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Les institutions parviennent à un accord sur la surveillance du secteur financier

Actifs à l’échelle européenne, les acteurs financiers seront désormais aussi régulés à l’échelle européenne. C’est ce que prévoit le texte adopté hier par les institutions européennes. Pour surveiller le secteur financier, quatre nouveaux organismes : un Comité européen du risque systémique chargé d’évaluer les risques macroéconomiques qui menaceraient le système, ainsi que trois autorités pour surveiller les banques, les assurances et les marchés.

L’accord marque l’aboutissement d’un an et demi de négociations houleuses mais qui s’étaient récemment accélérées. Les Etats-Unis ont adopté en juillet une réforme de la régulation financière sans précédent, et qui étend le contrôle des régulateurs sur des pans entiers de la finance qui leur échappaient. Ainsi l’Europe, qui souhaite prendre le leadership mondial sur ces questions, et notamment au G20 de Corée du Sud qui approche, se devait de trouver un accord dans les plus brefs délais. C’est chose faite depuis hier soir ; ne reste plus aux colégislateurs, Parlement et Conseil, qu’à approuver formellement ce texte. C’est au programme du Conseil Ecofin du 7 septembre, et de la session plénière parlementaire de cette fin de mois.

L’aboutissement d’une réflexion ancienne

Jacques de Larosière, qui dirigeait le groupe de réflexion à l’origine du rapport qui a inspiré le nouveau système de supervision, est un ancien gouverneur de la banque de France.

Outre la question de la supervision, le rapport avait aussi proposé des règles pour encadrer le système financier et en garantir la stabilité : notamment l’augmentation des fonds propres des banques et des règles comptables plus strictes - des éléments sur lesquels la Commission s’est penchée à travers d’autres propositions de législation.

Le cadre de réflexion sur la supervision financière avait été posé par le rapport Larosière, paru le 25 février 2009. En octobre 2008, alors que, dans la lignée de Lehman Brothers, les banques européennes connaissaient la détresse, la Commission européenne avait mandaté un groupe, chargé d’étudier les conditions d’une supervision bancaire.

Outrepassant leur mandat, ces experts avaient étendu la réflexion à l’ensemble du système financier. Ils avaient conçu une architecture comprenant un comité et trois autorités, qui avait été reprise par la Commission dans une proposition le 27 mai 2009.

Avaient alors suivi plus d’un an de tractations avec le Parlement européen et les Etats, le premier désireux de s’assurer que le système soit doté de pouvoirs réels, et les seconds divisés sur l’opportunité d’armer trop résolument le dispositif.

Le Comité européen du risque systémique

La version finale du texte prévoit donc quatre autorités de surveillance. D’une part, le Comité européen du risque systémique, dont la mission sera de surveiller l’état du secteur financier et de lancer l’alerte si celui-ci court un risque. Aux risques qu’il identifiera, il associera différentes couleurs en fonction de leur nature et de leur intensité. Il adressera ensuite des recommandations aux autorités nationales et aux Etats les exhortant à prendre des mesures. Bien que non contraignantes, en cas de refus de s’y plier ils devront justifier leur choix.

Le choix de placer le Président de la Banque centrale européenne à la tête du Comité du risque systémique est une victoire du Parlement européen, qui tenait à voir la fonction occupée par un personnage indépendant et clairement identifiable


Le comité se composera de fonctionnaires de la BCE, des banques centrales nationales, des autorités nationales de supervision, ainsi que de personnalités extérieures comme des universitaires, ce qu’a obtenu le Parlement européen. Il sera, dans un premier temps du moins, présidé par le Président de la Banque centrale européenne.


Une autorité pour chaque secteur de la finance

Quant au rôle des trois autorités, il sera de surveiller les institutions financières et d’évaluer les risques de leurs activités pour le système. Concrètement, elles pourront par exemple limiter voire suspendre certaines activités comme les ventes à découvert, l’émission d’actifs toxiques ou encore encadrer les agences de notation.

Si leurs décisions n’auront qu’une portée temporaire, elles pourront faire appel à la Commission pour proposer des actions définitives. L’autorité de supervision des marchés financiers pourrait être chargée d’administrer les passeports européens pour les fonds alternatifs, nouveaux instruments permettant de contrôler leurs activités.

Ces autorités auront un rôle complémentaire à celui de leurs équivalents nationaux, mais elles pourront passer outre leurs décisions dans trois situations : si ceux-ci violent le droit européen, s’ils sont en désaccord entre eux, ou bien si les Etats membres déclarent une “situation d’urgence” .

Les limites

Les avis sont cependant partagés sur les progrès qui ont réellement été atteints avec cette décision. Les Etats membres, soucieux pour la plupart de ne pas laisser ces autorités empiéter plus que nécessaire sur leurs prérogatives, ont en effet obtenu un certain nombre de limites.

D’abord, l’exercice par les autorités de leurs pouvoirs sera soumis à la nécessité de justifier lourdement toutes leurs décisions. Ensuite, les Etats disposent d’une “clause de sauvegarde budgétaire” , qui leur permet de se prémunir contre une décision qui affecterait leur politique budgétaire. Ils sont par ailleurs les seuls à pouvoir déclencher “l’état d’urgence” qui dote les autorités de pouvoirs particuliers, au détriment du Parlement et de la Commission qui auraient souhaité pouvoir le faire aussi.

Pour des raisons diplomatiques, ils ont également insisté pour que les autorités soient réparties dans trois grandes villes européennes, Londres, Paris et Francfort, au risque de réduire leur efficacité.

L’accord trouvé hier reste néanmoins une victoire et un pas supplémentaire vers l’européanisation de la gouvernance financière, et dote l’Union d’outils pour empêcher qu’une crise survienne à nouveau. A noter aussi qu’en fonction des résultats, la Commission sera chargée tous les trois ans de faire des propositions en vue d’améliorer le dispositif.

En savoir plus :

Rapport de Larosière sur la supervision financière dans l’Union européenne

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