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World Resources Institute : des solutions innovantes contre le changement climatique

Succès pour les uns, timides avancées pour les autres… les résultats du sommet de Cancun sur le changement climatique ne font pas l’unanimité de ses commentateurs. Pour Rémi Moncel, expert dans le programme Climat et Energie au World Resources Institute, les engagements pris à Cancun représentent une véritable avancée, et prouvent que les Etats sont capables de coopérer efficacement sur une telle question. Cependant, le chemin reste long : c’est pourquoi le WRI s’attache à mettre en avant les propositions les plus innovantes pour lutter au niveau international contre le changement climatique.

Touteleurope.eu : Comment le WRI coopère-t-il avec l’Organisation des Nations Unies sur la question du climat ?

Le World Resources Institute est un think tank environnemental dont l’objectif est de trouver des solutions pratiques pour protéger la planète et améliorer le quotidien des populations. Situé à Washington, il a été créé en 1982.

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Rémi Moncel : Le World Resources Institute est un think tank environnemental basé à Washington, et qui travaille sur les questions de développement durable au niveau global.
Nous gérons quatre programmes : sur le changement climatique, la biodiversité, la gouvernance, les marchés et acteurs financiers. La question du climat occupe une partie majeure de nos activités, avec 60 personnes qui y travaillent actuellement, dont une part sur les négociations internationales en particulier.

Ce programme a été établi avant la création de la Convention Cadre des Nations Unies sur le Changement Climatique, mais aujourd’hui nous aidons l’ONU à prendre des décisions en produisant des analyses indépendantes sur les grandes questions liées au changement climatique. Par exemple sur la question du régime juridique international, le futur du protocole de Kyoto, la déforestation, la technologie et la finance pour les pays en voie de développement, le mécanisme de “mesure, de notification et de vérification” (Measurement, reporting and verification, MRV) des ressources financières allouées à la lutte contre le changement climatique, ou encore le thème de l’adaptation des pays en voie de développement.
Nous produisons des rapports, nous organisons des conférences et avons des discussions informelles autour des négociations. Et tout cela est public !
J’ajouterais que, bien que l’ONU travaille évidemment avec beaucoup d’acteurs, le WRI est un des principaux think tanks sur ce sujet, notamment parce que nous avons une grande équipe qui y est consacrée, avec d’importantes capacités d’expertise. Nous essayons de trouver des solutions pratiques autour des grandes questions environnementales, et d’appuyer ainsi les débats techniques.


Touteleurope.eu : En quoi consiste le projet de “peer review” mené avec le Programme des Nations unies pour l’environnement et l’Irlande ?

R.M. : L’idée de ce “peer review” est de renforcer l’appui aux négociations actuelles qui se déroulent dans le cadre des Nations unies. Aujourd’hui, le régime institutionnel pour traiter du changement climatique est en transition : la suite du protocole de Kyoto est en discussion, même si un certain nombre de décisions ont été prises à Cancun sur ce cadre institutionnel.

Ce projet a pour but de mettre en avant des propositions innovantes avancées par plusieurs ONG, des universitaires, et même certains gouvernements pour faire avancer le débat. L’idée est ainsi d’accélérer les négociations plutôt que de lancer un processus parallèle.

Parmi les principales questions se pose celle du meilleur cadre juridique capable de coordonner les actions des différents pays sur le changement climatique : quel sera le futur du protocole de Kyoto, y aura-t-il une deuxième période d’engagement ou un accord complémentaire à ce protocole pour les Etats-Unis et pour les pays en voie de développement ?

Un autre débat concerne la vérification des actions entreprises par les gouvernements, afin de savoir si ces dernières sont en accord avec les recommandations scientifiques, afin d’éviter les conséquences les plus néfastes du changement climatique.

WRI, en partenariat avec le PNUE et le gouvernement irlandais, est en charge de l’execution du projet de peer review lancé par le think tank Feasta.

Voir l’interview de Richard Douthwaite, économiste chez Feasta

Ce projet ne vise pas à soutenir une proposition en particulier, mais à comprendre quels sont les besoins fondamentaux en termes de création d’un régime juridique, et de comparer les propositions entre elles en fonction de plusieurs critères : efficacité, équité, niveau d’ambition… Par exemple, l’idée d’un accord global sur un objectif de réduction d’émissions, avec distribution de quotas par pays, peut se révéler particulièrement équitable et ambitieuse, mais elle pose des difficultés en termes de réalisation politique, ce qui n’empêche pas de la considérer avec attention.


Touteleurope.eu : Quel bilan faites-vous du sommet de Cancun qui s’est achevé le 11 décembre ?

R.M. : Les Nations unies, et la coopération internationale de manière générale, continuent d’avoir un rôle crucial à jouer sur le changement climatique. Bien sûr, les Etats peuvent, indépendamment les uns des autres, mettre en œuvre leurs propres mesures de lutte contre le changement climatique. Mais il reste un certain nombre de choses qui ne peuvent être réalisées efficacement qu’au niveau international.

Par exemple, un système international permet d’avoir une meilleure connaissance des actions des autres pays, partenaires et compétiteurs. Un processus de discussion et consultation autour des activités des différents pays permet de créer une atmosphère de confiance où tous les acteurs principaux participent à l’effort global, mais aussi se concerter pour parvenir à l’objectif final (limiter la hausse des températures à 2°C). Enfin, les institutions internationales permettent de mieux générer et distribuer des ressources financières pour les pays en voie de développement.

Concernant l’accord de Cancun du 11 décembre en particulier, celui-ci a démontré que les Etats étaient toujours capables d’obtenir des résultats. L’accord de Cancun est une avancée importante, pour le processus multilatéral et contre le changement climatique. Les engagements pris ne sont pas encore suffisants au niveau financier et des réductions d’émissions, mais ils sont essentiels pour progresser, et c’est la première fois qu’on a de telles décisions prises en commun sur cette question : l’établissement d’un fonds vert, le réengagement des pays développés à financer la lutte contre le changement climatique dans les pays en voie de développement, les engagements en termes de réduction des émissions…


Touteleurope.eu : Quel a été le rôle de l’Union européenne à Cancun ?

R.M. : Contrairement à Copenhague, Cancun a fait l’objet de discussions beaucoup moins grandiloquentes et beaucoup plus techniques. L’UE a avancé ses propres propositions (qui sont le fruit de négociations préalables entre Etats membres), dont certaines ont été très constructives : par exemple, son engagement à prolonger le processus de Kyoto sous certaines conditions, qui a contrasté avec le refus du Japon ; sa distribution transparente des financements au profit des pays en voie de développement ; son engagement à passer de 20 à 30% de réduction d’émissions à effet de serre (d’ici 2020 et par rapport aux niveaux de 1990) en cas d’accord global. De manière générale, l’approche européenne vise à atteindre des compromis.

Cependant, un vrai signe de leadership européen serait qu’elle passe sans attendre de 20 à 30% de réduction de ses émissions. Non seulement parce que des engagements ont été formulés par les autres pays. Mais aussi parce que l’UE tient un discours selon lequel la lutte contre le changement climatique est dans l’intérêt (économique, de sécurité énergétique, de création d’emplois…) des pays qui s’y emploient eux-mêmes. A travers de nouveau engagement de l’EU, ce dernier argument obtiendrait ainsi une crédibilité particulière, et amènerait d’autres pays à la suivre. Quand les pays développés eux-mêmes agissent timidement, les pays en voie de développement n’ont pas de réelle incitation à agir.


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La politique européenne de l’environnement - Touteleurope.eu

Site du World Resources Institute

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