Depuis plusieurs semaines, l’Europe est en proie à la sécheresse et aux incendies, la faute à des températures records et à une absence de précipitations. Pour bien se rendre compte du phénomène, rien de tel que de regarder du côté des images satellites fournies par le programme européen Copernicus. On y observe des terres arides et des cours d’eau asséchés, comme le Rhin. Le trafic sur l’une des plus grandes artères fluviales d’Europe pourrait même être interrompu dans les prochaines semaines. Du jamais vu.
Observer la Terre
Initié à la fin des années 1990, le programme européen Copernicus vise à favoriser des systèmes innovants d’observation de la Terre, ainsi qu’à assurer un accès indépendant de l’Europe aux connaissances environnementales et aux technologies clés d’observation et de collecte d’information. Il constitue le volet européen du GEOSS (Global Earth Observation System of Systems), programme mondial d’observation.
Les données et informations de Copernicus sont mises à disposition sur la base d’un accès total, ouvert et gratuit, dans certaines conditions et limites. Plus largement, l’objectif du programme est de soutenir la formulation, la mise en œuvre et le suivi des politiques de l’UE.
Copernicus comprend 6 services :
- la surveillance de l’atmosphère au niveau mondial,
- la surveillance des milieux marins,
- la surveillance des terres et de l’agriculture,
- la surveillance du changement climatique, en particulier des pôles et des émissions de gaz à effet de serre,
- un service de gestion des situations d’urgence, notamment en cas de catastrophe naturelle,
- un service de sécurité, en lien avec la politique étrangère et de sécurité commune de l’Union (PESC).
Ces éléments constituent autant de domaines d’application des services fournis par Copernicus : l’agriculture, l’environnement, la biodiversité, le climat et l’énergie, le tourisme, la santé publique, les transports, la sécurité ou encore l’aménagement du territoire et l’aide humanitaire.
Les satellites de Copernicus
Pour fonctionner, le projet d’observation comprend des satellites, une infrastructure au sol – des capteurs maritimes, aériens et terrestres – ainsi que des installations de traitement des données recueillies par ce système spatial européen.
Copernicus est composé de 6 familles de satellites, les “Sentinelles”, souvent déployées par paires dans l’espace. Elles remplissent des missions bien précises : Sentinel-3 examine par exemple la surface de la mer et mesure sa température, tout en surveillant les couleurs de l’océan et de la surface terrestre avec une grande précision.
Ces familles sont complétées par des infrastructures spatiales d’autres organisations qui contribuent aux services de Copernicus. Une série de lancements est prévue jusqu’en 2025 pour compléter la constellation européenne.
L’ensemble des politiques européennes liées à l’espace sont désormais regroupées dans un programme unique, doté d’une enveloppe financière de 14,9 milliards d’euros pour la période 2021-2027. 5,4 milliards sont consacrés à Copernicus.
L’Agence spatiale européenne (ESA) est responsable de la composante spatiale de Copernicus. Elle est chargée de la conception, du développement et de la construction de l’infrastructure. De son côté, l’Agence de l’Union européenne pour le programme spatial (EUSPA) soutient le développement d’applications basées notamment sur Copernicus. L’Organisation européenne pour l’exploitation de satellites météorologiques (EUMETSAT) est enfin chargée de conduire des missions spécifiques sur l’amélioration et l’exploitation de l’infrastructure spatiale du programme.
L’enjeu des données
Copernicus fournit de nombreuses données liées aux domaines dont il a la charge. Il permet par exemple d’identifier des zones brûlées par des incendies. En 2020, la cartographie rapide du service de gestion des urgences a été activée 17 fois en raison de feux de forêts. Cet été, les images ont également permis de mesurer l’impact des incendies en Gironde grâce au Système européen d’information sur les feux de forêts (EFFIS). Copernicus offre également la possibilité de vérifier les engagements nationaux et européens de réduction des émissions de gaz à effet de serre, comme le CO2 ou le méthane.
#ImageOfTheDay
— 🇪🇺 DG DEFIS #StrongerTogether (@defis_eu) August 3, 2022
In July, 2 large fires broke out in #Gironde #France🇫🇷, burning 170+ km2 of🌳
The damage to #biodiversity is considerable : ~1/4 of the🦌deer population died🔥in La Teste-de-Buch
⬇️The burn scar of this #wildfire as seen in the #Sentinel2 🇪🇺🛰️image of 1 August pic.twitter.com/HNuasDphnL
Un des enjeux pour ce système d’observation est la réutilisation des données par les entreprises, les scientifiques et les entités publiques, à l’image des Etats. Comme l’indique clairement le règlement qui encadre le programme spatial européen, “Copernicus est […] axé sur les utilisateurs”. Dès lors, “il convient de libérer tout le potentiel que Copernicus présente pour la société et l’économie de l’Union, au-delà des bénéficiaires directs, […] ce qui implique d’entreprendre d’autres actions pour rendre les données utilisables par des non-spécialistes”. C’est pourquoi plusieurs initiatives ont été lancées, telles qu’un incubateur pour les start-up afin de développer les applications commerciales des services de Copernicus. Ces projets peuvent par exemple bénéficier d’un soutien d’experts de l’espace afin de créer et faire fructifier des entreprises.
De leur côté, les décideurs politiques et autorités publiques peuvent avoir recours à des informations recueillies par Copernicus pour élaborer des politiques et des textes législatifs dans les domaines de l’environnement ou de la protection civile en cas de catastrophe naturelle ou de crise humanitaire. En Roumanie par exemple, les images satellitaires des Sentinelles de Copernicus sont ainsi utilisées par les autorités locales afin de surveiller et de réguler le trafic fluvial sur le Danube.
Copernicus lance des appels d’offres en synergie avec Horizon Europe, le programme de l’UE qui soutient la recherche. Ce dernier finance des activités de développement technologique ou des innovations liées au domaine spatial, afin d’augmenter l’autonomie de l’Europe en matière d’accès à l’espace.