5. Le marché unique

Grand atout de l’Union européenne, le marché unique représente une communauté d’environ 500 millions de personnes. Pour tout producteur, cet espace de libre échange est un marché prioritaire et il en va de même pour le Royaume-Uni, qui exporte près de la moitié de ses produits vers l’Union européenne. En début d’année, Theresa May a annoncé qu’avec le Brexit, Londres aurait quitté le marché unique, mais suite au résultat des élections anticipées du 8 juin, sa position pourrait changer. En quittant cet espace de libre échange, le Royaume-Uni pourrait limiter l’accès à son territoire pour les citoyens européens (voir point 2), mais il ferait face à des barrières tarifaires et, en outre, serait obligé de respecter les règles de l’UE concernant les produits sans possibilité d’intervention.

6. Erasmus

Célèbres et réputées, les universités britanniques attirent chaque année des milliers d’étudiants européens. S’ils partent dans le cadre du programme Erasmus, qui fête en 2017 ses 30 ans, ou dans le cadre d’autres bourses et projets, ils sont exemptés de droits d’inscription, qui demeurent très élevés au Royaume-Uni. Le Brexit pourrait ainsi provoquer une chute dans les inscriptions dans les universités britanniques, mais aussi le départ des 32 000 citoyens européens qui travaillent dans le monde académique outre-Manche. Une enquête récemment publiée par le University and College Union (UCU) indique en effet que 76% de ces professeurs et chercheurs venant du continent considèrent d’ores-et-déjà un éventuel déménagement. Enfin, les mêmes inquiétudes hantent les étudiants et universitaires britanniques installés en Europe. Et qu’en serait-il des programmes de recherches transfrontaliers et de financements dont ils bénéficient ?

7. La sécurité

Et le Royaume-Uni et l’Union européenne ont intérêt à continuer leur collaboration en matière de lutte contre la criminalité et le terrorisme, notamment après les récents attentats qui ont frappé Londres et Manchester. Cependant, le Brexit pourrait avoir des conséquences dans les secteurs où les échanges d’information sont centralisés par l’UE. C’est le cas du Système informatif de Schengen (SIS) auquel Londres avait accès même sans être membre de cet espace. Etant donné que cette base de données n’est pas accessible aux pays tiers, une négociation s’impose sur ce point. Et il en va de même pour l’agence Europol, dirigée en ce moment par un Britannique, ainsi que pour le système du mandat d’arrêt européen.

Theresa May et Michel Barnier

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8. La défense

Avec le départ du Royaume-Uni, l’Union européenne perd sa plus grande force militaire. Consacrant plus de 2% de son PIB à sa défense (comme seulement l’Estonie et la Grèce le font dans l’UE), le gouvernement britannique entretient une armée de 200 000 hommes. Ce départ suppose donc un changement important pour la sécurité du continent, que les autres Etats membres de l’UE devront en prendre compte en s’organisant différemment. Cela est notamment vrai pour la France, qui devient ainsi la seule puissance nucléaire de l’UE. Quelle collaboration sera-t-elle établie entre le Royaume-Uni et les 27 pays de l’UE ? Et comment ces derniers gèreront-ils leur défense commune ? Autant de questions stratégiques qu’impose le Brexit.

9. La Cour de justice européenne (CJUE)

Libérer le Royaume-Uni de l’emprise de la Cour de justice européenne” . Tout comme “la fermeture des frontières à l’immigration” , ce slogan a été l’un des plus répétés durant la campagne référendaire de 2016. Pour l’UE cependant, il est impératif que la CJUE puisse encore protéger les droits des 3 millions d’Européens vivant sur le sol britannique. La Cour, qui veille à l’application du droit de l’Union et à l’uniformité de son interprétation sur le territoire dans les 28, restera donc présente au Royaume-Uni jusqu’à sa sortie. En plus, note le quotidien The Guardian, tout accord de commerce négocié dans le futur entre Bruxelles et Londres impliquera nécessairement la supervision d’un organisme tiers, comme la CJUE.

10. Gibraltar

Enclave britannique en Espagne depuis 1713, Gibraltar risque de peser lourd dans les négociations du Brexit. Ses habitants ont voté presque à l’unanimité pour rester dans l’UE (96%), mais le résultat du vote pourrait maintenant les “éloigner” de l’Espagne. Madrid aura d’ailleurs son mot à dire sur la question, car son approbation est nécessaire pour valider l’accord qui résultera des négociations entre Bruxelles et Londres. Concernant Gibraltar, l’Espagne a d’ores-et-déjà proposé une “souveraineté partagée” , une proposition sur laquelle les 32 000 résidents de l’enclave s’étaient déjà exprimés en 2002, en votant “non” à 98%.

Par Giovanni Vale

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