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Jacques Barrot : “Notre objectif est de développer une mobilité respectueuse de l’environnement, efficace, fiable, sûre, sécurisée, accessible à tous”

Jacques Barrot, ancien commissaire européen en charge de la politique régionale sous la Commission Prodi, et actuellement Vice-président de la Commission européenne en charge des transports, présente les enjeux et principaux programmes d’action de la Commission européenne en matière de transport.

“Nous souhaitons développer une mobilité respectueuse de l’environnement”

Le 22 juin 2006, la Commission a publié une communication intitulée “Pour une Europe en mouvement - Mobilité durable pour notre continent” , qui effectuait un examen à mi-parcours du livre blanc de 2001 sur la politique des transports. Quel bilan en tirez-vous ?

Tout d’abord, je pense que les réalisations des dernières années démontrent la forte dynamique de la politique européenne des transports.

Je citerai à titre d’exemples l’ouverture du fret ferroviaire à la concurrence, la définition des 30 projets prioritaires du réseau transeuropéen, la création du ciel unique européen, le renforcement des droits des passagers dans l’aérien, la directive Eurovignette sur la tarification ou le démarrage de programmes industriels innovants et de portée internationale comme Galileo, le système européen de radionavigation par satellite…

Mais, depuis 2001, le contexte de la mobilité en Europe a changé considérablement. Dans l’Union élargie, la mobilité doit être considérée à une échelle continentale. Les situations sont plus variées et peuvent justifier des solutions différenciées.

La mondialisation est en train de changer la géographie industrielle. Nous devons tenir compte de nos engagements internationaux concernant les émissions de CO2. Le réchauffement global et les prix élevés du pétrole constituent des défis considérables. La sûreté est devenue une préoccupation majeure pour tous les modes de transport. Et enfin, les connections internationales sont de plus en plus importantes.

Ces mutations ont entraîné la nécessité de compléter notre boîte à outils et de définir une palette plus large de mesures, en adéquation avec les priorités communautaires telles que la stratégie de Lisbonne pour la croissance et l’emploi et la stratégie de développement durable.

Notre objectif est de développer une mobilité respectueuse de l’environnement, efficace, fiable, sûre, sécurisée, accessible à tous et qui permette un déploiement à l’échelon mondial. Une mobilité correspondant aux attentes des citoyens, des acteurs économiques et aux nouveaux défis du XXIème siècle.

Adapter les transports à la nouvelle donne énergétique, optimiser les infrastructures, utiliser au mieux les qualités propres de chaque mode de transport et favoriser l’intermodalité, promouvoir les transports intelligents, mettre l’accent sur l’amélioration du transport urbain et la logistique… Autant d’axes majeurs abordés dans le Livre blanc révisé.


Dans cette communication, la Commission souligne la nécessité de renforcer les actions de l’Union pour le transport, notamment suite aux élargissements passés et à venir. Quelles sont les grandes actions envisagées afin de concilier élargissements et maintien de la cohésion ?

Dans mon domaine, l’élargissement a donné à l’Union une dimension continentale. L’extension des principaux axes du réseau transeuropéen crée de nouveaux couloirs particulièrement propices au transport ferroviaire et par voie d’eau. L’Union élargie à 27 États membres a donc gagné en diversité.

Cependant alors que la pollution, l’utilisation du sol et la congestion sont des préoccupations majeures dans le “centre-ouest” industrialisé et densément peuplé, l’accessibilité reste le principal souci pour les nouveaux États membres. Ces problèmes d’accessibilité peuvent dégrader la cohésion territoriale de l’Union.

Les Fonds structurels et de cohésion, en cofinançant des infrastructures de transport, continueront à aider les régions en retard en termes d’intégration économique ou souffrant de handicaps structurels.
Je suis convaincu que de cette manière, une bonne partie des nouveaux États membres va pouvoir rattraper les sous-investissements antérieurs dans les infrastructures routières et urbaines, alors que les régions insulaires et périphériques pourront exploiter le potentiel de croissance des aéroports régionaux et des liaisons maritimes.

Pour les régions périphériques qui souffrent d’un déficit d’accessibilité, des instruments tels que les aides d’État pourraient également être utilisés pour réduire leurs désavantages concurrentiels ainsi que pour améliorer les liaisons avec le reste de l’Union européenne et avec les pays tiers voisins.

“Grâce à GALILEO, 150 000 emplois seront créés.”

Quels avantages les citoyens européens tireront-ils de GALILEO ?

Pour commencer, je voudrais insister sur les avantages industriels et commerciaux qui se traduiront en termes d’emplois.
Le marché mondial des produits et services liés à la radionavigation par satellite a augmenté de 25 % au cours des cinq dernières années. D’ici 2020, le chiffre d’affaires annuel mondial de ce marché est estimé à 300 milliards d’euros, avec 3 milliards de récepteurs en service.

La création de 150 000 emplois est attendue au sein de la seule Union européenne, principalement dans les secteurs de haute technologie liés à la recherche, aux applications et aux services.

Ce n’est pas pour rien que GALILEO est l’un des grands projets de la stratégie de compétitivité et de croissance définie par l’Union européenne à Lisbonne en 2000.

Dans la vie de tous les jours, GALILEO se révèlera vite un instrument dont la plupart des gens ne pourront se passer. Plus précis, plus fiable et plus complet pour les citoyens que le système militaire GPS américain, nous avons conçu le système européen pour couvrir la terre de façon optimum.

Il s’agira d’un véritable service public mondial, avec une précision inégalée de positionnement spatial et temporel sur l’ensemble de la planète : quelques dizaines de centimètres ! Et ses applications seront très nombreuses, du suivi des matières dangereuses à la logistique du transport de marchandises, de la gestion des flux routiers en ville à la sécurité des opérations financières en ligne, en passant par les secours aux randonneurs égarés en montagne, l’épandage sécurisé des engrais et des pesticides pour les agriculteurs ou le repérage des bancs de poissons pour les pêcheurs !

“La mobilité durable signifie une mobilité économiquement viable, socialement responsable et respectueuse de l’environnement.”


Comment définiriez-vous la notion de “mobilité durable” ?

La mobilité durable signifie une mobilité économiquement viable, socialement responsable et respectueuse de l’environnement. Pour ce faire, elle recourt à des mesures telles que l’amélioration de l’efficacité du transfert modal là où cela est approprié, le recours à la propulsion verte et le développement de systèmes de transport intelligent.

Le transfert modal doit s’opérer vers le transport collectif dans les agglomérations pour le transport de passagers, vers le rail ou la voie maritime et fluviale sur la longue distance pour le transport de fret, et dans les corridors congestionnés.

Nous réussirons ce transfert modal par la poursuite des investissements dans les réseaux, par l’ouverture effective du secteur ferroviaire à la concurrence, par l’utilisation optimale des infrastructures au sein des différents modes de transport, par la combinaison de ces différents modes entre eux (ce que j’appelle la “co-modalité”) ainsi que par la création de plateformes intermodales qui permettent de changer de mode sans rupture de charge.

La “mobilité durable” , c’est également le soutien aux efforts de recherche sur la propulsion verte : véhicules propres (électriques, hybrides) et combustibles de substitution (biocarburants, gaz naturel, hydrogène et piles à combustibles). Nous devons en effet réduire sensiblement les émissions CO2 qui sont responsables de l’effet de serre. Car le transport contribue à hauteur de 21 % à ces émissions nocives.

Parallèlement, je souhaite favoriser l’utilisation des nouvelles technologies pour promouvoir les systèmes de transport intelligent. La gestion des flux de trafic par les nouvelles technologies de radionavigation, basées notamment sur GALILEO, peut éviter des congestions et des transports “vides” .

L’Europe, avec ERTMS (European Rail Traffic Management System) et SESAR (Single European Sky ATM Research Programme), pilote des projets de grande ampleur pour l’amélioration de la gestion des espaces ferroviaires et aériens.

Enfin, par une tarification “intelligente” , nous arriverons à mieux utiliser les infrastructures existantes en réduisant les coûts externes, c’est-à-dire en évitant les congestions, diminuant le nombre des accidents et limitant la pollution.

Je compte soumettre en 2008 un modèle universel pour l’évaluation de ces coûts externes pour tous les modes de transport.

En 2007 se tiendra la première journée européenne de la sécurité routière. Quelles actions la Commission compte-elle entreprendre dans ce domaine ?

La politique de sécurité routière est un sujet qui m’est particulièrement cher.

L’objectif que nous avons fixé dans ce domaine est de diviser par deux le nombre d’accidents mortels sur les routes de l’Union européenne à l’horizon 2010.

Bien que le bilan à mi-parcours du Programme d’action pour la sécurité routière, adopté en février 2006, ait montré des résultats en retrait par rapport à cet objectif, les dernières données statistiques restent encourageantes. En effet, les 12 derniers mois se sont traduits par une réduction de 8 % du nombre de tués par rapport aux douze mois précédents. Ceci est bel et bien le double de la moyenne que nous avons pu constater dans les années 2001 à 2005. Si nous continuons dans cette voie, l’objectif sera atteint en 2010.

L’Europe prône auprès des Etats membres une stratégie globale, qui s’appuie sur l’amélioration du comportement des conducteurs, la sécurité des infrastructures et les progrès technologiques des véhicules. Et nous avons remporté, avec le permis de conduire européen, une grande victoire. La fraude au permis de conduire sera jugulée, et la poursuite des infractions transfrontalières facilitée.

C’est dans ce contexte volontariste que nous avons décidé d’organiser chaque année une Journée européenne de la sécurité routière afin de favoriser, d’augmenter et de pérenniser la prise de conscience de l’urgence d’une route plus sûre dans l’ensemble des États membres.

La 1ère Journée européenne de la sécurité routière aura donc lieu le 27 avril 2007, à Bruxelles, sur le thème des “Jeunes conducteurs” âgés de 18 à 25 ans. La date n’a pas été choisie au hasard : il a en effet été jugé très utile de lier cette Journée européenne à la 1ère Semaine mondiale de la sécurité routière, organisée par les Nations Unies et l’Organisation Mondiale de la Santé du 23 au 29 avril 2007, et dont le thème sera également les “Jeunes usagers de la route” . D’ailleurs, sur demande des Nations Unies et de l’OMS, il est envisagé que cette Journée à Bruxelles représente l’évènement européen de cette Semaine mondiale.

L’un des principaux objectifs de cette Journée consiste à mobiliser les jeunes, les décideurs et l’ensemble des partenaires concernés, sur l’amélioration de la sécurité routière des jeunes conducteurs.

De plus, je voudrais encourager tous les États membres à organiser au plan national, autour de cette Journée européenne et autour de ce sujet, des manifestations visant à mettre l’accent sur l’impérative nécessité de réduire l’insécurité routière en général, mais plus particulièrement celle qui touche les jeunes.

Mes services préparent d’ores et déjà activement cette manifestation européenne et, d’ici à la fin de cette année, toutes les informations utiles auront été rendues publiques, notamment sur le site web de la sécurité routière de la Commission européenne.

Propos recueillis le 18/12/06

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