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Du plan Juncker à InvestEU : comment l’UE stimule l’investissement en Europe

Lancé en 2015 par la Commission européenne et la Banque européenne d’investissement, le plan Juncker visait à répondre à la baisse de l’investissement sur le continent en proposant une nouvelle utilisation de l’argent européen. Après des résultats concluants, les deux institutions entendent poursuivre cette tendance avec la mise en place d’InvestEU.

Selon la BEI, Plus de 40 % des investissements réalisés dans le cadre du plan Juncker ont été consacrées à des activités en faveur de l'environnement et du climat
Selon la BEI, Plus de 40 % des investissements réalisés dans le cadre du plan Juncker ont été consacrées à des activités en faveur de l’environnement et du climat – Crédits : andreswd / iStock

En 2014, la Commission européenne fait un constat. Le montant global des investissements en Europe reste 15 % inférieur à celui atteint avant la crise financière de 2008. Cette situation résulte selon l’institution d’une prise de risque insuffisante des investisseurs privés conjuguée au manque d’investissement public. L’Europe est donc en retard, “en comparaison avec d’autres régions comme l’Asie et l’Amérique du Nord qui avaient déjà retrouvé des niveaux d’investissements d’avant la crise”, explique Grégoire Chauvière Le Drian, responsable du bureau du Groupe BEI (Banque européenne d’investissement) en France. Un retard qui, selon lui “accentuait les effets de long terme de la crise, car ne permettant pas aux entreprises d’être compétitives sur le marché de demain”.

Conscient de cette situation, le nouveau président de l’exécutif européen Jean-Claude Juncker annonce, peu de temps après son élection en juillet 2014, la mise en place d’un grand plan d’investissement pour l’Europe qui allait porter son nom ultérieurement : le “Plan Juncker”. Chargée de sa mise en œuvre, la Banque européenne d’investissement le rend opérationnel dès le mois de septembre 2015 et ambitionne de mobiliser 315 milliards d’euros jusqu’en 2018. Reconduit pour deux années supplémentaires à la fin de cette première période, son objectif est alors porté à 500 milliards et placé sous la responsabilité du vice-président français de la BEI, Ambroise Fayolle.

Derrière l’appellation “Plan Juncker” se cachent en réalité plusieurs éléments.

Le Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS) en constitue le pilier financier et le principal volet.

Les deux autres piliers du plan Juncker sont les plateformes (Plateforme européenne de conseil en investissement et Portail européen des projets d’investissement) et le volet réglementaire visant à favoriser l’investissement par la modification des cadres nationaux.

Des investissements verts

Un objectif atteint et même dépassé selon la Banque européenne d’investissement. Dans son rapport d’évaluation publié en juin 2021, l’institution estimait que les opérations financées par le Fonds européen pour les investissements stratégiques auraient permis de mobiliser 545,3 milliards d’euros. La France aurait pour sa part attiré près de 90 milliards, faisant de l’Hexagone le premier pays bénéficiaire en termes de volume de financement.

Depuis 2019 et en complémentarité du Pacte vert pour l’Europe présenté par la Commission européenne, la BEI aspire également à devenir “la banque européenne du climat”. Selon ce même rapport, 40 % des investissements mobilisés par le FEIS auraient ainsi été consacrés à des activités en faveur du climat et de la durabilité environnementale. Preuve, selon la banque, que l’innovation qui était l’ambition de ce plan de relance peut être au service de la transition énergétique. En novembre 2020, l’ambition de la BEI en faveur de l’environnement est approuvée avec l’adoption d’une feuille de route pour la période 2021-2025 mentionnant l’objectif d’y consacrer cette fois plus de 50 % de son activité annuelle et permettant la mobilisation sur la prochaine décennie de près de 1000 milliards d’euros. Cette feuille de route indique, par ailleurs, qu’aucun des projets financés par la BEI ne pourra avoir un impact négatif sur le climat.

Une nouvelle utilisation de l’argent public

La Banque européenne d’investissement n’a toutefois pas financé l’intégralité des 500 milliards d’euros. “L’originalité du plan Juncker c’est d’utiliser de la ressource publique, non pas en subventions mais en garanties”, explique Grégoire Chauvière Le Drian. L’institution vient ainsi mobiliser le secteur privé qui dispose des liquidités. La BEI de son côté propose de partager les risques, de quoi actionner un “effet levier” important. “Avec 1 euro mis sur la table en garantie, nous étions en capacité de mobiliser au total 15 euros de financements additionnels vers des priorités de politique publique. Nous avons ainsi orienté les ressources privées vers des ambitions et des projets européens”, précise-t-il.

Le recours aux instruments financiers innovants séduit également de plus en plus les Régions qui assurent la fonction d’autorité de gestion des fonds européens. Par exemple, une part importante du Fonds européen de développement régional est désormais utilisée sous cette forme.

La mise en place du Plan Juncker a également permis d’investir dans un nouveau profil de bénéficiaires. Avant, “il était reproché à la BEI d’être adverse aux risques et de préférer des actifs peu risqués”. Avec ces nouvelles méthodes, la BEI a pu consacrer une partie plus importante de son investissement vers de plus petites entreprises qui proposent une “innovation de rupture”, qui sont en forte croissance et pour lesquelles il n’existe donc pas forcément de garanties de réussite. “Ces entreprises, perçues comme risquées, avaient d’ailleurs du mal à se financer sur les marchés bancaires traditionnels”, reconnait Grégoire Chauvière Le Drian, “et en tout cas pas dans les mêmes conditions !”. Avec ces nouveaux outils, “nous sommes en capacité de prêter sur 7 ans avec souvent 4 à 5 ans de période de grâce […] Pendant celle-ci, le dirigeant d’entreprise va se concentrer sur la réussite de son initiative, plutôt que sur la recherche de financement. C’est un point important de la réussite de ces innovations !”, complète-t-il.

Fin 2019, la BEI fait ainsi le choix de soutenir le projet d’une entreprise de “medtech” (technologies médicales) basée en Allemagne. Baptisée BioNTech, elle propose une nouvelle technologie qui pourrait permettre de résorber certains cancers : l’ARN messager. Quelques mois plus tard, cette technologie sera utilisée par la société pour produire avec le géant pharmaceutique américain Pfizer le premier vaccin contre le Covid-19. “Nous avons misé sur cette entreprise car nous étions convaincus que cette méthode en termes médicaux était une véritable avancée technologique, sans savoir que nous pourrions avoir une utilisation quasi systémique plus tard sur le vaccin”, apprécie le représentant du groupe BEI.

InvestEU prend la relève

Le fonds européen pour les investissements stratégiques clôturé au 31 décembre 2020, la Commission et la Banque européenne d’investissement ont présenté son successeur, le programme InvestEU, dont l’objectif est de lever 372 milliards d’euros. Il rassemblera la multitude d’instruments financiers de l’UE disponibles dans les différents programmes de financement de l’Union européenne. Le tout afin de concentrer son action sur quatre volets d’action : les infrastructures durables ; la recherche, l’innovation et la numérisation ; les petites et moyennes entreprises ; les investissements sociaux et les compétences.

Le nouveau programme, qui doit entrer en vigueur prochainement, tirera les enseignements du FEIS et devra jouer un “rôle primordial” dans la relance de l’économie européenne, selon la Commission européenne. Il confortera en tout cas le modèle de garantie utilisé pour bénéficier d’un effet multiplicateur. Une pratique “entrée dans la logique des budgets de la Commission, passant d’une logique de subvention à une démarche d’investissement”, assure Grégoire Chauvière Le Drian.

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