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Commerce UE-Chine : les 5 enjeux d’un rapprochement

Le 20e sommet UE-Chine a eu lieu les 16 et 17 juillet à Pékin. L’occasion pour Jean-Claude Juncker, président de la Commission européenne, de resserrer les liens entre les deux puissances économiques, mais aussi de chercher un allié face au protectionnisme de Donald Trump.

Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne et Li Keqiang, le Premier ministre chinois.
Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne et Li Keqiang, le Premier ministre chinois. Photo : Commission européenne. 

1- Renforcer les échanges pour contrer le protectionnisme américain

“Je reste plus que jamais convaincu, qu’à l’ère de la mondialisation et de l’interdépendance, le multilatéralisme doit être la constante de notre action” .

Jean-Claude Juncker (les citations proviennent du discours du 16 juillet 2018)

Européens et Chinois commercent déjà activement. La Chine est aujourd’hui le second partenaire de l’UE après les Etats-Unis. Elle représentait 20,2% de ses importations de biens en 2017 et 10,5% de ses exportations. L’UE et la Chine échangent ainsi chaque jour pour environ 1,5 milliard d’euros de biens. L’UE compte donc sur une intensification des échanges avec la Chine pour contrebalancer les pertes avec les Etats-Unis, et vice-versa. Donald Trump s’acharne en effet particulièrement sur l’UE et la Chine par des taxes douanières sur l’acier et l’aluminium.

La Commission européenne a pour objectif de faire d’une relation commerciale privilégiée avec la Chine le socle d’une alliance pour la défense du multilatéralisme. Se présentant en “championne” du libre-échange mondial, Bruxelles entend donc défier le gouvernement américain. Ces négociations à Pékin se placent également dans la continuité de la politique commerciale de l’UE, qui compte multiplier les accords de libre-échange, comme cette même semaine avec le Japon.

2- Défendre le multilatéralisme face aux attaques de Donald Trump

“Nous attendons de tous nos partenaires qu’ils s’en tiennent au respect des règles internationales et des engagements pris, notamment dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce” .

Un partenariat commercial plus étroit entre la Chine et l’UE permettrait également d’asseoir une relation diplomatique durable face au président Trump. Ce dernier ne manque pas d’exprimer son hostilité à leur égard. Dimanche 15 juillet, en amont du sommet UE-Chine, le président a déclaré à la chaine de télévision américaine CBS que “l’Union européenne est un ennemi avec ce qu’ils nous font sur le commerce” , tout comme “la Chine est un ennemi économique, évidemment” .

En réaction aux attaques commerciales américaines, Bruxelles et Pékin ont tous deux déposé plainte auprès de l’OMC contre les droits de douane que les Etats-Unis imposent sur certains de leurs produits. Porter l’affaire devant l’OMC permet aux deux puissances économiques d’afficher leur attachement commun au libre-échange, qu’incarne cette institution. L’Union et la Chine sont aussi favorables à une réforme de l’OMC, qui paraît à l’heure actuelle paralysée. L’administration américaine a en effet déjà imposé des taxes sur l’acier et l’aluminium et a demandé une enquête pour justifier une éventuelle taxation sur les voitures européennes sans que l’OMC n’ait les moyens d’agir rapidement.

Dans ce contexte, Donald Tusk, président du Conseil européen, a appelé à “renforcer l’OMC et garantir des conditions de concurrence équitables” . Attention de “ne pas engager des guerres commerciales qui ont débouché sur des conflits ouverts si souvent dans notre histoire” , a-t-il également prévenu.

3- Ouvrir l’économie chinoise aux Européens

Trop d’entreprises européennes rencontrent des difficultés majeures d’accès au marché chinois et ne bénéficient pas des mêmes conditions d’ouverture que celles offertes aux entreprises chinoises en Europe” .

La Commission européenne veut obtenir de la Chine une plus grande ouverture de son économie aux entreprises, aux marchandises et aux investissements européens. Aujourd’hui, les Chinois investissent encore cinq fois plus en Europe que les Européens en Chine. Les marchés publics sont encore largement verrouillés, tout comme les secteurs des transports, des médias et de la finance sont quasiment inaccessibles aux investisseurs étrangers. A l’inverse, peu de barrières empêchent les investisseurs chinois d’opérer en Europe, une inégalité qui suscite de nombreuses critiques de la part des investisseurs européens.

Le Premier ministre chinois Li Keqiang s’est déclaré favorable à un rapprochement, étant donné que les taxes douanières décidées par les Etats-Unis ont un impact négatif sur l’économie chinoise et que d’autres mesures unilatérales américaines pourraient être mises en œuvre prochainement. La main tendue par Pékin pourrait donc être davantage guidée par un intérêt économique qu’une conviction politique. L’économie chinoise demeure en effet encore largement basée sur son excédent commercial.

4- Limiter les aides d’Etat chinoises

“Il serait important de revoir les règles sur les subventions d’Etat dans le secteur manufacturier pour éviter les phénomènes de surcapacité”

Après le charbon, l’acier est le deuxième secteur reconnu officiellement en surcapacité par le régime de Pékin, qui s’est engagé à fermer des usines pour réduire sa production et ainsi éviter de déverser ses excédents vendus à perte, notamment en Europe. L’Union européenne reproche ainsi à Pékin de subventionner massivement ses industries stratégiques et l’incite à se rapprocher des pratiques européennes de libre-concurrence.

Plus généralement, l’UE tente depuis plusieurs mois de se protéger contre le dumping chinois. Afin d’éviter d’être accusés de discrimination devant l’OMC, les Européens ont donc mis en place des mesures qui permettent d’agir plus rapidement, plus efficacement et avec des taxes antidumping plus élevées contre le commerce déloyal.

5- Stopper les transferts de technologie déloyaux vers la Chine

“La Chine a tout intérêt à mettre fin au transfert forcé de technologies” .

D’après le dernier rapport de la Chambre européenne de commerce, “20% des entreprises européennes présentes en Chine opèrent des transferts de technologie” à des niveaux divers. L’ampleur du phénomène est telle que l’UE a déposé en juin dernier une plainte auprès de l’OMC contre Pékin pour dénoncer les transferts déloyaux de technologie.

En effet, pour intégrer le marché chinois, les entreprises étrangères s’associent avec des entreprises locales pour contourner les interdictions d’implantation. Or par ces accords, les entreprises sont souvent contraintes de livrer une partie de leur savoir-faire technologique. Les industriels protestent donc contre cette obligation sans laquelle ils ne peuvent obtenir aucun contrat et qui peut à terme mettre leur activité en péril. Consentir à d’importants transferts de technologie revient en effet à accepter une future concurrence chinoise dans le même secteur. D’autant plus que les entreprises chinoises ont pour habitude de faire monter les enchères entre entreprises européennes afin d’obtenir le maximum de transferts de technologie.

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