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20 ans après : quels enjeux pour le marché unique ?

Dans le cadre de la semaine du marché unique, la Représentation en France de la Commission européenne et le Ministère du Redressement Productif ont organisé ce matin une conférence - débat portant sur les enjeux du marché unique, 20 ans après sa création. Comment mieux exploiter le potentiel du marché unique pour soutenir la croissance, la création d’emplois et renforcer la compétitivité des entreprises en Europe face aux acteurs mondiaux tout en préservant le modèle social européen ? Â Voici l’un des enjeux qui, parmi d’autres, a pu être abordé pendant cette matinée d’échanges à Bercy.

La politique régionale et la cohésion sociale, un préalable nécessaire à la compétitivité

Interview






A l’occasion de cette conférence Touteleurope.eu a rencontré Michel Barnier. L’occasion de l’interroger sur le rôle de ce marché unique face à la crise et dans la relance de la croissance, sur les nouveaux défis auxquels il doit faire face à l’ère du numérique, et sur le débat autour de son financement, et du budget européen plus largement.

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Michel Barnier, commissaire européen chargé du Marché intérieur et des Services a mis l’accent, après avoir dressé le bilan des acquis du marché intérieur, sur l’importance du facteur social dans le renforcement de la compétitivité des entreprises européennes.

En prenant quelques exemples plus concrets il s’est référé aux consommateurs, pour qui le marché unique a représenté plus de choix entre des produits de meilleure qualité et moins chers, aux nombreux Européens qui ont pu voyager, étudier ou travailler dans un autre Etat membre et enfin aux nombreuses entreprises qui ont pu se développer au-delà des frontières de leur pays. Cependant, il a souligné qu’il faut bien reconnaître que l’anniversaire du marché unique est en grande partie éclipsé par la série de crises qui continuent de toucher l’Europe. C’est pourquoi selon lui, la cohésion sociale est un préalable indispensable avant tout débat sur la compétitivité : ” nous devons faire du marché unique un vecteur de cohésion sociale et d’emploi” .

Rappelons que la politique de cohésion offre des avantages évidents aux régions les plus pauvres de l’UE, mais elle bénéficie également au reste de l’Europe. Il existe un lien clair entre la politique de cohésion et le marché unique. La politique de cohésion soutient les régions en retard de développement afin qu’elles participent au marché intérieur.

La qualité du dialogue social devrait être renforcée selon Michel Barnier et cet enjeu majeur ressort également du rapport Gallois. “Il faut, tout d’abord, réduire la fracture territoriale, parmi les 27 il y a toujours des régions qui tirent le convoi en arrière. Les régions doivent aussi gagner la bataille de la compétitivité” a-t-il ajouté.

Toujours par rapport au dialogue social, Michel Barnier a affirmé son souhait d’utiliser de plus en plus l’approche bottom up en restant à l’écoute de tous les syndicats et acteurs sociaux parce “qu’à Bruxelles on doit passer moins du temps à expliquer aux citoyens (top down approach) et plus à être à leur écoute” .

Jacques Delors : “La solution est simple : la survie ou le déclin”

“En Europe, il faut le pompier, mais aussi l’architecte” .Ancien président de la Commission européenne, Jacques Delors, ne saurait oublier sa formule préférée. En résumant le parcours historique du marché intérieur, il a insisté sur l’inexistence de politique économique et monétaire lors de la mise en place de la monnaie unique.

“L’euro protégeait mais ne stimulait pas et nous protégeait même de nos bêtises. La crise venue des Etats-Unis a illustré les dangers. Mais l’union monétaire est intervenue trop tard et trop peu, comme un avion sans pilote” a-t-il affirmé lors de son discours introductif de ce matin.

Il nous faut “un transfert implicite de souveraineté” a-t-il évoqué à de nombreuses reprises. “L’UEM doit devenir une coopération renforcée. Une harmonisation progressive de la fiscalité des entreprises doit aussi intervenir très rapidement pour faire face au dumping fiscal.

En faisant des commentaires sur les dernières décisions prises à propos de la supervision bancaire, Jacques Delors a critiqué la position de l’Allemagne pour qui selon lui, il faut« que l’on soit au bord du gouffre pour qu’elle accepte des solutions” .

En ce qui la croissance, l’ancien président de la Commission a parlé de croissance verte et de changement du thermomètre de la croissance en expliquant que “la croissance classique sera moins importante que dans le passé. Si cette croissance se développe en insérant les obligations de l’environnement et de la qualité de vie on pourra mieux aboutir à une croissance verte ».

“Le modèle social européen, exceptionnel et extraordinaire”

Lors de la première table ronde s’articulant autour du débat “Comment améliorer la compétitivité des entreprises européennes ?” . Kristin Schreiber, chef adjointe du cabinet de Michel Barnier, est revenue sur les apports du marché intérieur pour les PME et plus précisément sur le fait incontestable que les entreprises peuvent profiter d’une clientèle accrue.

“Si on était seuls, et même si on prend l’exemple de l’Allemagne on ne pourrait pas prétendre à faire partie du tableau des plus grands, il faut être européens pour avoir du “bargaining power” , un vrai pourvoir de négociations. En reconnaissant qu’on ne va jamais être compétitifs sur le niveau des salaires, qu’il faut les adapter pour qu’on puisse survivre, Kristin Schreiber a fait l’éloge du modèle social européen en disant qu’en le comparant avec la Chine notre modèle reste extraordinaire et exceptionnel car la sécurité du travail et de la santé sont exemplaires.

Les profits d’aujourd’hui sont les investissements de demain et les emplois d’après-demain (Schmidt)

En citant cette fameuse formule d’ Helmut Schmidt , Vincent Chriqui, directeur général du Centre d’analyse stratégique, a rappelé en s’appuyant sur l’exemple allemand qu’il faut éviter la logique des prix bas et des coûts bas qui est plutôt une logique des pays pauvres, mais qu’à l’inverse, tout en maîtrisant les coûts, il faut miser sur l’innovation, la recherche et la différenciation, et maintenir des prix élevés qui se justifient par la qualité de la production.

La France n’est pas en retard sur les grandes recherches, selon Vincent Chriqui, mais il faut renforcer la recherche appliquée pour permettre aux entreprises de retrouver la petite innovation ou autrement dit l’innovation incrémentale qui marche très bien en Allemagne.

Le bilan dressé par Bernard Cazeuneuve

Bernard Cazeuneuve, ministre délégué aux Affaires européennes, a présenté lors du discours de clôture tant une liste des avantages et des acquis qu’une liste d’actions qui restent à mettre en œuvre pour l’avenir au sein du marché unique.

Parmi les choses qui restent à compléter, le ministre délégué a évoqué la vision politique équilibrée qui doit donner aux préoccupations environnementales, fiscales et surtout sociales une place plus importante. Il a également parlé du divorce qui s’approfondit entre les citoyens et l’UE et de la carte professionnelle européenne pour favoriser la mobilité. Grâce à cette dernière certains professionnels pourront bénéficient d’une reconnaissance automatique de leurs qualifications du fait de l’harmonisation de leurs formations respectives dans toute l’UE.

Bernard Cazeneuve a, ensuite, souligné qu’il faut mettre “de l’ordre dans la finance” afin de garantir que l’économie réelle soit financée par le système bancaire. Une garantie qui se renforce déjà par l’accélération de la mise en œuvre de la supervision bancaire. Enfin, il a conclu sur le besoin d’une politique industrielle davantage intégrée.

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