Les Etats et leurs administrations interviennent à plusieurs étapes de la prise de décision européenne. Et notamment au sein de deux des sept institutions de l’Union européenne : le Conseil de l’Union européenne et le Conseil européen.
Le Conseil de l’Union européenne
Dans le cadre de la procédure législative ordinaire, principal manière d’adopter des textes législatifs des institutions de l’UE, chaque proposition de la Commission européenne arrive, après un vote du Parlement européen, sur la table de travail du Conseil de l’UE.
Une fois que le Parlement européen a adopté un texte proposé par la Commission, c’est au tour du Conseil de l’UE de l’étudier en première lecture. Cette institution s’organise autour de 10 formations thématiques, dans lesquelles se retrouvent les ministres des 27 Etats membres en charge de ces questions (par exemple les ministres de l’Environnement pour une législation sur les émissions de polluants dans l’air).
Mais avant cela, ce sont les experts des groupes de travail et des comités (qui forment les “instances préparatoires du Conseil”) qui effectuent les premières réflexions. Ces instances sont formées de fonctionnaires des institutions européennes ainsi que de représentants des Etats membres.
Ces travaux sont ensuite transférés aux Coreper I ou II (le I traite les questions techniques et le II les questions politiques), composés des représentants permanents nationaux adjoints auprès de l’UE et des ambassadeurs nationaux auprès de l’UE. Ils se rassemblent chaque semaine.
Le compromis adopté par le Coreper est transmis lors des réunions du Conseil de l’UE, qui rassemble les ministres des Etats membres. L’institution prend sa décision à la majorité qualifiée (chaque Etat membre a une voix pondérée en fonction de son poids démographique) ou à l’unanimité (en fonction du domaine de la proposition ou si la Commission rejette les amendements faits à sa proposition). Si le Conseil apporte des modifications, le texte revient au Parlement européen pour une seconde lecture, sinon il est adopté.
Quand le Conseil ne parvient pas à se prononcer, la procédure reste néanmoins suspendue à sa décision. Certains textes restent ainsi plusieurs mois dans l’attente d’une position du Conseil, voire ne franchissent pas cette étape. A ce stade, le Conseil est donc l’institution qui a le dernier mot sur le texte.
Tout comme le Parlement européen, le Conseil adopte le budget annuel de l’Union européenne. Il est également le seul à pouvoir modifier, à l’unanimité, le projet de cadre financier pluriannuel (approuvé par le Parlement européen sans amendements).
La transparence du Conseil est également source de critiques. En effet, le Conseil est la seule des trois principales institutions européennes à ne pas utiliser le registre de la transparence, qui recense les lobbys intervenant auprès de l’UE. Pour cette institution, il s’avère difficile de connaître l’identité ainsi que la fréquence des contacts qui influencent sa prise de décision. Depuis septembre 2016, une proposition de la Commission, actuellement débattue, vise à étendre le registre de transparence au Conseil.
Le Conseil européen
Le Conseil européen, constitué des chefs d’Etat et de gouvernement des Etats membres, donne les impulsions politiques générales de l’UE et joue un rôle d’arbitre pour les questions difficiles. Il possède également des attributions spéciales dans le domaine de la Politique étrangère et de sécurité commune (PESC), pour laquelle il identifie les intérêts stratégiques de l’Union, fixe les objectifs et définit les orientations générales.
Les décisions y sont prises à l’unanimité ou par consensus, sauf dans les cas où les traités en disposent autrement. Il joue ainsi souvent un rôle avant même le début du processus législatif et peut charger la Commission de lancer des propositions sur tout domaine de compétence de l’UE, même s’il ne dispose pas officiellement de l’initiative législative.
Enfin, les chefs d’Etat et de gouvernement décident à l’unanimité, et le plus souvent à l’issue de longues négociations en Conseil européen, du cadre financier pluriannuel sur lequel se fondent les dépenses et les ressources de l’Union européenne pendant sept ans. Et plus largement de toute modification des traités. Ce qui donne à chacun des Vingt-Sept un poids déterminant sur les futures politiques de l’Union européenne.
Au sein des Etats membres
Au niveau national, les gouvernements définissent les grandes lignes de la politique européenne des Etats membres. En France, le Secrétariat général des affaires européennes (SGAE), placé sous l’autorité du Premier ministre, est chargé de la coordination interministérielle de la position des autorités françaises sur les questions européennes.
Les parlements nationaux des Etats membres jouent également un rôle dans le processus de décision : ils vérifient le principe de subsidiarité, et participent aux procédures de révision des traités en amont, comme en aval via leur ratification. Ils peuvent aussi décider d’accepter ou de bloquer l’adhésion d’un nouvel Etat membre. Pour les traités commerciaux internationaux de “nouvelle génération” (de type CETA) ou pour la validation du nouveau plan de relance européen de 750 milliards d’euros, les parlements nationaux doivent là aussi donner leur accord.
La Commission européenne consulte par ailleurs des représentants nationaux dans la phase d’élaboration de ses propositions. Dans le cas de la France, elle les envoie ensuite à l’Assemblée nationale et au Sénat. Les commissions parlementaires des Affaires européennes publient alors leurs avis. Quand les propositions sont discutées au Parlement européen, les partis politiques nationaux indiquent aux eurodéputés leurs positions. Une fois parvenus au Conseil de l’UE, les ministres, représentants permanents, fonctionnaires et experts nationaux s’expriment sur les textes et donnent leurs indications pour la stratégie à adopter au niveau européen.
A l’inverse de l’idée selon laquelle “tout se décide à Bruxelles”, les décisions européennes sont donc construites par un grand nombre d’acteurs.
La France et l’Allemagne ont un poids important dans la définition des politiques européennes. Du fait de leur histoire commune bien sûr, la réconciliation des deux pays étant notamment à l’origine du projet européen. Mais aussi pour des raisons démographiques, économiques et géopolitiques.
France et Allemagne sont respectivement les première et deuxième économies de l’UE. Alors que l’Allemagne est aujourd’hui leader en la matière, la France reste le pays moteur de l’Union en termes de diplomatie et de défense. Elle l’est encore plus depuis le Brexit, étant devenue le seul Etat de l’UE également membre du Conseil de sécurité de l’ONU.
A elles deux, la France et l’Allemagne influencent stratégiquement une grande partie de l’UE. Il arrive en effet fréquemment que les pays d’Europe centrale et orientale s’appuient sur les positions allemandes lors des décisions au Conseil, tandis que les pays d’Europe du Sud seront plus sensibles aux choix français.
Enfin, ces deux pays possèdent également le plus grand nombre de députés au Parlement européen (96 pour l’Allemagne et 79 pour la France, sur un total de 705).