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L’austérité à l’allemande

C’est au tour de l’Allemagne d’adopter son plan d’austérité. D’un montant record, et aux mesures controversées, il est le fruit d’un compromis difficile négocié mardi par Guido Westerwelle, vice-chancelier. A tel point que, pour parvenir à sa finalisation, Angela Merkel a dû annuler la rencontre qu’elle avait prévue avec Nicolas Sarkozy.

86 milliards d’euros. C’est le montant des économies qu’Angela Merkel compte réaliser sur les quatre prochaines années. Un plan sans précédent pour le pays - le plus ambitieux de l’après-guerre - dont le gouvernement de coalition a accouché dans la douleur lundi après-midi. Quatre ans d’économies qui iront crescendo, avec pour objectif de résorber le déficit public à horizon 2016. 

A peine a-t-il été dévoilé que le plan se trouve déjà sous les feux. Pourtant, l’opinion allemande est consciente qu’il faut faire des économies. Elle s’inquiète particulièrement de la possibilité d’un retour de l’inflation ou de l’ampleur des déficits et des dettes ; on se rappelle que l’aide à la Grèce était particulièrement mal perçue outre Rhin. Mais ce sont les modalités du plan d’austérité allemand qui le rend impopulaire.

L’opposition, en particulier les partis de gauche et du centre, les associations et les syndicats, dénonce des mesures prises aux dépens de plus faibles. Elle soutient que le gouvernement aurait pu mettre davantage à contribution les plus riches, par le biais d’un impôt sur la fortune ou du relèvement de celui sur les successions. Et pourtant, 50 millionnaires allemands avaient annoncé vouloir apporter leur soutien !

Les solutions retenues pour économiser

Mais passer par les impôts était inenvisageable pour le parti libéral, membre de la coalition gouvernante. C’est d’ailleurs là-dessus qu’ont porté l’essentiel des discussions. Angela Merkel a dû se résoudre à céder aux exigences de ses partenaires de coalition qui ont refusé toute hausse d’impôts ; c’était un engagement qu’elle avait porté durant sa campagne l’an dernier.

Au lieu des impôts, Merkel a donc opté pour des taxes. La première, une taxe environnementale sur les vols en partance de l’Allemagne, a d’ores et déjà été décriée par les professionnels du secteur. Une autre sera prélevée aux producteurs d’électricité. Ces taxes s’ajoutent à la taxe bancaire annoncée il y a quelques temps.

Le plan prévoit aussi de vastes coupes au budget de la défense, puisque 40 000 postes de soldats seront supprimés au sein de la Bundeswehr, l’armée allemande. Le service militaire pourrait également disparaître, à terme.

Mais ce sont les dépenses sociales qui pâtiront le plus de l’austérité. De nombreuses allocations disparaîtront, qui risquent de se répercuter sur les plus modestes : les chômeurs de longue durée, les bénéficiaires d’aides au logement ou de l’allocation parentale.

Comme partout ailleurs en Europe, la fonction publique sera largement mise à contribution : au minimum 10 000 emplois disparaîtront, peut-être même 15 000.

Seuls secteurs épargnés : l’éducation et la recherche, défendus jusqu’au bout par la chancelière, et qui doivent permettre d’assurer la future croissance au pays.

Une chancelière affaiblie

Pourquoi tant d’empressement dans l’adoption de ce plan ? Outre une clause constitutionnelle qui poussait l’Allemagne dans ce sens, c’est la situation politique de la chancelière qui a accéléré les choses. Angela Merkel a dû essuyer une série de coups durs récemment, entre la défaite de son parti aux élections régionales en Rhénanie-du-Nord - Westphalie, la démission du vice Président de ce même parti, et celle enfin du président de la République. Ce plan est un geste fort visant à montrer qu’elle n’a pas perdu le contrôle de la situation.

Mais est-il pour autant une initiative judicieuse ? Certains, comme le journaliste Jean Quatremer, ou l’analyste Thomas Klau, se demandent si la sévérité d’un tel plan ne pourrait pas finalement jouer contre l’Allemagne, et contre l’Europe en freinant la reprise économique européenne.

Ils ne sont pas les seuls à s’inquiéter des conséquences de la multiplication des plans d’austérité sur la croissance. Depuis plusieurs semaines, des économistes de renom tel que Joseph Stiglitz, dénoncent un « excès de zèle » de la part des Etats qui risquerait de tuer dans l’œuf une croissance qui peine à redémarrer en Europe.

En savoir plus :

La crise dans la zone euro - Touteleurope.fr

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