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La Hongrie adopte une loi controversée sur le contrôle les médias

Mardi 22 décembre, le parlement hongrois vient d’adopter une loi imposant un contrôle des médias très stricte. Différents éléments dans celle-ci font craindre aux observateurs la mise en place d’une censure politique de l’information. Le ministre luxembourgeois Jean Asselborn a lancé un pavé dans la mare en parlant de “violation des valeurs européennes”.

La loi adoptée par 256 voix contre 87 entrera en vigueur au 1er janvier 2011. La nouvelle Autorité nationale des médias et des communications (NMHH) pourra sanctionner avec des amendes sévères les productions qui “ne sont pas équilibrés politiquement” ou qui portent atteinte à “la dignité humaine” . Les amendes pourraient atteindre 700.000 euros (200 millions de florints) concernant la télévision et 89.000 euros (25 millions de florints) pour les journaux ou les sites d’informations sur internet. Or, les cinq membres de ce “Conseil des médias” qui sont chargés d’infliger ces amendes appartiennent au parti majoritaire au gouvernement, le Fidesz.

Cette nouvelle loi sur le sujet (la précédente date de 1996) va aussi imposer un certain nombre de restructurations aux différents organes de presse avec leur sous-traitants. Par ailleurs, des quotas sont imposés pour “forcer” les producteurs à créer de nouvelles émissions avec une partie réalisée en Hongrie.

Jan Albrecht (Verts - All.) sur Twitter : “cher président Barroso de la Commission #eu : svp utilisez l’art. 7 TUE pour forcer la #Hongrie à retirer cette loi répressive sur les médias!”

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De plus, cette nouvelle autorité administrative aurait le droit d’inspecter tous les instruments et documents d’un organe de presse, avant même que soit identifié un délit. Les journalistes seraient obligés de divulguer leurs sources dès qu’il serait question de sécurité nationale. Ces notions bien vagues inquiètent les professionnels de l’information. Deux députés du LMP (le parti de l’opposition), Gabor Schering et Rébecca Szabó, ont brandi au moment du vote une banderole où il était inscrit : “A magyar sajtószabadság élt 21 évet” (La liberté de la presse a vécu 21 ans en Hongrie).

Une loi contestée en Hongrie et dans l’Union européenne


Les journaux hongrois du Nepszava et le Magyar Narancs avaient de concert début décembre publié une édition avec la Une complètement vierge pour marquer leur désapprobation. Après l’adoption de la loi, une manifestation dans la soirée a réuni 1.500 personnes venues contestées le bien-fondé de la nouvelle loi. La liberté de la presse est une question traditionnellement sensible en Hongrie. C’est en effet sur ce sujet qu’avait commencé la révolution de 1848.

Mais l’attaque la plus virulente contre cette nouvelle loi vient d’un autre pays de l’Union européenne. Le ministre des Affaires étrangères luxembourgeois, Jean Asselborn, a déclaré que cette loi allait “à l’encontre des valeurs européennes” dans une interview accordée à Reuters.“C’est un danger direct pour la démocratie. L’Etat contrôlera l’opinion” . Il fait même le parallèle avec la Biélorussie : “jusqu’à maintenant, Alexandre Loukachenko était considéré comme le dernier dictateur en Europe. Lorsque cette loi entrera en vigueur, ce ne sera plus le cas” , a-t-il dit. “Cela soulève la question de savoir si un tel pays est digne de diriger l’UE” a déclaré Jean Asselborn en faisant référence à la présidence hongroise du Conseil de l’Union européenne qui commence au 1er janvier 2011. Pourtant le gouvernement hongrois affirme que son texte est conforme aux normes européennes.

Reporter sans Frontières, par le biais d’Olivier Basille, s’inquiète : “il s’agit d’un problème croissant en Europe. Il n’y a pas d’Etat membre qui aille dans la bonne direction en terme de liberté des médias. Depuis les attentats terroristes du 11 septembre 2001, la marche arrière est enclenchée” .

La liberté des médias en Europe fait débat

Dans plusieurs Etats européens, la question de la liberté de la presse fait débat. En Irlande, une nouvelle loi entrée en vigueur le 1er janvier 2010 condamne le blasphème dans la presse par une amende pouvant aller jusqu’à 25.000 €. Le gouvernement avait défendu la mesure comme étant nécessaire pour protéger la diversité croissante des confessions religieuses, en faisant valoir que la protection constitutionnelle ne s’appliquait depuis 1936 que pour les chrétiens.

En France, la nomination directe par le président de la République du président des chaînes publiques de télévision a créé beaucoup d’interrogations dans les rangs de l’opposition. L’Italie de Silvio Berlusconi a aussi connu en 2010 une polémique sur la “loi bâillon” pour contrôler les publications sur les site de partage de vidéos comme Youtube. Le “Cavaliere” du fait son parcours professionnel a déjà la majorité des médias à sa main. En Slovaquie, une loi de 2008 sur la presse supprimait la possibilité de réclamer un droit de réponse.

Au delà de la question de la liberté de la presse, ce sont les questions de la régulation d’internet qui posent le plus de débat. D’un côté les tenants de la neutralité du net, de l’autre les partisans d’un contrôle pour protéger les enfants des pédophiles ainsi que pour sauver les industries du cinéma et de la musique. Les derniers débats sur la loi Loppsi II en France ou au Parlement européen sur le rapport Gallo montrent que le sujet n’est pas prêt d’être tranché.

En savoir plus :

L’interview de Sandrine Bélier sur le rapport Gallo - Touteleurope.eu

Rapport Gallo : vers un Hadopi européen ? - Touteleurope.eu

Les Européens et internet - Touteleurope.eu

Décision 29 : le contrôle de l’Internet fondé sur la protection de l’enfance ? - Touteleurope.eu

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