Réalisée à la mi-2023 auprès des entreprises européennes, l’enquête de la BEI sur l’investissement (EIBIS) a mis en lumière plusieurs dynamiques à l’œuvre dans le secteur privé. Parmi elles, une bonne nouvelle : le niveau de ses investissements est revenu à celui de la période pré-Covid. Parue le 12 octobre dernier, l’étude indique que 85 % des entreprises dans les Vingt-Sept ont déclaré avoir investi l’année dernière. Et 80 % des firmes européennes ont dégagé des profits, là encore un retour à la normale après les perturbations liées à la pandémie.
Mais l’étude de la BEI met le doigt sur un autre phénomène, beaucoup moins positif pour les entreprises : l’impact du changement climatique sur un nombre croissant d’entre elles. L’augmentation des phénomènes météorologiques extrêmes accroît en effet les risques physiques qui pèsent sur leurs activités.
L’enquête de la BEI sur l’investissement (EIBIS)
Chaque année depuis 2016, la BEI mène une vaste enquête auprès de 12 000 grandes entreprises et PME de l’UE pour connaître leurs besoins de financement et les difficultés qu’elles rencontrent. Le panel comprend également 800 entreprises installées aux Etats-Unis.
Un facteur climat de plus en plus important
Parmi les sociétés sondées mi-2023 dans l’UE, 64 % ont affirmé avoir été impactées par les événements météorologiques. Une donnée en augmentation de sept points par rapport à 2022. De quoi suggérer que le changement climatique a des effets de plus en plus importants sur les entreprises, selon les auteurs de l’étude.
Seule une minorité de sociétés a toutefois pris des mesures pour y faire face. D’après l’enquête, 36 % des entreprises de l’UE questionnées (40 % aux Etats-Unis) auraient développé ou investi dans des mesures pour accroître leur résilience face aux risques physiques liés au changement climatique. Le plus souvent, il s’agit d’investissements pour réduire l’exposition à ces dangers ou les éviter. La part des entreprises dans l’UE ayant opté pour des assurances spécifiques liées aux risques climatiques ne s’élève, elle, qu’à 13 %.
L’EIBIS 2023 a également interrogé les sociétés européennes sur leur perception de la transition écologique et de son impact sur leurs activités. Une évolution vers des normes et régulations climatiques plus strictes est vue comme un risque dans 33 % des cas, mais comme une opportunité par 29 % des sondés. La majorité, 38 %, pensent cependant que la transition ne les impactera pas.
Les entreprises européennes face au défi de la transition écologique
Si une minorité de sociétés ont investi face aux risques liés au changement climatique, elles sont en revanche majoritaires à avoir pris des mesures pour s’engager dans la transition écologique. Parmi les entreprises de l’UE, 90 % se sont ainsi orientées vers une réduction des émissions des gaz à effet de serre, 59 % investissent dans l’efficacité énergétique, 67 % dans la réduction des déchets et le recyclage et 32 % dans des secteurs et technologies moins polluants.
On peut y voir une adaptation des firmes à des normes environnementales déjà élevées en Europe par rapport au reste du monde. Des règles qui sont appelées à être durcies dans les années à venir, conduisant donc également à une anticipation du secteur privé.
Pour rappel, l’UE s’est fixée pour objectif la neutralité climatique à l’horizon 2050, avec un objectif intermédiaire de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 55 % en 2030 par rapport aux niveaux de 1990. Des ambitions assorties de mécanismes contraignants, tels que le renforcement du marché du carbone, où les entreprises s’échangent des quotas de pollution.
L’Europe bien plus touchée par la crise énergétique que les Etats-Unis
Autre sujet de préoccupation majeure pour les entreprises : l’envolée des coûts de l’énergie. Un phénomène apparu dans le sillage de la reprise économique post-Covid, puis significativement accentué par l’invasion russe de l’Ukraine en février 2022. Si l’augmentation des prix est très visible des deux côtés de l’Atlantique, les sociétés européennes sont bien plus impactées, constatent les auteurs de l’EIBIS 2023.
Dans les Etats membres de l’UE, elles ont été 68 % à rapporter une augmentation de 25 % ou plus de leurs dépenses énergétiques, contre 30 % aux Etats-Unis. Les réponses apportées ne sont par ailleurs pas les mêmes.
En Europe, 78 % des entreprises ayant répondu à l’EIBIS 2023 indiquent avoir mis en place des stratégies de réduction de la consommation d’énergie. La renégociation des contrats avec les fournisseurs d’énergie a aussi été évoquée par 67 % d’entre elles. Et 62 % déclarent avoir transféré la hausse des coûts vers leurs consommateurs. Outre-Atlantique, il s’agit de l’option privilégiée par les entreprises, à hauteur de 59 %.