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En Europe, la libéralisation est passée comme une lettre à la Poste

Le jour de la libéralisation totale des secteurs postaux européens a fini par arriver. Depuis le 1er janvier 2011, n’importe quelle entreprise peut proposer des offres de distribution de courrier, y compris pour les plis de moins de 50 g, marché jusqu’alors réservé aux opérateurs historiques. Un changement qui, en dépit de son importance symbolique, n’affectera pas réellement les postes européennes.

Une date surtout symbolique

Contexte

La libéralisation complète des postes en Europe est le fruit d’un long processus enclenché en 1997. Concernant à l’origine les plus gros envois seulement (d’un poids supérieur à 350 g à partir de 2000), elle s’est progressivement étendue aux plis d’au moins 100 g (2003), puis 50 g (2006), avant d’englober la totalité des produits postaux aujourd’hui. 2011, c’est trois ans après la date qui avait été initialement proposée par la Commission, avant d’être décalée par le Parlement européen qui la trouvait prématurée.

Les nouveaux entrants dans l’Union européenne ont obtenu un délai supplémentaire, justifié par l’intensité du rythme avec lequel ils avaient dû réformer leurs secteurs postaux afin d’être en conformité avec les premières directives de libéralisation, au moment de leur adhésion. Pour eux, la libéralisation complète aura lieu le 1er janvier 2013.

La date du 1er janvier, fixée par la directive postale de 2008, ne revêtait pas la même importance pour tous les Etats membres. Certains ne sont simplement pas concernés, ayant obtenu une dérogation de deux ans supplémentaires avant de devoir libéraliser leur secteur postal. C’est le cas de tous les Etats ayant rejoint l’Union européenne en 2004, à l’exception de l’Estonie, ainsi que de la Grèce et du Luxembourg.

Au contraire, d’autres Etats ont déjà procédé à cette libéralisation, comme la Suède, pionnière en la matière, ou encore l’Allemagne il y a trois ans, et les Pays-Bas un an plus tard.

Pas de changement majeur sur les lettres aux particuliers

Mais même en France, pays où le principe même de libéraliser les postes a été le plus contesté, ce changement prend des airs de non-évènement. C’est qu’aujourd’hui, aucun candidat ne serait de taille à concurrencer La Poste sur le marché national ; bien qu’important en termes de volume (les quatre-cinquièmes des courriers pèsent moins de 50 g), il est de moins en moins lucratif, s’effaçant au profit des communications dématérialisées. Adrexo, la seule entreprise qui avait tenté de se mettre sur ce créneau aux côtés de La Poste a jeté l’éponge au bout de quelques années pour se concentrer sur l’envoi de colis, plus en vogue avec le développement de l’e-commerce.

En réalité les seuls concurrents qui pourraient rivaliser sont les postes des autres Etats membres, et en particulier la Deutsche Post, déjà présente à l’étranger. Mais le bilan mitigé de ses activités aux Etats-Unis pourrait la décourager de s’attaquer à la France, d’autant que la Poste française a eu une décennie pour se réformer en vue du changement.

Ainsi, en Europe, malgré la libéralisation, les opérateurs historiques conservent généralement la main sur la distribution du courrier. En Allemagne, en Espagne et même en Suède où la concurrence est ouverte depuis 1993, la Deutsche Post, la Correros et la Posten AB, dont les Etats détiennent toujours une grande partie du capital, continuent de contrôler 90% de leurs marchés nationaux respectifs, malgré la présence de nombreux concurrents.

La chasse aux niches les plus rentables

“Pour s’intéresser aux courriers de grand-mère, il faudrait avoir le réseau de la Poste et ne pas vouloir faire des bénéfices” , explique-t-on chez Alternative Post, un petit distributeur de courrier basé en France. Cette jeune entreprise a préféré se spécialiser dans la distribution de plis légers dans les centres des grandes villes françaises et pour le compte d’entreprises, activité qu’elle exerce déjà depuis plusieurs années grâce au développement d’un système innovant de géocodage qui lui a permis de contourner les restrictions légales françaises.

C’est dans ce type de marchés localisés et à forte valeur ajoutée, comme par exemple les quartiers d’affaires de grandes villes, qu’une concurrence pourrait se mettre en place. La Poste devra prendre garde à rester compétitive sur ces segments très rentables pour elle.

En France, comme ailleurs en Europe, l’ouverture à la concurrence s’accompagne d’un certain nombre de garde fous permettant de protéger le service public (une distribution du courrier en deux jours sur l’ensemble du territoire, au moins 5 jours par semaine, et le maintien d’un nombre suffisant de points de contact), comme par exemple une taxe sur les concurrents qui exploitent uniquement les secteurs rentables.


En savoir plus :

La libéralisation des services postaux dans l’Union européenne - Toute l’Europe

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