Comptant parmi les trois premières économies du globe avec la Chine et les Etats-Unis, l’Union européenne représente 16,5 % de la richesse produite mondialement. Son PIB s’élève à 15,8 milliards d’euros en 2022. Et d’après le Parlement européen, le nombre d’emplois qui dépendent du commerce extérieur au sein des Vingt-Sept dépasse les 30 millions.
En 2022, les exportations de biens ont représenté 2 572 milliards d’euros (en hausse par rapport à 2021 et la période pré-Covid), alors que la somme des importations atteignait 3 003 milliards d’euros (en large hausse également sur un an). Alors qu’elle était excédentaire les années précédentes, l’Union européenne a ainsi accusé un déficit commercial de 431 milliards d’euros en 2022, notamment en raison de l’explosion des prix de l’énergie sur les marchés mondiaux et de la dépréciation de l’euro face au dollar.
Si près de 60 % des échanges européens se font au sein même de l’Union, les Vingt-Sept ont pour partenaires extérieurs privilégiés les Etats-Unis, le Royaume-Uni (qui a quitté l’Union en 2020) et la Chine. La Chine représentait la plus grande part des importations européennes en 2022, tandis que les Etats-Unis étaient le premier destinataire des exportations de biens de l’UE la même année. Sur ce dernier indicateur, suivent le Royaume-Uni, la Chine, la Suisse, la Turquie, le Japon puis la Norvège.
Dans le cas de la Suisse et de la Norvège, qui n’appartiennent pas à l’UE, les échanges sont facilités par leur présence au sein du marché intérieur, où la liberté de circulation des biens, des services, des capitaux et des personnes est garantie.
Le Royaume-Uni n’est plus membre de l’Union depuis le 1er février 2020 et du marché intérieur depuis le 1er janvier 2021. Ses échanges avec l’UE restent cependant facilités par la signature d’un accord de commerce et de coopération le 24 décembre 2020, qui est définitivement entré en vigueur le 1er mai 2021. Au titre de ce traité, le pays a accès au marché européen sans droits de douane ni quotas.
Les objectifs de la politique commerciale européenne
La politique commerciale de l’UE est l’une des politiques communes les plus intégrées. Elle relève pour l’essentiel de la compétence exclusive de l’Union, ce qui permet à cette dernière de défendre ses intérêts d’une seule voix.
En matière commerciale, l’UE est représentée par la Commission européenne auprès des Etats tiers (c’est elle qui négocie par exemple les accords de libre-échange) et des organisations internationales. Les Etats membres et le Parlement européen conservent toutefois des prérogatives importantes. Les premiers, à travers le Conseil de l’UE, donnent mandat à la Commission pour la négociation des accords, sont consultés par cette dernière pendant le processus de négociation et décident de la signature et de la conclusion de ces accords (à la majorité qualifiée ou à l’unanimité selon les cas). Les députés européens disposent quant à eux d’un droit de veto sur la ratification des accords.
Régie par les traités, la politique commerciale européenne s’efforce de contribuer “au développement harmonieux du commerce mondial, à la suppression progressive des restrictions aux échanges internationaux et aux investissements étrangers directs, ainsi qu’à la réduction des barrières douanières et autres” (article 206 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne). La libéralisation du commerce mondial est ainsi l’un de ses objectifs, rappelle la Commission européenne.
Dès l’origine, le traité de Rome de 1957 prévoit la réalisation d’un marché commun et, ce faisant, d’une union douanière. Celle-ci implique non seulement une liberté de circulation des marchandises entre les Etats membres, mais également des règles communes envers les pays tiers. En 1968, la Communauté économique européenne instaure alors un tarif douanier commun à tous les Etats membres, qui s’applique aux importations de marchandises franchissant les frontières extérieures de l’union. 18 ans plus tard, l’Acte unique européen (1986) vient renforcer l’intégration de la politique européenne en termes de commerce extérieur, en instaurant la majorité qualifiée au Conseil pour les décisions relatives au tarif douanier commun. Autre avancée commerciale pour l’Europe avec le traité de Maastricht (1992), qui aboutit en janvier 1999 à la création de l’euro, monnaie internationale concurrente du dollar américain.
Les accords commerciaux entre l’UE et des pays tiers
L’un des axes principaux du commerce extérieur de l’UE est le développement des échanges bilatéraux avec les pays tiers. A cet effet, la Commission européenne a entamé il y a quelques années des négociations avec un nombre croissant de pays. Des accords conséquents ont été conclus avec le Canada (CETA, entré en vigueur en septembre 2017), le Japon (JEFTA, en vigueur depuis février 2019), Singapour (en vigueur depuis novembre 2019) ou encore le Vietnam (entré en vigueur le 1er août 2020).
D’autres accords sont en cours de modernisation ou de négociation avec le Mexique (pourparlers pour remplacer le précédent accord conclu le 28 avril 2020), ou encore l’Australie. Récemment, un accord dit de “nouvelle génération” a été signé avec la Nouvelle-Zélande, contenant un chapitre entier sur le développement durable et les droits des travailleurs, assorti d’un mécanisme de sanctions en dernier recours en cas de non-respect de ce chapitre par l’une des parties.
Les négociations autour de certains traités sont pour l’instant au point mort. L’accord entre l’UE et le Mercosur, signé en juin 2019 mais pas encore en vigueur, est remis en cause par plusieurs pays européens et notamment la France. Néanmoins, lors du dernier sommet entre l’UE et la Communauté des Etats latino-américains et des Caraïbes (CELAC), la Commission européenne a fait part de sa volonté de relancer les discussions et de conclure au plus vite cet accord. Une volonté partagée par la présidence espagnole du Conseil de l’Union européenne (second semestre 2023).
Depuis 1971, l’UE applique un système généralisé de préférences aux pays en voie de développement et moins avancés. De nombreux Etats bénéficient ainsi d’un accès préférentiel au marché européen, via des droits de douane réduits ou inexistants pour certains biens, afin de compenser leurs difficultés économiques.
La carte ci-dessous, réalisée par la Commission européenne, présente les accords commerciaux de l’UE avec des pays tiers en l’état actuel. Les Etats en rouge sont ceux avec lesquels l’UE a adopté de tels traités, en bleu foncé ceux avec lesquels ils sont en train d’être adoptés ou ratifiés et en jaune ceux avec qui un accord est en cours de négociation.
Les accords commerciaux de l’UE en 2023
L’Organisation mondiale du commerce (OMC) met également à disposition une carte interactive permettant d’explorer les accords de libre-échange que chaque pays a conclu avec des Etats tiers.
Débats et perspectives
Le commerce extérieur européen génère son lot de débats et de polémiques. Une partie de l’attention est portée sur les questions relatives aux conditions de concurrence et à l’environnement, au sein d’une réflexion plus large sur le bien-fondé du libre-échange.
Les controverses se sont un temps focalisées sur les accords de libre-échange négociés par la Commission européenne avec certains pays tiers, à commencer par les Etats-Unis (TTIP/TAFTA), puis le Canada (CETA) et les Etats du Mercosur. D’un côté, l’UE promeut les gains économiques de tels accords. De l’autre, un certain nombre de voix se sont élevées pour critiquer l’opacité des négociations, les risques d’une concurrence trop importante pour l’agriculture européenne, ceux pour l’environnement ou encore ceux liés à l’instauration de tribunaux d’arbitrage privés pour régler les litiges commerciaux entre Etats et entreprises.
Ces critiques ont entraîné un certain nombre de réponses en Europe comme en France : les mandats de négociation sont désormais publics et les exigences environnementales vis-à-vis des partenaires commerciaux ont été renforcées, et les tribunaux ont été réformés pour garantir l’indépendance des juges (la première de ces “Cours internationales d’investissement”, ou “ICS”, a été mise en place à travers l’accord UE-Mexique). La Cour de justice de l’Union européenne s’est elle-même penchée sur les mécanismes d’arbitrage : elle a considéré que les tribunaux privés n’étaient pas capables d’assurer la bonne application du droit européen, mais que le nouveau système juridictionnel des investissements instauré par le CETA, plus indépendant, était quant à lui compatible avec le droit de l’Union.
Dans sa nouvelle stratégie commerciale datée du 18 février 2021, la Commission européenne annonce vouloir faire du respect des accords de Paris sur le climat une composante essentielle de ses futurs traités commerciaux. Elle propose également de s’assurer que les importations soient conformes aux normes européennes (y compris en matière environnementale), et que l’UE puisse instaurer des sanctions dans le cas contraire. Enfin, l’UE a ouvert la voie à l’introduction de “clauses miroir” en 2022. Celles-ci s’appliqueront aux biens agricoles importés des pays partenaires de l’Union, afin d’imposer à leur produits le respect des mêmes normes de production sanitaires et environnementales que celles en vigueur en Europe.
Plus globalement, la Commission souhaite améliorer le soutien aux transitions numérique et climatique par le commerce et faire preuve de plus de fermeté dans la lutte contre la concurrence déloyale. Pour faire face à cette dernière, l’UE a fait des pas importants ces dernières années, comme avec le renforcement de ses instruments de défense commerciale (2016 et 2020) ou un filtrage accru des investissements étrangers (2019). Un règlement ciblant les subventions étrangères responsables de distorsions de concurrence est quant à lui entré en vigueur le 12 janvier.
La remise en question du multilatéralisme, déjà entamée avec l’immobilisation de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) dans les années 2000, s’est fortement accentuée avec la présidence américaine de Donald Trump de 2017 à 2021. Certains conflits commerciaux avec l’Union européenne ont pu être réglés sous la présidence de Joe Biden, mais l’administration américaine continue de bloquer le renouvellement des juges de l’organe d’appel de l’OMC, chargés d’examiner les différends commerciaux entre Etats membres de l’organisation.
Parallèlement, l’UE mène une politique active pour réformer l’OMC. L’Union souhaite notamment que l’organisation prenne mieux en compte les transitions climatique et numérique et lutte plus efficacement contre les distorsions de concurrence. Des discussions sont également en cours sur la réforme du mécanisme de règlement des différends.