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György Schöpflin : “Comme mode de développement, le communisme a toujours été synonyme de modernisation au rabais”

Le mardi 5 octobre, une catastrophe écologique frappait la Hongrie : la rupture d’une digue libérait des boues toxiques qui submergeaient trois villages et leurs environs. Tandis que la Hongrie s’efforce de gérer cet événement funeste pour l’environnement, nous avons demandé à l’eurodéputé hongrois György Schöpflin, membre du Parti populaire européen, comment l’Union européenne pouvait venir en aide au pays et comment éviter ce genre de catastrophe à l’avenir.

Touteleurope.eu : Quelles sont les causes de cette catastrophe écologique ?

György Schöpflin : Le travail d’enquête est toujours en cours. Il semble que la digue de rétention des boues était fissurée. Cela, c’est l’explication physique. D’expérience, nous savons que le béton était de mauvaise qualité, qu’il avait été mal mis en œuvre et n’avait pas eu le temps de sécher suffisamment. Le Premier ministre a promis une enquête complète. Nous en saurons plus dans quelque temps. Il est également probable que les contrôles n’aient pas été appropriés. Ceux-ci n’étaient en effet pas effectués par les pouvoirs publics, mais par l’entreprise elle-même.

TLE : Comment l’événement est-il vécu en Hongrie ?

GS : Avec beaucoup de tristesse. Mon impression générale est que le gouvernement a agi de façon particulièrement responsable en évacuant la population, en érigeant de nouvelles digues et en empêchant les boues d’atteindre le Danube, mais tout cela au prix d’un immense effort. Le pays est en état de choc. Le risque d’une nouvelle rupture de digue, qui ne peut être écarté, entraînerait une nouvelle pollution. Les autorités hongroises font tout leur possible pour éviter une répétition de la catastrophe. En cas de nouvelle rupture, la concentration de métaux lourds serait beaucoup plus élevée car les boues encore dans le réservoir ont perdu une bonne partie de leur eau. Le risque d’une nouvelle rupture de ce réservoir, qui libérerait alors 500 000 mètres cubes de boues toxiques, est très élevé.

TLE : L’assistance de l’UE mise en œuvre par le biais du mécanisme européen de protection civile a-t-elle été importante ?

GS : Pas tant que cela. Il ne s’agit pas de se plaindre mais simplement de constater que l’UE n’est pas directement impliquée. À ce stade, il s’agit avant tout d’un problème interne à notre pays.

TLE : Quelles seront les conséquences politiques de cette catastrophe pour la Hongrie ?

GS : Tout dépend de la réaction de l’opposition et de l’exploitation politique qu’elle fera de la situation. Le Premier ministre a promis une enquête très approfondie. Toute personne responsable ou coupable de négligence sera poursuivie. Je crois savoir que le directeur de l’entreprise a déjà été entendu par les autorités judiciaires. Je ne sais pas quelles seraient les conséquences politiques d’une tentative de l’opposition d’accuser le gouvernement de négligence face à la situation.

TLE : La médiatisation du drame survenu en Hongrie a mis en évidence les risques environnementaux existant dans certains pays d’Europe centrale et orientale. A-t-on assez fait pour aider les nouveaux États membres à s’adapter aux normes environnementales européennes ?

GS : Tout dépend d’où vous vous situez dans le temps ; si l’on prend comme point de référence l’année 1990, la réponse est que les progrès ont été immenses. Il faut rappeler qu’en tant que mode de développement, le communisme a toujours été le synonyme d’une modernisation au rabais. Les autorités communistes ont toujours rogné sur les normes environnementales. Vingt ans, ce n’est pas bien long pour redresser une situation désastreuse.

Nombre de choses ont été faites, mais tous les problèmes n’ont pas été réglés et certains ne le seront probablement pas tant que certaines des installations concernées ne seront pas démolies. Je pense en particulier aux cités qui ont fleuri un peu partout dans le bloc communiste dans les années 1980. En général, elles étaient mal construites et beaucoup menacent de s’effondrer. Souvenez-vous de l’effondrement de la tour d’habitation à Ronan Point à Londres en 1971. Le problème est bien un problème des constructions en béton en général.

TLE : Quel type de solution pourrait être proposé à l’échelle européenne ? Apporter une solution à ces problèmes environnementaux est-il une question de moyens financiers ou s’agit-il d’un processus progressif, qui requiert du temps ?

GS : La meilleure chose à faire à ce stade est probablement d’élaborer un livre vert sur le problème qui rassemblerait un ensemble de normes environnementales et industrielles, puis d’effectuer une enquête sur les installations construites dans les années 1970 et 80. C’est de cette période que provient la majorité des problèmes. Cela ne fera pas forcément le bonheur de beaucoup d’États membres, mais la meilleure solution serait de mettre en place un service européen de contrôle chargé de ces problèmes environnementaux. Pour l’instant, la supervision des normes environnementales est une compétence des agences nationales.

TLE : Greenpeace prétend que les conséquences de la catastrophe pourraient être bien pires que ce que ne le dit le gouvernement. Le gouvernement hongrois a-t-il rendu public toutes les données sur les risques sanitaires liés à cet événement ?

GS : Le gouvernement a informé le public sur les risques, mais nous ne pouvons dire aujourd’hui quelles seront les conséquences de la catastrophe à moyen et à long terme. Greenpeace fait un excellent travail, mais a toujours tendance à exagérer ! Rappelez-vous qu’en 1991, pendant la première guerre du Golfe, diverses organisations environnementales prédisaient que les puits de pétrole brûleraient pendant cent ans, or cela n’a pas duré plus de 12 mois. Tout le discours des écologistes est marqué par l’excès.

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